Pour lancer les festivités du 35e anniversaire de Super Mario Bros, Nintendo ressort sur la Switch les trois jeux de plateforme en 3D de son plombier star : Super Mario 64, Super Mario Galaxy et Super Mario Sunshine, qui pourrait bien être la vraie pépite de ce Super Mario 3D All-Stars. Et aussi : l’adorable aventure Giraffe and Annika, le platformer hardcore et néanmoins enchanteur OkunoKA Madness et le très bon puzzle game Batu Ta Batu.
“It’s-a me, Mario !” Pas de doute, c’est bien lui, le bondissant plombier (ou ex-plombier, on s’y perd) à moustaches, la plus grande star du jeu vidéo qui, si elle n’a jamais vraiment quitté le devant de la scène, devrait y être plus présente que jamais au cours des prochains mois. Si sa toute première apparition remonte au Donkey Kong fondateur de 1981, c’est quatre ans plus tard que Mario a vraiment pris son envol en devenant officiellement “Super”. En 1985, le 13 septembre exactement, sortait ainsi (au Japon) l’épisode inaugural de la série Super Mario Bros. C’était il y a exactement 35 ans et, à en croire les annonces récentes de Nintendo, on n’a pas fini d’en entendre parler.
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D’ici le printemps prochain, c’est une avalanche de jeux Mario qui s’annonce, sans compter les nombreux partenariats commerciaux, avec un mélange de nouveautés (Mario Kart Live Home Circuit qui mêle jouets télécommandés et réalité augmentée, Super Mario 35 qui réinterprétera la formule originale sous l’angle du “Battle Royale”), d’événements spéciaux dans des jeux déjà sortis (Animal Crossing, Splatoon 2, Super Smash Bros, Super Mario Maker 2) et de rééditions, dont celles du premier Super Mario Bros sous forme de mini-console Game & Watch (le 13 novembre) et de Super Mario 3D World (début 2021). Pour entamer les festivités, deux anthologies Super Mario ont d’ores et déjà fait leur arrivée sur la Switch. Déjà connue, la première, Super Mario All-Stars, a rejoint la collection de jeux disponibles avec l’abonnement Nintendo Switch Online et rassemble les épisodes en 2D parus initialement sur la NES (Super Mario Bros, The Lost Levels, Super Mario Bros 2, Super Mario Bros 3). Mais c’est la seconde, baptisée Super Mario 3D All-Stars, qui crée l’événement en réunissant les trois premières aventures en 3D de notre héros bien-aimé, dont le controversé Super Mario Sunshine qui n’avait encore jamais été réédité depuis sa sortie en 2002.
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Vilain petit canard
Sunshine, c’est un peu le vilain petit canard de la famille Mario (mais on connaît le destin des vilains petits canards), successeur du fondamental Super Mario 64 (qui figure aussi dans cette anthologie) dont il reprend les grandes idées pour les prolonger sans craindre de rompre en parallèle avec certaines traditions de la saga. Jusqu’à frôler le sacrilège en équipant Mario d’une sorte de sac à dos-canon à eau faisant aussi office de jetpack qui, entre autres choses, lui permet de se déplacer d’un point élevé à un autre beaucoup plus aisément que s’il devait, comme à l’accoutumée, compter sur la seule précision de ses sauts. A noter que la distance qu’il peut parcourir reste quand même limitée et que cet accessoire béni lui est retiré à l’entrée de certains niveaux dans lesquels l’univers balnéaire joyeusement cartoon de Sunshine cède la place à des enchevêtrements quasi démoniaques de formes géométriques mouvantes, que l’on traverse sans filet.
D’un côté, un monde cohérent et riche en détails à explorer pour en dévoiler tous les secrets. De l’autre, un parcours abstrait à suivre du point de départ jusqu’à l’arrivée. Entre ces deux pôles opposés naviguent depuis toujours les Super Mario en 3D, et la particularité de Sunshine est d’aller vraiment très loin dans ces deux directions. Mais si ces niveaux-parcours “secrets” frappent autant, c’est parce qu’ils s’intègrent dans un jeu-monde ouvert comme peu de platformers l’avaient jusqu’alors été. Se replonger dans Sunshine sur la Switch, dans une version graphiquement plus lisse mais pour le reste identique à celle de la GameCube, c’est comme refaire un même voyage dix-huit ans après. C’est, de la place Delfino au Parc Pinna en passant par le Port Ricco, retrouver des couleurs, des lumières, des sensations. Presque des odeurs, d’ailleurs – le cerveau fait de ces trucs, parfois. Comme pour d’autres jeux, bien sûr, mais d’une manière plus intense qu’avec la plupart d’entre eux. Car cette île sur laquelle on débarque avec Mario au début du jeu n’est pas une collection de lieux disjoints comme dans Super Mario 64 (où, tel Alice passant de l’autre côté du miroir, on pénètre dans un niveau en sautant dans un tableau le représentant accroché au mur du château).
Une leçon
Davantage que tout autre jeu Mario en 3D, Super Mario Sunshine présente un univers cohérent, dans lequel un lieu fait écho à un autre que, d’ailleurs, on aperçoit parfois à l’horizon. Et si les différents défis qui nous sont proposés (se rendre à un point précis du décor, triompher d’un monstre gluant, remporter une course de vitesse, dénicher et ramasser des trésors…) possèdent une valeur en eux-mêmes, c’est la manière dont ces activités viennent approfondir notre relation avec ce monde, son architecture, ses formes, ses angles, ses textures et ses habitants virtuels, et renforcer notre engagement, qui fait toute la différence et rend l’expérience mémorable. La vérité de Super Mario, en 2D comme en 3D au fond, éclate ainsi dans Sunshine peut-être plus encore que dans tout autre épisode de ses aventures : ce qui fait le prix de Mario, c’est que ce que l’on y fait a du sens. Pas au regard du scénario-prétexte à peu près aussi absurde que d’habitude, mais par ses détails, gestes, courses ou bonds, et par la manière dont ils s’intègrent dans le tableau global. Du sens pour nous (qui soufflons en essayant de trouver cent pièces jaunes sur la plage de Gelato-les-Flots, par exemple), pour les incarnations purement burlesques que sont ses personnages, pour cet univers utopique, même dans la tempête, où tout est lié et tient aussi grâce à nous.
C’est pour cela, en particulier, que malgré ses défauts (dont des problèmes de « caméra », c’est-à-dire de point de vue sur l’action qui, à l’usage, se révèlent plutôt pires que dans nos souvenirs), Super Mario Sunshine ressemble à une leçon de game design, que gagneraient sans doute à suivre bien des jeux supposément plus ouverts et luxueux. Jusqu’à éclipser Super Mario Galaxy, le troisième jeu présent dans cette collection essentielle ? Peut-être un peu parce que, depuis toutes ces années, l’estival Sunshine nous avait tant manqué. Mais lui aussi, treize ans après son arrivée sur la Wii, est toujours exquis.
Super Mario 3D All-Stars (Nintendo), sur Switch, de 50 à 60€. Edition limitée disponible jusqu’au 31 mars 2021.
Et aussi :
Giraffe and Annika
Dans le jeu vidéo comme ailleurs, qui dirait non à un peu de douceur ? Jeu d’aventure modeste aux allures de conte naïf issu d’un studio indépendant japonais, tout à la fois un rien mélancolique et lumineux, Giraffe and Annika nous envoie percer les secrets d’une île mystérieuse en compagnie d’une jeune fille aux oreilles et à la queue de chat du nom d’Annika. Qui, comme le veut le genre, gagnera peu à peu des capacités (sauter, plonger…), poussera toujours plus loin son exploration, mais n’oubliera quand même pas de s’arrêter pour jouer du tambour ou parler aux oiseaux. Ici, les donjons sont des sentiers de promenade qu’on arpente sur fond de musique jazzy, et les combats de boss d’entraînantes séquences de rhythm game. Discrètement mélancolique mais rieur, Giraffe and Annika fait chaud au cœur.
Giraffe and Annika, sur Switch et PS4, Atelier Minima / NIS America, environ 30€. Egalement disponible sur Xbox One et Windows. Textes et menus en anglais.
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OkunoKA Madness
Ce n’est pas parce qu’un jeu nous en fait baver que son style graphique doit être sinistre. Celui d’OkunoKA Madness se révèle même franchement enchanteur jusqu’au moment où l’on se rend compte que, niveau difficulté, ce platformer en 2D n’a rien à envier au terrible Super Meat Boy. L’œuvre du studio Caracal Games est cependant du genre sévère mais juste, et c’est aussi un plaisir d’apprendre à enchaîner les bons gestes et à maîtriser les trajectoires de sa petite créature bleue pour atteindre la sortie de ses multiples niveaux – plus de 100. Un plaisir et une souffrance, les deux, un peu comme s’entraîner à jouer d’un instrument de musique, disons. D’ailleurs, quand on y arrive enfin, on n’en ressort pas seulement avec l’impression d’avoir triomphé de l’adversité mais, aussi, d’avoir réussi quelque chose de beau. C’est la cerise sur ce savoureux gâteau.
OkunoKA Madness, sur Switch, PS4, Xbox One et Windows, Caracal Games / Ignition Publishing, environ 15€
Batu ta Batu
Conçu en solitaire par le game designer basque Erik Zubiria, dont c’est le premier jeu publié, Batu ta Batu est un modèle de puzzle game ligne claire, d’apparence presque banale et pourtant extrêmement accrocheur et stimulant sur la durée. Le but, a priori pas bien original, est de rassembler des briques de même couleur pour les faire disparaître. Mais le système de contrôle atypique, la multitude de modes de jeu (“sans fin”, “retirer une couleur”, “encerclé”, “sprite”…) et plus généralement son sens du rythme font qu’on ne lâche pas si facilement le faussement modeste Batu ta Batu. Qui, dans son genre, est l’une des meilleures surprises du moment.
Batu ta Batu, sur Switch, PS4, Xbox One et Windows, EZSD / 2Awesome Studio, environ 5€
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