Ce 21 mai, les écologistes tenaient un dernier meeting à Paris avant les européennes du 26 mai. Entre quelques saillies adressées à Jean-Luc Mélenchon, EELV a clairement identifié sa cible : Emmanuel Macron.
Les écologistes en ont gros. Depuis 2009, les européennes, c’est leur élection. Ils avaient alors obtenu 16% des voix. Dix ans plus tard, l’exploit ne se réitérera sans doute pas à cette hauteur – d’après un sondage Ipsos-Steria pour Le Monde, EELV obtiendrait 8,5% des voix le 26 mai. Alors que cinq listes se disputent l’électorat de gauche (LFI, PCF, Place publique – PS, Génération.s, EELV) avec des programmes qui mettent en valeur la défense de l’environnement, le partage va être serré. « Cette élection, c’est plié », affirme de manière fataliste Marie-Monique Robin, réalisatrice du documentaire Le monde selon Monsanto, venue soutenir Yannick Jadot – même si elle a « des copains » dans les quatre autres listes – ce 21 mai lors de son dernier meeting au Cirque d’hiver, à Paris.
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Capitaliser sur le bilan
Dans le sprint final de cette campagne éclair, EELV ne cède cependant pas au découragement. L’écologie, ce ne sont pas des mots, mais des actes, répètent en substance les intervenants – nombreux – sur la piste décorée de douze étoiles vertes de circonstance. Et en la matière, le groupe vert au parlement européen n’a pas à rougir – ce serait un comble. Pour chaque combat, une personnalité écolo légitimée par son militantisme de terrain : l’eurodéputée Michèle Rivasi pour la lutte contre le nucléaire, l’eurodéputée Eva Joly – acclamée longuement – pour la lutte contre les paradis fiscaux, le soutien de Yannick Jadot Antoine Deltour pour la protection des lanceurs d’alerte, l’eurodéputé José Bové pour la lutte contre les OGM et les perturbateurs endocriniens, ou encore Damien Carême, le maire de Grande-Synthe, pour l’accueil des migrants. Le message est clair : quand on veut, on peut. « Sur la pêche, les perturbateurs endocriniens, les OGM, la PAC, s’il n’y avait pas eu les écolos, jamais ces textes ne seraient passés ! » lance José Bové, exaspéré par l’usurpation des revendications écologistes par les concurrents d’EELV.
“Ne pas se laisser voler cette élection”
La petite musique de l’impuissance prétendue du Parlement européen ne plaît guère aux écolos. Elle les inquiète, aussi, car elle démobilise la jeunesse, celle qui manifeste pourtant le vendredi pour le climat, et qui les « oblige », selon Yannick Jadot. Selon un dernier sondage de l’Ifop, 77 % des Français de 18 à 25 ans comptent s’abstenir lors du scrutin du 26 mai. Arrivé en piste au pas de course, les bras écartés au-dessus de lui – De Gaulle style – le candidat en tête de liste d’EELV a appelé ses troupes, qui ont eu du mal à remplir complètement le Cirque d’hiver, à « ne pas se laisser voler cette élection ». Son adversaire était tout désigné : « Depuis deux ans, Macron a toujours arbitré pour le glyphosate, pour les pesticides, pour la déforestation… L’écologie de la promesse, de l’inaction, merci, allez voir ailleurs ! » tonne-t-il. L’ancien allié de Benoît Hamon à la présidentielle de 2017 voit d’un mauvais œil le duel s’installer de manière insidieuse entre la liste La République en marche (LREM) et le Rassemblement national (RN). Citant en exemple l’élection de Trump, la victoire du Brexit ou l’arrivée au pouvoir de Salvini en Italie, il alerte sur le risque de banalisation de l’extrême droite : « D’un président qui avait fait de l’Europe un grand thème de 2017, en arriver à jouer moi ou le chaos, c’est terrible, c’est lamentable, c’est une désertion du combat. »
“Boule puante”
Enfin, les écologistes – d’habitude irénistes avec leurs rivaux de gauche – ont décoché quelques flèches à l’encontre de Jean-Luc Mélenchon. Ils reprochent au leader de la France insoumise (LFI) d’avoir accusé EELV à tort de vouloir faire une coalition avec le PS, Les Républicains (LR) et LREM au Parlement européen. Au départ, cette éventualité a été évoquée par Stéphane Séjourné, directeur de campagne de LREM : « Il est probable que le groupe des Verts, le groupe socialiste et le groupe PPE (LR) fassent partie d’une majorité avec nous », a-t-il déclaré. L’argument de campagne de LFI dans cette dernière ligne droite tient donc dans l’évitement de cette supposée « grande coalition ». Mais les responsables écologistes démentent formellement et qualifient cette allégation de « boule puante ». David Cormand, le chef d’EELV, y a répondu dans une lettre ouverte publiée dans Libération. En aparté du meeting, il tempête : « L’obsession de Mélenchon, c’est d’arriver en tête de la gauche, quitte à faire 9%. C’est irresponsable. Je ne supporte pas qu’on salisse l’histoire des Verts. On ne s’essuie pas les pieds sur l’écologie politique. » Eva Joly glisse également un mot à ce sujet : « J’entends souvent mon ami Jean-Luc Mélenchon dire qu’on ne peut rien faire avec ces traités. Il se trompe. La campagne qu’il mène contre nous n’est pas responsable. Il ferait mieux de déployer son énergie, qu’il a grande, contre Marine Le Pen. Mais je sais que mes camarades insoumis valent mieux que ces campagnes de dénigrement. »
“Le temps où on voulait influencer le pouvoir est terminé”
Tout le monde pense déjà à l’après-européennes, et aux recompositions à venir à gauche, alors que celle-ci est partie éparpillée façon puzzle à ce scrutin de manière mortifère. Inspirés par Gilles Simeoni, le président du Conseil exécutif de Corse présent ce soir – dont le parti autonomiste corse Inseme per a Corsica est passé « de 5% il y a quelques années à 56% en décembre 2017 » – les verts veulent pourtant y croire pour le 26 mai. Objectif : déplacer le centre de gravité politique de l’Europe vers l’écologie. « On ne veut pas jouer les petits bras. Le temps où on voulait influencer le pouvoir est terminé, on veut prendre le pouvoir désormais », lance David Cormand. Réponse après le « vote du siècle » (dixit Yannick Jadot), ce 26 mai.
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