Quand les grands créateurs passent des lignes blanches aux noires, on lâche nos manettes pour se plonger dans leur histoire.
En matière de littérature sur les jeux vidéo, la France a longtemps été à la traîne. Les choses sont heureusement en train de changer et, de beaux livres en essais universitaires, le rythme des parutions s’est sérieusement accéléré – même si certains ouvrages fondamentaux, tel Trigger Happy, du journaliste britannique Steven Poole, attendent toujours une traduction française. Pas vraiment privilégiée jusqu’ici, l’approche biographique est aujourd’hui à l’honneur.
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Sept ans après sa sortie outre-Atlantique, Les Maîtres du jeu vidéo de David Kushner bénéficie enfin d’une édition française. Cela valait la peine d’attendre, car le livre possède toutes les qualités de la biographie à l’américaine. Il nous raconte une histoire : celle de deux créateurs qui, entre la fin des années 80 et celle des années 90, ont changé à jamais le jeu vidéo.
John Romero est la diva, le game designer au look de rock-star (cheveux longs, attitude très travaillée) et aux ambitions démesurées. John Carmack, de son côté, serait plutôt le nerd génial, programmeur obsessionnel mais pas très doué pour le dialogue, dont chaque nouveau moteur graphique électrise les joueurs.
Ensemble, ils ont inventé le « first-person shooter » (jeu de tir en vue subjective). Il y eut Wolfenstein 3D, puis Doom, puis Quake, avant que le choc des ego n’aboutisse à la séparation du « groupe ». David Kushner nous fait revivre la saga id Software, studio installé dans la banlieue de Dallas par les deux hommes avec quelques camarades passionnés – dont Adrien Carmack, l’illustrateur morbide, sans lien familial avec John. Et c’est toute une époque qui ressurgit : celle qui vit passer la création vidéoludique du stade de hobby d’ados solitaires à celui d’industrie multimillionnaire.
L’autobiographie de Takahashi Meijin est encore plus dépaysante. L’homme qui nous raconte ici sa vie est un cas. Vedette du jeu vidéo japonais, il ne fut pas un concepteur, mais plutôt une sorte de VRP (salarié, aujourd’hui encore, de Hudson Soft) ainsi qu’un animateur de compétitions vidéoludiques, une figure télévisuelle, un joueur surdoué et la star d’une série de jeux de plateforme, les indémodables Adventure Island. Son fait de gloire dans la « vraie » vie : Toshiyuki Takahashi (son vrai nom, Meijin étant son titre, qui figure sur sa carte de visite, de « maître du jeu ») était, au milieu des années 80, capable d’appuyer seize fois en une seconde sur le bouton d’une manette de jeu.
Le livre est un objet curieux, une sorte de recueil de propos joliment illustré. Qui nous plonge, là aussi, dans un temps excitant mais assurément révolu. C’est le premier volet d’une nouvelle série des très actives éditions Pix’n Love consacrée aux « grands noms du jeu vidéo ». Pour la suite, sont annoncés Shigeru Miyamoto (Mario, Zelda), Yu Suzuki (Out Run, Shenmue) et Michel Ancel (Rayman, Beyond Good & Evil). En attendant, cet ouvrage trouvera, avec celui de David Kushner et entre la DS et la PSP, une place de choix dans la valise de l’estivant gamer.
Les maîtres du jeu vidéo de David Kushner (Ecole des loisirs), 364 pages, 14,80€
Autobiographie d’une idole du jeu vidéo au Japon de Takahashi Meijin (Editions Pix’n Love), 162 pages, 16 €
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