Un nouveau buzz enflamme le web : le Harlem Shake, enfant consanguin du Gangnam Style et du lipdub d’entreprise. Au secours.
1. Du pareil au mème
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Février 2013 : le Harlem Shake dispute à la gastro le statut de “phénomène viral” du moment. Le premier du genre, posté le 2 février (et vu depuis plus de 13 millions de fois) montre quatre jeunes gens déguisés à grand renfort de combis Lycra dansant plus ou moins frénétiquement sur un morceau anxiogène et pompier d’un certain DJ Baauer – logiquement intitulé Harlem Shake.
Suivent d’autres performances qui posent les bases de ces courtes vidéos découpées en deux séquences égales passant de l’indifférence générale à l’hystérie collective. Soit une première partie où un protagoniste déguisé se déhanche seul au milieu d’une scène de la vie quotidienne, qui déclenche la seconde partie : une crise d’hystérie totale, où les personnages s’en donnent à cœur joie pour guincher n’importe comment. D’un “ptit délire” (comme disent les gens qui iront en enfer) entre amis, le Harlem Shake est devenu un mème observé avec plus ou moins d’enthousiasme par plus de 44 millions d’internautes. C’est alors que certaines entreprises ont trouvé ce phénomène de groupe galvanisant et ont décidé de commettre le leur. Le spectre du lipdub n’est pas loin.
2. Lipdub’s not dead
Pour rappel, le lipdub est un type de vidéo où des gens ayant abandonné toute dignité chantent en play-back sur un tube médiocre. Le lipdub est traditionnellement filmé en plan-séquence pour donner à chacun l’occasion de briller l’espace d’un instant en chantant devant une caméra en mouvement. Inventé en 2006 par le créateur du site de vidéo en ligne Vimeo, le lipdub est ensuite devenu un exercice apprécié en entreprise, où il passe encore pour un outil marketing peu onéreux permettant en même temps de renforcer l’esprit d’équipe. En réalité, s’il permet peut-être de créer des liens entre Christiane de la compta et Stéphane, le petit nouveau, le lipdub dit exactement le contraire du message qu’il veut véhiculer. La proposition “nous sommes cool car nous faisons un lipdub” doit en effet être envisagée comme son extrême opposé. Le lipdub de l’UMP sur le morceau Tous ceux qui veulent changer le monde du grand révolutionnaire Luc Plamondon en est l’exemple le plus caricatural.
http://www.youtube.com/watch?v=Yh-3oYs2elc
3. Open space oddity
De même, l’idée contemporaine selon laquelle l’open space est un grand terrain de jeu se doit d’être revisitée. Il faudra plus qu’un Harlem Shake pour nous faire croire que cet espace de travail n’est pas un endroit lugubre, imperméable à la lumière du jour et pas du tout feng shui. Si, depuis les années 90, l’open space est présenté comme un lieu convivial où la communication circule tel un petit vent frais en pleine canicule et où les signes classiques de hiérarchie sont abolis, il n’en reste pas moins un espace de surveillance où, comme l’expliquait Michel Foucault dans Surveiller et punir, le seul sentiment d’être observé est susceptible d’obtenir des sujets une forme d’obéissance. La chose devient vraiment glauque quand on vous propose avec enthousiasme la réalisation d’un Harlem Shake. Reste une solution : se débrouiller comme on peut pour attraper l’autre phénomène viral et être en congé maladie le jour du crime.
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