Le président américain a publié dans la nuit son classement des « pires fakes news » de 2017. Une nouvelle attaque contre les médias de la part d’un président entrée en guerre contres les journalistes, qu’il qualifie « d’ennemis du peuple ».
« And the FAKE NEWS winners are…« . Postée à 20h sur le compte Twitter de l’actuel président des États-Unis, l’annonce était accompagnée d’un lien, vers le site officiel du parti républicain. A l’arrivée, le classement des pires « fakes news », soit « fausses informations » publiées dans les médias américains en 2017.
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And the FAKE NEWS winners are…https://t.co/59G6x2f7fD
— Donald J. Trump (@realDonaldTrump) 18 janvier 2018
« 2017 a été une année de partis pris continuels, de couverture médiatique injuste et même de fausses informations éhontées« , peut-on y lire en guise d’introduction, suivi de la mention d’une étude (non citée) selon laquelle 90% de la couverture médiatique touchant au Président Trump serait négative. C’est dans l’optique de rectifier ce déséquilibre que Donald Trump a décidé de procédé à cette remise de prix ironique, baptisée Fake News Awards.
« You are Fake News! »
Annoncé par Donald Trump, ce classement des plus grosses « intox » publiées par les médias américains durant l’année 2017 n’est qu’un énième coup de canif dans les relations qu’entretient la Maison Blanche avec les principaux médias. Dès le début de sa campagne, le président qui tweete plus vite qu’il ne pense a en effet pris l’habitude de mettre en cause publiquement les médias, qu’il accuse d’être partisans.
Une offensive qui s’est accéléré après sa prise de fonction : en février, il a qualifié la presse « d’ennemi du peuple ». Régulièrement, il prend à parti les chaines de télévisions et journaux américains, les accusant de propager des « fakes news », selon l’expression désormais consacrée.
CNN en tête
Sans surprise, on retrouve en tête du classement la chaine CNN, bête noire de POTUS, citée quatre fois. Le New York Times, est mentionné deux fois, Time, ABC, le Washington Post et Newsweek une fois chacun.
CNN’S slogan is CNN, THE MOST TRUSTED NAME IN NEWS. Everyone knows this is not true, that this could, in fact, be a fraud on the American Public. There are many outlets that are far more trusted than Fake News CNN. Their slogan should be CNN, THE LEAST TRUSTED NAME IN NEWS!
— Donald J. Trump (@realDonaldTrump) 9 décembre 2017
Le président des États-Unis répertorie en tout onze erreurs commises par les médias américains en 2017. Premier visé, Paul Krugman, qui n’est pas journaliste mais chroniqueur et Prix Nobel d’économie. Dans le New York Times, il avait diagnostiqué après la victoire de Donald Trump des répercussions économiques très négatives. Ensuite des affaires massives comme des buzz passagers sont évoqués pèle-mêle : les liens de Donald Trump avec la Russie (cités trois fois), l’affaire WikiLeaks, la dissimulation supposée d’un rapport accablant sur le climat par l’administration du président, mais aussi la rumeur selon laquelle le président aurait déplacé le buste de Martin Luther King présent dans la Maison Blanche, et différentes séquences vidéos montrant Donald Trump en visite officielle, en meeting ou encore nourrissant des poissons.
L’énumération est rapide, une phrase seulement, ne contextualise pas les faits et n’inclue pas de liens hypertexte vers les articles incriminés. Le président énumère ensuite dix mesures de son gouvernement, dont il estime qu’elles ont été des succès tus par les médias, comme la création de 2 millions d’emplois ou la baisse historique des impôts, la plus importante depuis Reagan.
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Droit à l’erreur
Si l’on s’intéresse à la liste des « fake news » rapportées par le président, il est intéressant de constater que la plupart de ces fausses informations ont depuis été corrigées par les médias concernés, voire ont été accompagnées de sanctions envers les journalistes concernés de la part de leur hiérarchie, comme dans le cas de Brian Ross, journaliste de la chaine ABC, qui a été suspendu puis a été changé de poste après avoir diffusé des informations erronées sur les relations entretenues par Trump et son ancien conseiller Michael Flynn avec la Russie.
Cette stigmatisation directe des journalistes et de leur travail a été critiquée au sein même du parti républicain, par les deux sénateurs de l’Arizona, Jeff Flake et John McCain, qui prennent régulièrement position contre l’actuel président. Dans une tribune publiée dans le Washington Post John McCain a ainsi remarqué que « L’expression “fake news” à laquelle le président américain a donné une légitimité, est utilisée par des autocrates pour réduire au silence des journalistes« .
Good job Donald !
Ce listing des « mauvais » journalistes arrive au moment même où est menée aux États-Unis une mission d’enquête exceptionnelle, menée par le Comité pour la protection des journalistes (CPJ) et l’IFEX, défendant la liberté d’expression.
Dans le même temps, l’association Reporters sans frontière, qui participe également de cette enquête, a lancé une campagne au ton très ironique pour dénoncer les dangers de l’attitude hostile du président américain à l’égard des médias. Elle met en scène différents dirigeants, connus pour être des « prédateurs de la presse« , félicitant Donald Trump pour « ses efforts et sa créativité pour bafouer la liberté d’information et dénigrer les journalistes ».
Dans un communiqué, Christophe Deloire, secrétaire général de RSF déclare :
« Cette campagne rappelle, sur le ton de l’humour, que les pratiques du président américain ne sont pas dignes du pays du 1er amendement. Les agissements de Donald Trump entraînent petit à petit les Etats-Unis vers un climat anti-journaliste digne des pires pays pour la liberté de la presse, alors même qu’il a fait le serment, lors de son entrée en fonction, de la protéger et de la défendre« .
Depuis la prise de fonction du président américain, les États-Unis ont perdu deux places dans le classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF, passant de la 45e à la 43e place. Une chute qui devrait se poursuivre lors du prochain classement. Dans l’attente des « Freedom of the press Awards »…
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