Les wearable technologies, ou accessoires connectés, sont le sujet dont tout le monde parlera dans les années à venir : et si demain Intel, Google et Apple passaient du bureau au dressing ? Paris, mars 2016. La Fashion Week bat son plein, les rédactrices mode jouent aux équilibristes sur talons de 12 et se précipitent […]
Les wearable technologies, ou accessoires connectés, sont le sujet dont tout le monde parlera dans les années à venir : et si demain Intel, Google et Apple passaient du bureau au dressing ?
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Paris, mars 2016. La Fashion Week bat son plein, les rédactrices mode jouent aux équilibristes sur talons de 12 et se précipitent de défilé en after party pour ne rater aucune miette des festivités modeuses. Il fait grand beau et presque chaud pour ces derniers jours d’hiver. On surprend une conversation :
« – J’en peux plus de ce temps, mon bracelet June n’arrête pas de sonner parce que j’ai dépassé mon quota d’exposition solaire de la journée, c’est fatigant à la fin.
-Ma pauvre, je comprends. Heureusement que j’ai remis la main sur mes Google glass by Ray Ban, c’est vachement plus pratique pour streamer mes streetstyles sur le site du mag, je suis carrément moins éblouie.
– Y’a pas à dire, la Fashion Week, c’est éprouvant. Apparemment, j’ai eu un gros pic de stress pendant le défilé Chanel, j’étais à la limite de l’attaque. Ma montre Basis m’a envoyé 15 notifications en 5 minutes, ça m’a fichu tout le show en l’air.
– Ah t’as une Basis ? J’avais pas vu : elle est trop chou.
– Oui, c’est la collection capsule dessinée par Alber Elbaz, tu aimes ?
– J’a-do-re ! »
Cette conversation imaginaire n’est pas une dénonciation du réchauffement climatique mais une introduction aux wearable technologies (littéralement technologies portables, qu’on traduit plutôt par accessoires connectés), sujet le plus brûlant de l’année 2014, si l’on en croit les analystes qui ont suivi en décembre dernier le salon CES de Las Vegas, grande messe geek où sont présentées les innovations technologiques des petits comme des grands groupes de l’électronique mondiale.
Star de cette dernière édition, les wearable tech’ se sont imposées comme the next big thing dans l’agenda de ces firmes qui voient dans les montres, bracelets connectés et autres bijoux bluetooth l’avenir d’un marché actuellement estimé, d’après une étude du Crédit Suisse, entre 3 et 5 milliards de dollars et qui devrait exploser pour atteindre les 30 à 50 milliards dans les 3 à 5 ans. Autrement dit, la parfaite porte de sortie du smartphone et des tablettes pour des géants comme Google (les Googles glass devraient être commercialisées auprès du grand public cette année), Apple (dont on attend avec impatience la présentation de la iWatch), Ebay (qui se lance dans le bracelet-chargeur de téléphone portable USB), Samsung (et sa montre Galaxy Gear) ou des marques de textile qui cherchent à capter ce nouveau marché. Les équipementiers sportifs par exemple, déjà en pointe en matière de tissus techniques innovants, sont naturellement intéressés par ces accessoires originellement construits pour mesurer divers types de performances, se géolocaliser et partager les données en ligne.
Car ces accessoires censés être portables devraient en toute logique être le terrain où se retrouvent les constructeurs d’équipement et les marques de mode pour combiner fonctionnalités innovantes et désirabilité : l’enjeu est d’attirer des consommateurs qui pourraient rechigner à porter sur eux des accessoires pour le moment plus dignes d’un mauvais film d’anticipation que des pages tendances des magazines.
Alors que les Google Glass viennent de subir un heureux relooking de leur monture, mises en scène dans une vidéo avec jeunes hommes barbus et jeunes femmes lookées, il y a fort à parier qu’une fois largement commercialisées, les premières collections capsules pensées par des créateurs de mode verront le jour pour assurer le renouvellement des ventes (des rumeurs ont déjà circulé autour d’un co-branding avec la marque de lunettes pour hipsters Warby Parker), d’autant que la collection Titanium est compatible avec des verres correcteurs ou solaires.
http://www.youtube.com/watch?v=eneEmDtSvzI
Au-delà des lunettes, Google vient d’ailleurs tout juste d’annoncer au festival SXSW son ambition de devenir une plateforme de mise en relation entre des développeurs proposant des applications wearable utilisant les technologies Google et des fabricants qui pourront ensuite les utiliser dans des accessoires connectés.
Dans la veine des collaborations, c’est le duo de directeurs artistiques de Kenzo, fondateurs d’Opening Ceremony, Carol Lim et Humberto Leon, qui a été choisi par Intel pour développer une ligne d’accessoires connectés, sur lesquels plane pour le moment le plus grand secret, mais qui devrait sans aucun doute affoler les geeks branchés mode de Williamsburg à Montreuil. Dans une interview citée dans le magazine en ligne Business of Fashion, Carol Lim explique : « Il y a des produits intéressants qui circulent, mais du point de vue design, c’est le néant. Jusqu’à maintenant, les compagnies technologiques ont essayé de maîtriser l’intégralité du processus de développement, mais pour avancer, un mariage entre une compagnie technologique et une maison de création a beaucoup de sens. Nous voulons créer un produit désirable. Au bout du compte, toutes les fonctionnalités du monde ne se vendront pas si c’est un objet que le consommateur ne veut pas porter ».
Au rang des collaborations mode et technologie, on peut ajouter le partenariat d’eBay avec la styliste des stars Rachel Zoé ou encore celui du bracelet « coach électronique » Fitbit avec la créatrice américaine Tory Burch. Une tendance qui devrait s’accentuer outre atlantique grâce à l’implication du CFDA (Council of Fashion Designers of America), qui s’est emparé du sujet depuis que sa présidente Diane von Furstenberg a fait porter des Google Glass à ses mannequins lors de son défilé de l’automne 2012, et qui agit comme véritable catalyseur de collaborations entre créateurs de mode et d’électronique.
Reste entière toute la question de ces fameuses fonctionnalités : si on a bien compris l’intérêt d’avoir un bracelet connecté pour la surveillance des performances physiques (NikeFuelBand), un casque de moto esprit Iron Man offrant la possibilités de navigation en réalité augmentée (LiveMap), on a un peu plus de mal à s’imaginer porter des bijoux bluetooth dont on pourra changer la couleur via une application mobile (CSR x Cellini). Mais qu’on se rassure, les Américains sont sur le coup, et dans quelques années les accessoires connectés nous seront devenus tout aussi indispensables que notre smartphone et tout aussi stylés que notre paire de sneakers la plus cool.
Alicia Birr
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