Dernier test électoral avant la présidentielle, les élections cantonales de mars mobilisent peu. Petite balade sur un marché du Raincy.
Le Raincy, Seine-Saint-Denis. 10 heures. Entre les quatre stands du mignon-petit-marché à côté de la mairie, quelques Raincéens gelés bravent un froid de gueux. Une vingtaine de militants UMP, écharpe bleu au cou, les encerclent aux points stratégiques : à gauche, à droite et à l’entrée de la supérette bio juste en face.
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« Ils sont venus en force, ils sont nerveux », ironise un des militants du PS, moins nombreux. « Les gens ne connaissent pas les cantonales », justifie Luc Le Callet en tendant un tract Ludovic Toro, candidat UMP sortant. Face à lui : le socialiste Claude Dilain, maire de Clichy-sous-Bois.
« Là, c’est Clichy, ils prennent nos tracts »
A gauche comme à droite, on craint une forte abstention les 20 et 27 mars. Ces cantonales ne sont pas couplées avec un scrutin plus mobilisateur, comme les municipales. « Ça vous intéresse les cantonales ? » Ce matin au Raincy, sur l’échelle de l’excitation électorale ça donne à peu près ça : aucune pour les 18-30 ans, un frétillement chez les 30-55 et un réflexe de vote pavlovien et républicain pour les plus de 55.
Devant le bio, deux militants UMP tendent mollement des tracts. Le moustachu à casquette pointe un doigt en direction d’un homme noir qui remonte le boulevard menant à la commune voisine : « Voilà, là, c’est Clichy, ils prennent nos tracts, ça se passe bien. » Le canton rassemble la commune la plus riche du 9-3, Le Raincy donc et ses 37 750 euros de revenu par foyer en 2008 (19 749 en Seine-Saint-Denis), et une des plus pauvres de France, Clichy-sous-Bois.
« Marine à 23% ? » Eric Raoult, le maire du Raincy, relativise : « Il n’y a pas DSK dans ce sondage, mais si le FN monte c’est à cause des événements en Egypte, en Tunisie et en Libye. » Pour les cantonales, il est inquiet pour les cantons sans candidat UMP sortant. « Là où ils ne sont connus que sur l’étiquette, on aura plus de mal à endiguer la montée du FN. »
Pourtant, pour l’affable Ludovic Toro, ce n’est pas gagné. En 2004, le conseiller général a remporté son siège à 240 voix près. A deux semaines des élections, les mauvais sondages de Sarkozy et les couacs gouvernementaux tombent mal. La droite est sous pression : cette élection est le dernier test électoral avant la présidentielle de 2012.
« Claude Bartolone (président socialiste du conseil général – ndlr) essaie de nationaliser l’élection, se désole Ludovic Toro. Notre travail à nous est de dire que c’est un enjeu local, de recentrer sur des problèmes concrets. »
Les Raincéens ne cachent pas leur exaspération
Les militants UMP concèdent que le contexte n’est pas favorable. « A chaque élection, on sanctionne toujours le pouvoir en place », s’agace Raphaël Laurois.
Du côté de l’équipe Dilain, on se défend de ramener l’élection au contexte national. « On le fera peut-être à la fin pour donner un dernier coup de fouet si nécessaire », précise Olivier Klein, premier adjoint de Dilain.
Chez les Raincéens, on dit faire la différence entre enjeux locaux et nationaux, mais on ne cache pas son exaspération. Pour Roland, 65 ans, « Sarkozy a le courage de gérer la France en chef d’entreprise, d’appeler une racaille une racaille, mais on ne peut pas dire ‘casse toi pauv’ con’, avoir ce style bling-bling. » Plus loin, un couple du même âge n’est pas d’accord. L’homme : « J’ai voté pour ses réformes, mais je ne supporte pas l’homme, au moins Juppé a un français correct, il a fait l’ENA. » La femme : « Tu es un puriste, ce qui compte c’est les actes. » Sur l’islam ? Lui : « Ils mettent de l’huile sur le feu, ces questions doivent rester privées. » Elle : « C’est nécessaire, il faut que les choses soient dites. »
Une dame âgée se saisit d’un tract. « Je suis déçue pour les retraites, je ne touche que 900 euros. J’ai voté Sarkozy, mais aux cantonales je vais bien réfléchir. »
Anne Laffeter
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