La droite a tranché. Laurent Wauquiez est le nouveau président des Républicains, élu avec pratiquement 75 % des voix. On a vécu la soirée dans son QG. On vous raconte.
Ce couple de retraité, assis sur un rebord, semble un peu déçu. « Y’a pas un petit martini au bar ? », s’enquiert la femme. « Non, que du jus de fruit pour le moment », lui répond l’homme, reprenant une gorgée de jus de pomme. Tant pis. Ils se consolent comme ils peuvent en observant Nadine Morano assurer la première partie du spectacle du soir en se déhanchant sur L’Envie d’avoir envie, en hommage à Johnny Hallyday, décédé quatre jours plus tôt. Il est 20 heures depuis quelques minutes, ce dimanche 10 décembre au Tripot Régnier dans le XVe arrondissement de Paris et environ 200 personnes attendent le résultat du premier tour de l’élection du président des Républicains. Même si personne, parmi l’assemblée ne croit à un second tour dimanche prochain. « Plus que le résultat qui ne fait pas vraiment de doute, on va être attentif au score et au chiffre de la participation », explique Corentin, 28 ans.
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Au QG de Laurent Wauquiez, le message est clair et N. Morano assure le show en attendant les résultats. #electionLR2017 pic.twitter.com/a4Jd0OO9fq
— Julien Rebucci (@julienrbcc) December 10, 2017
A 20 h 16, tous les yeux se lèvent vers les écrans pour écouter religieusement Anne Levade, en charge des résultats. Sans surprise, avec 74,64 % des suffrages exprimés, Laurent Wauquiez s’impose devant Florence Portelli (16,11 %) et Maël de Calan (9,25 %). Le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes récupère ainsi le poste vacant depuis la victoire de François Fillon à la primaire de la droite pour la présidentielle de 2017, si proche (c’était le 27 novembre 2016) mais si loin à la fois tant l’état du parti et l’ampleur de la tâche qui lui incombe désormais est gigantesque. D’autant qu’un rapide calcul (73 544 voix pour Wauquiez sur 234 556 électeurs inscrits) montre qu’il a été élu par 31,35 % des membres du parti. Le plébiscite est encore loin.
« Tout reconstruire avec des nouveaux visages »
Un quart d’heure plus tard, le champion de la soirée fait son entrée sous les hourras de la foule, dans une salle pourtant loin d’être comble. « Ce soir, c’est le début d’une nouvelle ère pour la droite », entame le Laurent Wauquiez président avant de marteler son gimmick, devenu son cri de campagne : « Oui ce soir, la droite est de retour. » Le ton est vite donné : il faut « tout reconstruire avec des nouveaux visages. » Pense-t-il à ce moment précis à Eric Ciotti, Eric Woerth, Nadine Morano, Christian Jacob, Valérie Boyer, Alain Joyandet ou d’autres qui ont fait le déplacement pour l’applaudir ? Wauquiez évoque ensuite son projet pour une droite « franche, déterminée et droite » donc de droite selon lui.
C’est une droite renouvelée qui se lève aujourd’hui, une droite qui assume ses valeurs, une droite sereine qui ne se cachera plus dans les petits renoncements. Elle sera franche, elle sera déterminée, elle sera droite. pic.twitter.com/VZiLX10xMn
— Laurent Wauquiez (@laurentwauquiez) December 10, 2017
Quelques instants avant cette prise de parole, celui qui tenait les rênes du parti, Bernard Accoyer, a tenu quelques mots en direct du QG des Républicains, à quelques centaines de mètres du lieu des festivités. En vieux sage, le député de la Haute-Savoie a mis en garde le nouveau président, contre toute tentative de division : « C’est un brillant succès malgré les embûches. Je sais que [Laurent Wauquiez] rassemblera, je sais qu’il fera ce travail de refondation politique. » Au même moment, au Tripot Régnier, l’ambiance peine à décoller.
Xavier Bertrand et Valérie Pécresse mis en garde
Il faut vite évacuer la question du rassemblement. L’intéressé y a répondu en deux points. En faisant d’abord applaudir ses deux challengers, le juppéiste Maël de Calan et la filloniste Florence Portelli. Puis, en tentant de faire revenir les brebis égarées. Par la force s’il le faut. La main tendue ces derniers jours aux cadres restés discrets durant la campagne comme Xavier Bertrand ou Valérie Pécresse s’est donc transformé ce soir en avertissement. « Je respecte le choix de ceux qui n’ont pas fait campagne, a-t-il débuté sans citer de noms avant d’expliquer que « personne ne peut plus être spectateur. » A l’heure on l’on écrit ces lignes, ni la présidente de la région, Île-de-France ni son collègue des Hauts-de-France n’ont réagi. Ambiance.
Mais bon, parce que la soirée était avant tout à la fête, Wauquiez a enchaîné face à son public, en faisant du Wauquiez. Morceaux choisis : « La France a besoin de la droite », « il y a un manque de fermeté face à l’intégrisme islamique », etc. Court et efficace. Après un discours de cinq minutes, il s’éclipse sans avoir goûté à un verre des bouteilles de malbec enfin débouchées. Parmi les militants, on est soulagé : « Enfin, on récupère un chef de parti », plastronne Tom, 17 ans, militant depuis l’année dernière. Il attend de Wauquiez qu’il mène une « vraie politique de droite, un peu comme Nicolas Sarkozy. » D’autant qu’il y a des déçus à reconquérir. Sidonie, 22 ans, évoque par exemple « l’open-space à ciel ouvert » que serait en train de concocter le gouvernement. « La start-up nation n’est pas un projet », tonne-t-elle. Corentin lui, regarde de l’autre côté du spectre : « En dix ans, l’extrême-droite nous a beaucoup plus pris de voix que Macron lors de la dernière présidentielle. » Il se frotte presque les mains lorsqu’il évoque une Marine Le Pen « en grande difficulté, obligée de faire des gestes désespérés », envers son nouveau champion. « Personne n’est dupe », finit-il par prévenir.
Nadine Morano fait le show
La fin de soirée prend des allures surréalistes. Le nouveau président parti, les vieux briscards de la droite font le job devant les nombreux médias qui ont fait le déplacement pour l’événement. Au même moment, Aurane Reihanian, président des jeunes avec Wauquiez, prend le contrôle du pupitre vacant avec quelques ouailles pour se faire applaudir. « Bravo les jeunes ! », encense alors Nadine Morano avant d’immortaliser l’instant avec son téléphone. On entend jaillir des « Aurane président », « Aurane président » de la salle. La division déjà ? Non ce soir c’était la fête chez les Républicains qui viennent d’élire leur nouveau chef. On garde ça pour le lendemain, si la gueule de bois n’est pas trop forte.
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