La réponse provocante de « Causeur » à la tribune des femmes journalistes touchées par le harcèlement de certains politiques a fait réagir sur les réseaux sociaux.
Le magazine Causeur, « salon de réflexions » autoproclamé, dont la ligne éditoriale est résumée dans son slogan, « surtout si vous n’êtes pas d’accord », a créé une fois de plus la controverse mercredi 6 mai. En cause, un article paru sur son site et signé Pascal Bories. Dans cette « tribune », l’auteur vise le manifeste publié par Libération en début de semaine dénonçant le harcèlement dont sont victimes les femmes journalistes par certains hommes politiques.
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Répartie machiste autosatisfaite
Intitulé « Nous hommes journalistes, harcelés… » (et surtout sous-titré « Pourvu que ça dure ! »), l’article de Pascal Bories est une sorte de droit de réponse en forme de répartie machiste autosatisfaite. Le journaliste s’attaque tout d’abord au manifeste en essayant de démonter certains exemples de harcèlement donnés par des journalistes femmes :
Dans la gazette du Marais, nos malheureuses consœurs égrènent les exemples les plus insoutenables du « paternalisme lubrique » qui les afflige. Attention les yeux : « C’est un membre du gouvernement qui fixe intensément le carnet posé sur nos genoux en pleine conférence de presse présidentielle. Jusqu’à ce que l’on réalise que, ce jour-là, nous portions une robe. » Oh my God ! Ou encore plus trash : « A la question “s’il ne fallait retenir qu’un moment de votre première année parlementaire, ce serait lequel ?” c’est un député qui répond dans la minute “quand vous m’avez proposé un déjeuner” » Odieux ! Et ce n’est pas tout, il y a aussi les abjectes propositions faites par texto, telles que l’ignoble : « Une info, un apéro. » Bref, rien que du très, très lourd.
Avant d’enchaîner sur l’ironique « harcèlement » subi par les journalistes hommes, qui se caractérise surtout dans son cas par des sextos et des propositions indécentes :
« Les copines ont raison, le harcèlement touche violemment les journalistes. Mais elles en oublient la moitié, qui ne songeraient pas une seconde à se plaindre des « habitudes machistes, symboles de la ringardise citoyenne et politique » d’hommes « hétérosexuels plutôt sexagénaires ». Le harcèlement, c’est aussi cette étudiante, avec qui on accepte un déjeuner, et qui nous envoie un texto dans la foulée : « Tu n’es pas très joueur… » Puis qui nous fait un strip-tease torride par webcam interposée pour s’assurer d’être prise en stage. Une fois embauchée, pour être certaine que son travail soit apprécié, elle attendra qu’on soit seuls dans les bureaux, le soir, pour nous proposer une gâterie sur mesure. »
« L’égalité, c’est toujours une bataille idéologique »
Sur Twitter, l’article a provoqué une indignation immédiate, de la part de journalistes ou d’autres :
#Causeur dans toute sa splendeur (et sa beauferie) RT @causeur Nous hommes journalistes harcelés. Pourvu que ça dure! http://t.co/0OEDmEIfD7
— Philippe Brochen (@PhilippeBrochen) 7 Mai 2015
Ce qui est bien avec Causeur, c’est qu’on n’est jamais déçu par l’ampleur de leur bêtise http://t.co/Tf0t70XC55 (via @CamilleRevel)
— Fred (@zefede) 6 Mai 2015
Du côté des concernées, on accorde peu d’intérêt aux propos de Pascal Bories et de Causeur. Cécile Daumas, en charge des pages Idées à Libération et une des journalistes à l’origine du manifeste « Bas les pattes », n’est, elle, pas rancunière envers le magazine. Pour elle, cet article fait partie du débat :
« Causeur, on est habitués. Ils défendent ça, c’est leur problème. Ils sont dans leur rôle, on est dans le notre. L’égalité, c’est toujours une bataille idéologique, ça ne fait pas consensus. Certains hommes veulent garder une inégalité et une attitude sexiste mais on a eu par ailleurs plein de réactions de gens qui ont trouvé ce manifeste formidable car juste et courageux. En ce qui concerne les réactions négatives, il y a eu des commentaires sur les réseaux sociaux mais on est habitués. Par contre on a vu aussi plein d’hommes politiques qui avaient des mines déconfites. »
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