En cinq ans à peine, Facebook, le réseau social imaginé Mark Zuckerberg a réussi à fidéliser près de 150 millions de friends. L’occasion de revenir sur le phénomène au-delà des clichés et des platitudes d’usage.
Il semble que tout ait déjà été dit sur Facebook. Outil fantastique, croissance spectaculaire, fichier de renseignement intrusif, support marketing, et autres platitudes du genre. Le site fascine (ça aussi c’est une platitude), tout le monde a un avis sur la chose.
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Facebook a plus ou moins changé le regard du citoyen lambda sur Internet. Autrefois considéré comme une zone de non-droit où quelques asociaux tentaient désespérément de créer du lien social, Internet est devenu le rendez-vous des blagues potaches entre vieux potes de collège ou collègues de bureau. Il n’est plus étrange de passer une soirée entière connecté ou d’entretenir une « conversation » avec quelqu’un qui n’est effectivement pas dans la même pièce. Facebook est le premier site réellement fédérateur, celui où on peut trouver son correspondant de cinquième, son supérieur hiérarchique, son prof ou cette fille qu’on a croisé en soirée mais à qui on n’a pas osé parlé. La démocratisation d’Internet a largement contribué à l’avalanche d’inscription en France où le site s’est substitué à Myspace, Copains d’avant et, dans une moindre mesure, Meetic.
Il y a 8/10 ans, Internet était un territoire détaché de la vie sociale réelle. Rares étaient ceux qui côtoyaient sur des forums, caramail ou IRC des gens à qui ils avaient déjà adressé à parole dans la vie. Le rapport à l’autre sur Internet était désincarné, centré autour d’intérêts communs à grands renforts de lol. Les réseaux sociaux ont considérablement changé la donne en permettant à l’internaute lambda de créer son espace, d’exposer ses goûts, de publier des photos personnelles, en d’autres termes, de faire l’article.
Cette mise en scène de soi dans des petites cases dédiées trouve son apogée sur Facebook et c’est précisément là l’aspect le plus intéressant du « phénomène ». Il n’est plus besoin d’avoir une actualité pour en faire part aux autres, sans même que ceux-ci le demandent. Le statut, exprimé à la troisième personne apparaît comme un formidable outil pour romancer sa vie. Idem pour les milliers de photos uploadées quotidiennement sur le site. Quarante ans plus tôt, Debord écrivait (en détournant Marx) « Toute la vie des sociétés dans lesquelles règnent les conditions modernes de production s’annonce comme une immense accumulation de spectacles. Tout ce qui était directement vécu s’est éloigné dans une représentation« . Même s’il est toujours délicat – voire inapproprié – de citer Debord en amputant ses idées de leur aspect profondément révolutionnaire, en termes de rapports sociaux médiatisés par des images, Facebook se pose là. Et s’impose comme un objet d’étude passionnant qui mériterait probablement autre chose que les platitudes d’usage.
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