Plus rare au cinéma, Emmanuelle Béart revient sur sa passion du théâtre de Stanislas Nordey et des “enfants de Claude Régy” dans l’émission d’été de France Culture, “Quand le théâtre crève l’écran”.
Après Olivier Assayas, Benoît Jacquot, Yasmina Reza et Noël Herpe, c’est au tour d’Emmanuelle Béart d’évoquer au fil d’une dense conversation avec Judith Sibony son double rapport au théâtre et au cinéma. Sans opposer absolument l’un à l’autre, il s’agit ici de tenter de définir les règles qui distinguent deux types de jeu, ajustés aux espaces dans lesquels ils se déploient. Très intense au micro, comme si elle était sur une scène, Emmanuelle Béart rappelle qu’elle s’est pleinement engagée depuis quatre ans dans l’aventure théâtrale, aux côtés de Stanislas Nordey.
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Après avoir commencé, très jeune, auprès de metteurs en scène plus académiques comme Bernard Murat, Jean-Pierre Vincent ou Luc Bondy, elle s’est trouvé une nouvelle famille avec Nordey mais aussi Pascal Rambert et Arthur Nauzyciel, “les enfants de Claude Régy”… Elle confie qu’à travers le travail avec eux, elle a découvert la “monstruosité qui est en nous”. Si le théâtre reste une “aventure physique, chimique”, centrée en particulier sur la voix, il est devenu pour elle une “aventure de la pensée” qui l’oblige à “être là et nulle part ailleurs”.
Attachée à l’esprit de troupe
Alors que “le statut de vedette de cinéma isole”, le théâtre rassemble parce qu’il n’y a rien de plus “vivant”, selon elle. Attachée à l’esprit de troupe, elle vante le théâtre “frontal” de Nordey, où aucune échappatoire n’est possible, où l’engagement du corps est total, où il s’agit de “dire les mots de l’auteur jusqu’à épuisement de sa langue”.
Tandis que Judith Sibony lui fait écouter les voix de figures légendaires du théâtre, comme Louis Jouvet, Gérard Philipe, Jean-Louis Barrault, Patrice Chéreau, Emmanuelle Béart cible ses mots, précis, vifs, tranchés, même si elle perd parfois le fil de ses pensées, prises dans le plaisir d’une conversation flottante. Les souvenirs affleurent, surtout ceux de la scène – “je me souviens de chaque seconde du théâtre” –, pas ceux des films – “j’ai l’amnésie du cinéma”.
La sincérité de sa confession la conduit à une révélation saisissante de la part d’une actrice qui perçoit dans le cinéma “quelque chose de morbide”, alors qu’au théâtre “tous les sens restent en éveil”. Le dernier volet de cette série sera consacré le dimanche 30 août à Arnaud Desplechin, lui aussi impliqué au plus près dans cette tension dialectique entre théâtre et écran.
Quand le théâtre crève l’écran : avec Emmanuelle Béart émission de Judith Sibony, dimanche 23, 19 h, France Culture
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