Enfant efféminé, ado gothique puis punk alcoolique, le Californien Rick Owens est le hérault du style glamour grunge. Il sublime le T-shirt déchiré et met des jupes aux hommes. Une figure spectaculaire de la mode d’aujourd’hui. Entretien.
Les ouvriers s’activent au premier étage mais il n’entend rien. Souriant, imperturbable, Rick Owens fait le ménage sur sa table de travail puis ouvre une fenêtre pour nous montrer la vue imprenable sur les jardins du ministère de la Défense. « De temps en temps, dit-il, un orchestre joue La Marseillaise, c’est absolument charmant. » Depuis huit ans, Rick Owens est installé là, place du Palais-Bourbon, dans l’immeuble de cinq étages qui abrita entre 1975 et 1980 le siège du Parti socialiste.
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Californien de naissance, parisien d’adoption, Rick Owens est un créateur fondamental. Sans l’appui financier d’un grand groupe, sans aucune publicité, il a construit en une quinzaine d’années une marque florissante, et a formé l’air de rien une drôle d’armée. Autour des défilés, ils sont souvent plus d’une dizaine entièrement vêtus des pièces de la marque, comme en uniforme. Rick Owens a ses soldats et, depuis quelque temps, il a aussi de plus en plus de réservistes : en 2009, lors d’une visite officielle en France, Michelle Obama portait un cardigan de la marque, sur un banal pantalon gris.
Comme chaque année, son défilé est l’un des événements de la fashion week. Mais, ce jour-là, deux semaines avant l’échéance, Rick Owens ne présente aucun signe caractéristique du designer hystérique. « J’ai 50 ans, j’ai décidé que je ne serai plus un gamin en retard et paniqué », explique-t-il en souriant. Avec lui, tout est extraordinaire et simple à la fois.
Quand on l’interroge sur sa collection à venir, Rick Owens ne fait aucun secret. Il montre les tissus posés juste à côté d’une tête de mort sur l’immense table en bois. Puis fait défiler sur son ordinateur des images de pièces en cours de fabrication dans ses ateliers italiens. Le gris et le noir sont omniprésents, les manches et les robes aussi longues que d’habitude. Le triangle, gimmick graphique qui définit la coupe de la majorité de ses pièces, est bien là. Rick Owens n’est jamais aussi fort que quand il fait du Rick Owens.
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