Le week-end était cool mais la vous revenez au bureau et on vous parle de la grippe A et ça vous stresse. Gladys Marivat s’est entretenue pour vous avec Jean-Philippe Derenne, ancien chef du service de pneumologie et de réanimation à l’hôpital de la Pitié Salpêtrière, co-auteur de Pandémie, la grande menace (Fayard). 10 raisons de tenir au moins jusqu’au déjeuner.
Ceci n’est pas une grippe porcine
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« Le virus auquel nous faisons face aujourd’hui n’est pas une grippe porcine. La grippe porcine existe, c’est un virus qui est transmis du porc au porc et qui sévit depuis 10 ans aux Etats-Unis. L’OMS a donc fait une erreur en parlant de grippe porcine. Le virus actuel se transmet d’homme à homme, est inédit et mutant : c’est un mélange de grippe porcine, aviaire et humaine. L’OIE (Observatoire Internationale des Epizooties) préfère parler de « grippe nord-américaine », les Etats-Unis de « grippe mexicaine », pour des raisons politiques évidentes. »
On ne sait pas comment un virus passe d’un animal à l’homme
« Le virus actuel est composé de souches humaines, aviaires et porcines. Normalement, il existe une barrière d’espèces qui fait qu’on peut passer à côté d’un verre de terre malade sans attraper sa maladie. Mais là quelque chose d’animal est rentré chez l’homme. Les scientifiques travaillent toujours à comprendre comment cela est possible. »
Aujourd’hui ce n’est pas du cochon qu’on doit se méfier, mais de l’homme
« Aujourd’hui, au 30 avril, la question n’est pas de savoir si on peut approcher ou manger du cochon ou du sanglier. La contamination se fait d’homme à homme. C’est donc de l’homme qu’on doit se méfier, pas du cochon. »
La grippe aviaire sévit encore
« La grippe aviaire a été très médiatisée en 2005, on n’en a plus parlé en 2006 ni en 2007. Pourtant, il y a eu plus de cas humains et animaux à ces dates, surtout en Egypte. Il y a même eu un cas de transmission interhumaine de la grippe aviaire dans le Nord de Sumatra. Les médias ont traité la grippe aviaire en 2006 comme si c’était un épisode, comme si c’était arrivé et que ça s’était arrêté. Or en 2008, il y a entre 44 et 48 cas de grippe aviaire qui ont été identifiés. »
On ne sait pas pourquoi une épidémie vient, ni pourquoi elle repart
« Prenons l’exemple du SRAS en Chine (Syndrome Respiratoire Aigu Sévère, 800 morts en 2003). Pourquoi c’est arrivé ? On ne sait pas. Pourquoi aujourd’hui il n’y en a plus ? On ne sait pas non plus. Aujourd’hui on pense que le SRAS est venu de la consommation de civettes (un petit mammifère carnivore d’Asie du sud-est) crues. On a arrêté l’épidémie de SRAS avec zéro moyen, juste avec des mesures d’isolement et de quarantaine. Depuis, il n’y a pas eu de nouveaux cas. Le virus du SRAS ne se manifeste plus, ça ne veut pas dire qu’il ait totalement disparu. Idem pour la grippe aviaire. Le premier cas s’est manifesté à Hong-Kong en 1997. Ils ont exterminé toutes les volailles et ont éradiqué l’épidémie. 6 ans après, la grippe aviaire a réapparu en Chine. »
Le système d’alerte, c’est surtout pour les gouvernements
« Actuellement, on est dans une totale incertitude. Donc on peut juste être vigilant, inquiet. La population, elle, ne peut rien faire. C’est aux autorités de savoir si tout est prêt, tout est organisé pour faire face à une pandémie mondiale. En France, il nous faut quelqu’un avec une vraie volonté politique. »
Les masques portés par les Mexicains ne servent à rien
« Porter des masques chirurgicaux n’empêche pas d’être contaminé. Si le virus est dans les airs, il peut s’engouffrer sur les côtés du masque. En revanche, si on est contaminé, le masque peut servir à préserver son entourage. Ce qu’il faut, c’est des masques FFP2 ou 3 spécialement faits pour ça. L’ancien ministre de la santé, Xavier Bertrand, a fait une réserve de plus d’un milliard de ce type de masques. »
Il faudra 6 mois pour créer un vaccin
« En général, une pandémie revient toujours une fois voire deux fois et frappe plus fort à chaque fois. On peut donc dire qu’on sera prêt pour la deuxième vague du virus. Mais on ne pourra pas vacciner plus de 10 % de la population. L’objectif ce n’est pas de supprimer le virus, mais d’en limiter les effets. »
Le Tamiflu est efficace
« Le Tamiflu est parfaitement efficace pour traiter ce virus. Ceux qui pensent que les laboratoires peuvent inventer un virus juste pour vendre des médicaments sont stupides. La théorie du complot…Oui peut-être un complot entre le laboratoire GSK et l’oie à tête barrée ! »
Propos recueillis par Gladys Marivat
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