Un témoignage choc publié par « Le Monde » avant la diffusion sur France 2 d’un documentaire sur les violences sexuelles pendant la guerre civile syrienne.
C’est un témoignage à glacer le sang, publié par Le Monde ce 5 décembre. Hasna Al-Hariri, une Syrienne de 54 ans, a passé plusieurs mois dans les geôles de Bachar Al-Assad, de 2011 à janvier 2014. Elle y a subi et vu un véritable enfer pour les femmes, et fait partie des rares personnes qui osent aujourd’hui en témoigner ouvertement, alors qu’elle a perdu trois de ses fils, son mari, quatre beaux-frères et quatre gendres, tous assassinés dans la guerre civile. « Je veux que le monde entier sache jusqu’où Bachar Al-Assad est allé dans l’horreur et comment il a martyrisé son peuple », affirme-t-elle dans cet entretien réalisé le 2 décembre.
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« Un jeune soldat m’a enfoncé les doigts dans le sexe »
Elle explique que dans ces centres de détention, et en particulier le centre 215 de la sécurité militaire, à Damas, rebaptisé le « centre de la mort », « le viol était partout. Dans les actes, dans les menaces, dans les discours. C’était le maître mot. » Les soldats et les gardiens savent que dans la société traditionnelle syrienne, quand une femme est violée, c’est toute la famille, voire la communauté, qui sont déshonorées.
Quand elle est arrivée en 2011 au centre 215, elle a été interrogée, nue, pendant des jours, battue à coups de matraque électrique et « plongée des jours dans un bassin d’eau souillée dans laquelle on m’enfonçait la tête pour me forcer à répondre à leurs questions ». Très vite, elle a été violée : « Un jeune soldat m’a enfoncé les doigts dans le sexe. J’ai hurlé : ‘Je pourrais être ta mère !' ».
« J’ai vu mourir devant moi une jeune fille, bras et jambes écartelés »
Et elle a assisté à des viols au quotidien : « Les viols par cinq ou dix hommes, qui déchiraient les femmes en criant : ‘Ton frère ou ton mari s’est révolté contre le régime ? Ils veulent la liberté ? Eh bien voilà ce qu’on leur répond ! Tiens ! Tiens ! Violée, tu ne vaux plus rien ! Voilà ce que récoltent les salauds !' » Ses descriptions des sévices inhumains subis par les femmes dans les prison syriennes sont difficilement soutenables. Selon elle, les Kurdes, les chrétiennes et les Alaouites ont enduré « un acharnement particulier » :
« J’ai vu mourir devant moi une jeune fille, bras et jambes écartelés, ficelés à des chaises qu’une dizaine d’hommes ont massacrée. »
Conséquemment à ces tortures, des femmes tombent enceinte et doivent accoucher dans les prisons, « dans la crasse, les poux, les infections, à même le sol ». Mais souvent, comme il s’agit pour elles du comble du déshonneur, elles tentent de se faire avorter :
« J’ai vu des femmes essayer d’avorter et mourir d’hémorragie. »
Un documentaire à venir sur France 2
Les soldats leur arrachaient au début les bébés. Mais ils leur ont ensuite permis de les garder quelques mois. « Mais les mères finissaient par s’attacher au bébé. Jusqu’au jour où, sans prévenir, on le leur arrachait. Elles hurlaient de douleur et imploraient la mort », raconte Hasna Al-Hariri.
Ce témoignage accablant paraît juste avant la diffusion sur France 2 ce 7 décembre d’un documentaire, Syrie, le cri étouffé, réalisé par Manon Loizeau et coécrit avec Annick Cojean, avec l’aide de Souad Wheidi. Il révèle l’enfer de ces femmes « doublement victimes » : du régime, et de leurs familles prêtes à les tuer à leur retour.
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