Grâce à une stratégie offensive, Google sort renforcé de la zone de turbulences des conflits juridiques et économiques.
Apple, avec ses bénéfices qui ont doublé en un an, et Facebook, avec ses 750 millions d’utilisateurs, monopolisent l’attention. A contrario, avec une stratégie marketing et d’acquisition pas toujours claire, empêtré dans des problèmes de confidentialité et de droits d’auteur, Google semblait avoir perdu de sa superbe, mais cet été, sa riposte a été énergique.
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En faisant l’acquisition de Motorola, Google part sur les traces du modèle Apple, intégrant hardware et software. Google, qui possédait jusque-là une plate-forme de contenus (You Tube) et un logiciel (Android), aura dorénavant des appareils, ce qui lui permettra de maîtriser la chaîne de bout en bout. Avec Motorola, Google acquiert aussi ce qui lui faisait défaut : des brevets. Ils devraient lui être utiles pour protéger Android des attaques de Microsoft et d’Apple.
Car la guerre de l’innovation fait rage entre tous ces géants. Pour David Drummond, directeur juridique de Google, « le succès d’Android a généré contre ce dernier une campagne hostile, organisée par Microsoft, Oracle, Apple et d’autres. » Alors qu’il voulait acquérir, en avril, les brevets du canadien Nortel, Google se les est faits souffler par une association inhabituelle de rivaux, dont Apple, Microsoft, RIM et Sony.
Le rachat de Motorola ne plaît guère à la concurrence. Peter Oppenheimer, directeur financier d’Apple, a persiflé sur le prix élevé payé par Google. De son côté, Stephen Elop, PDG de Nokia, partenaire de Microsoft pour des mobiles sous Windows 7, a tenté de semer la zizanie entre Google et les fabricants d’appareils sous Android, les engageant à être vigilants vis-à-vis de ce partenaire devenu concurrent. Larry Page, PDG de Google, a affirmé que l’acquisition ne changerait rien à l’ouverture d’Android.
Les réseaux sociaux, un autre champ de bataille
Autre champ de bataille pour Google, celui des réseaux sociaux. Après les échecs de Buzz et de Wave, personne ne donnait cher des capacités sociales de Google. Pourtant son réseau Google+, lancé fin juin, fait un tabac avec 25 millions d’utilisateurs en un mois (Comscore). De quoi inquiéter Facebook ? Insistant sur la protection de la vie privée, Google+ s’est surtout rapidement positionné sur les jeux sociaux, qui assurent fidélisation des internautes et revenus – d’après la banque d’affaires Thinkequity, le marché des biens virtuels atteindra plus de 20 milliards de dollars en 2014.
Facebook, qui tire 30 % de ses revenus de cette source, a cru bon rappeler via son directeur des partenariats jeux, qu’il est de loin le leader (le site a aussitôt malgré tout amélioré ses paramètres de confidentialité). Des rumeurs insinuent toutefois que Facebook ne serait pas très fair-play : les invitations pour Google+ postées sur Facebook ne s’afficheraient pas. Cette compétition pourrait avoir des effets positifs en stimulant l’innovation : Facebook vient de lancer une messagerie instantanée pour Android et iPhone, et Google vient de lancer Photovine, réseau social de photos pour iOS.
A côté de ces deux fronts d’envergure, Google ne néglige pas ses autres batailles. Pour éviter des conflits avec les ayants droit sur You Tube, il a signé en août un contrat avec les sociétés américaines de gestion de droits d’auteur. Et pour parer aux critiques sur son algorithme, il l’a dépoussiéré avec le système Panda, mis en place cet été en France. Panda améliore la qualité des recherches en supprimant des résultats les sites qui copient des contenus ou qui ne sont pas jugés utiles (fermes de contenu, agrégateurs…). En France, des sites comme Wikio ou Ciao ont déjà perdu plus de 50 % de leur visibilité d’après Ranking Metrics.
Enfin, Google a montré ses muscles dans le conflit l’opposant à Copiepresse, regroupement d’éditeurs de presse belges. Alors qu’il avait été condamné en mai à retirer leurs articles de Google News et du cache du moteur de recherche, Google a fait mieux en supprimant les titres concernés de son moteur de recherche. Les journaux, furieux, ont vite vu leur trafic baisser. Suite à cette démonstration de force, le dialogue a été renoué et les sites sont réapparus dans le moteur de recherche, sans que Google ait à craindre d’astreinte. La meilleure défense n’est-elle pas l’attaque ?
Anne-Claire Norot
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