Emmanuel Macron a tenu un grand meeting à Paris le 1er mai. Alors qu’il vient de passer sous la barre des 60 % d’intentions de vote pour le second tour selon un sondage, il s’est appliqué à viser frontalement sa rivale Marine Le Pen.
Après un début de campagne d’entre-deux tours poussif, Emmanuel Macron a sorti les gants de boxe. Lundi 1er mai, pour son dernier grand meeting de campagne du second tour, le candidat d’En marche! a attaqué à plusieurs reprises sa rivale, qui l’avait précédé dans la matinée, dans un grand meeting à Villepinte. « Le FN, c’est le parti de l’anti-France », a-t-il prévenu. Pour Emmanuel Macron, l’enjeu dépasse le simple quinquennat à venir :
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« Le 7 mai se décideront les prochaines décennies de notre pays, pas seulement les cinq prochaines années. Nous devons tirer deux leçons du scrutin du 23 avril : les Français veulent l’espoir et l’optimisme, c’est pour cela qu’ils nous ont placés en tête. La seconde, tout aussi importante, c’est que les Français ont de la colère, ils veulent changer le cours des choses. Beaucoup ont le sentiment de vivre moins bien qu’avant.”
"Madame Le Pen a parfaitement résumé la situation ce midi avec sa grossièreté bien connue." 1/2 #MacronLaVillette
— Julien Rebucci (@julienrbcc) May 1, 2017
"Elle a dit : 'C'est En Marche! ou crève.' Elle a raison, En Marche, c'est nous !" 2/2 #MacronLaVillette
— Julien Rebucci (@julienrbcc) May 1, 2017
Devant plus de 12 000 personnes selon son équipe, Emmanuel Macron a pris un soin tout particulier à marquer sa différence avec la candidate d’extrême droite : « Ce qui se joue, ce n’est pas seulement l’avenir d’un camp quel qu’il soit mais l’avenir d’un peuple, d’une société, de notre vivre ensemble. »
Plusieurs personnalités politiques ont fait le déplacement au premier rang, parmi lesquelles Ségolène Royal, Jean-Yves Le Drian, François Bayrou, Bertrand Delanoë, Corinne Le Page ou encore Marielle de Sarnez. Ce qui n’empêche pas M. Macron d’envoyer ce message aux soutiens tardifs : “Ma responsabilité, c’est d’aller au bout de cette page que les Français ont voulu tourner dimanche dernier.”
Macron sous la barre des 60 %
Dans un sondage Ifop-Fiducial paru le jour-même pour Paris Match, CNews et Sud-Radio, Emmanuel Macron n’est plus crédité que de 59 % (– 1 %) des votes, dimanche 7 mai. Pour l’ancien ministre de l’Economie, le temps presse autant que la menace pèse :
« Je ne jugerai jamais un électeur du FN, un Français qui vote pour ce parti, parce qu’il y a toujours une colère, un désenchantement derrière ce vote. Je combattrai jusqu’à mon dernier souffle le FN car il ne mérite pas votre colère. Je sais que beaucoup voteront pour moi, dimanche 7 mai, uniquement pour ne pas avoir le FN au pouvoir. C’est le propre d’un second tour démocratique. Je veux leur dire mon respect et le fait que j’ai pleinement conscience, que, le 7 mai, je ferai plus que défendre un projet politique. Je porte aussi avec vous tous le combat pour la République et la démocratie libre. »
Son discours d’un peu plus d’une heure et demie s’est articulé autour de deux notions fondamentales pour voir naître la « République nouvelle » : la « résistance » et la « renaissance ». La résistance, c’est avant tout celle face à la montée de l’extrême droite. A cet égard, il s’est appliqué à frapper fort et dur Marine Le Pen, qualifiée d’« héritière » de FN de Jean-Marie Le Pen. Notamment sur le domaine économique, un avant-goût probable de ce qui attend les spectateurs du 3 mai, lors du grand débat d’entre-deux tours à la télévision :
« Ils ne cherchent pas à convaincre, à guérir le mal. Ils cherchent à exploiter la colère, à en vivre. Ils s’en nourrissent depuis tant et tant d’années. Ils vivent de nos divisions, de nos inefficacités et des peurs. Mais le projet de l’extrême droite, c’est encore plus que cela. C’est aussi la lutte contre la liberté de la presse, contre la liberté des femmes, contre le droit des couples de même sexe. C’est le silence assourdissant de son héritière [en réaction aux propos de Jean-Marie Le Pen sur l’hommage rendu par son compagnon au policier Xavier Jugelé, ndlr], c’est cela le FN. Le projet de l’extrême droite, c’est la violence extrême contre les opposants politiques. »
En réponse à @MLP_officiel, @EmmanuelMacron étrille à son tour le programme de son adversaire #discriminations #homophobie #Villette pic.twitter.com/KqNFzbFU2j
— LCP (@LCP) 1 mai 2017
Il répond « non » à Jean-Luc Mélenchon
Dans une délicate position d’équilibriste, entre une ouverture au « front républicain », sans renier son programme, il a répondu à Jean-Luc Mélenchon – non sans une pique au passage. Le leader de la France insoumise lui a demandé, en fin de semaine dernière, de renoncer à son projet de réforme du Code du travail :
« J’ai entendu les appels à changer le programme. C’est légitime, certains l’ont fait. Je ne le ferai pas pour deux raisons : la première, c’est que les Français se sont exprimés. Je ne vais pas les trahir. La seconde c’est que je veux pouvoir agir demain et être efficace. Nous avons conçu et porté ces réformes, nous les ferons. Ces changements répondent à la colère des Français. Ils sont la condition pour que dans cinq ans nous n’ayons pas le FN à nouveau, plus fort et plus haut. »
Après la résistance, il a développé quelques axes de la renaissance qu’il veut appliquer à la France. Il a ainsi promis un « renouvellement démocratique » avec la mixité pour les investitures aux législatives et une parité pour les personnes issues de la société civile. Il veut d’ailleurs donner plus de voix aux représentants associations et d’ONG en les faisant entrer au Cese (Conseil économique, social et environnemental).
Réforme de la retraite
Emmanuel Macron a évoqué une “République contractuelle qui conjugue enfin liberté et protection”. Un projet basé sur l’école, le travail et la place accordée à l’apprentissage et la formation continue, jusqu’à la réforme des retraites pour aboutir à un « régime unique juste et transparent ». Pour marquer sa différence avec le Front national, il a aussi insisté sur la place de la culture au cœur de son programme. Il a pour cela cité l’un de ses mentors, le philosophe Paul Ricœur : « Mon autorité me vient de ce que j’ai lu plus de livres”.
Il a longuement évoqué les travailleurs, les agriculteurs qui ont rejoint massivement le corps électoral de Marine Le Pen. « Leurs promesses sont des mensonges », a-t-il mis en garde. Mais aussi les couples de même sexe : « Je protégerai toutes les familles sur tout ce qui a été fait pour elles durant ce quinquennat. Deux hommes qui s’aiment et qui ont des enfants, c’est aussi une famille. Deux femmes qui s’aiment et qui ont des enfants, c’est aussi une famille. Ça n’enlève rien à ceux qui n’aiment pas cette idée, c’est leur droit enfin reconnu. » Il s’est toutefois prononcé contre la GPA.
Avant de conclure, il a souhaité saluer les forces de l’ordre après les affrontements venus égrener cette journée de forte mobilisation syndicale à Paris et dans le reste de la France. Puis il a rappelé aux personnes venues l’écouter :
« Le choix qui sera le vôtre, le nôtre, le 7 mai prochain, sera un choix pour l’Europe, le monde et pas seulement pour la France. Il nous faut préserver et défendre, dans la patrie des Lumières, les droits de chacun, la liberté de tous. La bataille sera dure et violente. C’est maintenant que se joue l’héritage intellectuel, politique et moral de la république française. Mais aussi l’avenir d’une Europe unie et maîtresse de son destin ; d’un monde dont nous aurons décidé d’être les acteurs. »
Avant d’entonner une Marseillaise, les yeux fermés, il a déclaré : « Soyons fiers d’être français, fiers d’être européens. Sachons aussi être dignes d’être français, c’est cela le 7 mai prochain. »
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