Directeur sportif de l’OM, le très Marseillais José Anigo est un type sulfureux. Mais efficace. Son rôle dans le titre de champion que vient de remporter Marseille, le premier depuis 18 ans, a même été prépondérant.
Les soirs de match, il se planque. Il s’installe dans une minuscule pièce, perdue dans les couloirs du Stade Vélodrome, et suit la rencontre là, en solo, sur un écran de télé tout crade. « Je suis trop tendu pour aller sur la pelouse, ou en tribunes, dit-il. Je me sens mieux en coulisses. » Parce que c’est encore le meilleur endroit pour tirer les ficelles ?
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A Marseille, depuis cinq ans, José Anigo fait directeur sportif. Sa mission principale consiste à diriger le recrutement du club. C’est un job obscur mais crucial, puisqu’en football, un recrutement raté peut plomber une saison. C’est aussi un job controversé, puisqu’il implique une proximité avec les millions qui transitent sur le marché des transferts, et sous-entend une connivence avec un tas d’intermédiaires douteux. José Anigo, grande gueule, verbe fleuri, n’échappe donc pas aux rumeurs, voire aux soupçons.
On sait qu’il fait souvent affaire avec les deux ou trois mêmes agents, ses amis, quitte à faire atterrir à l’OM des joueurs objectivement trop légers. On sait aussi que certaines de ses recrues ont bénéficié de curieux contrats. Plusieurs d’entre elles touchent ainsi chaque année, à la même période, une prime colossale et sans justification apparente. Ce n’est pas illégal, mais c’est intrigant. Ces primes reviennent-elles ensuite aux agents des joueurs (les fameux amis de José), constituant ainsi des commissions illégales ? Rien n’a jamais été prouvé. Et l’intéressé dit se foutre des rumeurs. Mais quand un article lui déplait, il prend tout de même la peine d’appeler le journaliste, pour lui faire savoir qu’il sera « accueilli » à sa prochaine visite à Marseille…
Anigo sait que cela fait son petit effet, car ses liens avec le milieu sont documentés. Son fils Adrien a passé deux ans et demi en prison pour une série de braquages, avant d’être libéré en novembre dernier, pour vice de forme. Lui-même est ami de longue date avec Richard Deruda, plusieurs fois condamné pour association de malfaiteurs et braquage à main armée. Avec l’autorisation d’Anigo, celui-ci a même longtemps fréquenté le centre d’entraînement de l’OM, où il faisait soigner sa sciatique par le médecin du club. Richard Deruda pouvait alors croiser son fils, Thomas, devenu pro à l’OM en 2005, grâce au piston, vous avez pigé, du bon José.
La réussite actuelle de l’OM, vainqueur de la Coupe de la Ligue et championne de France, ne gomme pas cette réputation sulfureuse. Mais elle met autre chose en lumière. Dans son genre, José Anigo est un type plutôt efficace. Disons qu’il a l’œil. Et sait identifier un bon joueur, ou, plus dur, un futur bon. En cinq ans, il a fait venir à l’OM, pour des sommes raisonnables, un paquet d’espoirs rapidement devenus stars (Ribery, Niang, Mandanda). Il a aussi identifié le potentiel de parfaits inconnus (Valbuena, Brandao, Kaboré) devenus les acteurs principaux du retour au premier plan de l’OM.
Les Marseillais savent tout ça. Ils adorent Anigo. Gamin des quartiers de Nord, ancien joueur (plutôt laborieux) de l’OM, il a la main sur les supporters. Il peut les calmer, négocier avec eux, ce qui constitue toujours un enjeu majeur à l’OM. Dans un club désormais dirigé par des Parisiens (Vincent Labrune, président du conseil de surveillance, Jean Claude Dassier, le président), Anigo est devenu la caution marseillaise. La seule. Cela fait de lui un intouchable. Peu importe la méthode.
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