Sénatrice, maire de Montreuil. Elle parle des interventions musclées de la police dans sa ville, de l’exercice du pouvoir de Sarkozy et de la polémique Orelsan.
Vous avez dénoncé la façon dont les forces de l’ordre sont intervenues dans votre ville : un jeune homme touché par un flashball a perdu un oeil le 8 juillet, et une manifestation a été violemment interrompue le 13 juillet. Cela s’inscrit- il dans une dérive policière plus globale ?
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Il n’y a pas de réflexion qui permette d’établir la liste des incidents ou accidents qui rythment l’activité de la police. Il y a quelques années, l’historien Maurice Rajsfus avait fait ce travail pour essayer de montrer que ça faisait système. On a eu ensuite l’impression, pendant les années de gauche du gouvernement, que des efforts étaient faits pour restaurer les liens de confiance entre la population et la police. Depuis quelques années, il semble qu’un autre message soit transmis, comme le montrait le rapport d’Amnesty International (France. Des policiers au-dessus des lois, avril 2009 – ndlr).
Un journaliste a passé la nuit au poste, un photographe a été arrêté…
Je le regrette. Mais cela a permis de montrer que les policiers, contrairement à ce qu’ils ont dit, n’ont pas procédé à l’interpellation de gens qui “mettaient en péril l’ordre public”. Ils ont fait un package et pris au hasard les gens des premiers rangs. J’ai vu les images sur LCI : on voit très distinctement le commissaire de police bousculer un élu qui était là dans le but d’inviter au calme. J’ai trouvé ça choquant.
Pendant ce temps-là, à la télé, on pouvait voir un concert organisé par Nicolas Sarkozy, un documentaire à sa gloire, une interview par Michel Drucker. Vous trouvez qu’il y a deux poids deux mesures ?
Ne me faites pas dire ça. Si le “turbo-président”, qui se trouve des journalistes pour faire des émissions à sa gloire, faisait son job, pourquoi pas. Mais il se trouve que, pendant qu’on dit “la police aura un comportement exemplaire”, c’est le contraire qui se passe sur le terrain. L’ordre d’intervenir contre cette manifestation est venu d’en haut. Ce n’est pas le commissaire de police local qui a décidé. Est-ce que l’ordre venait du préfet ou d’au-dessus ? Je n’en sais rien. Mais on voit bien l’astuce : c’est retourner la charge de la preuve, et pointer du doigt les villes de gauche.
Quand on voit, dans la polémique Orelsan, une femme de gauche telle que Ségolène Royal qui s’oppose à ce qu’un artiste fasse une prestation publique et de l’autre côté un ministre comme Frédéric Mitterrand qui éteint l’incendie, les repères sont un peu brouillés, non ?
Les Verts ont relayé la mobilisation contre les paroles de cette chanson. Mais, jusqu’à preuve du contraire, il ne la chante plus. Il a pris conscience qu’elle pouvait être interprétée au premier degré par des types bas de plafond. On ne considère pas ça juste d’empêcher Orelsan de chanter. Un élu a le droit de choisir de subventionner ou pas des événements qui se déroulent dans sa collectivité, ce n’est pas toujours de la censure. Mais, si l’on dit “je ne subventionne pas parce que tel artiste vient”, ça devient plus compliqué. La liberté de programmation des festivals, c’est fondamental.
Que pensez-vous de la proposition de Xavier Darcos de mettre 40 % de femmes à la tête des grandes entreprises ?
C’est anecdotique, ça concerne les boîtes privées. Ils vont faire des nominations bidons pour arriver à 40 % dans l’organigramme. Il y a tout un tas de mesures à prendre pour favoriser la promotion des femmes. Darcos est dans un parti qui ne présentera pas 40 % de femmes aux régionales l’année prochaine. Ça fait partie des non-solutions à un vrai problème pour lequel, au lieu de sortir de nouvelles idées, il faut utiliser ce qui marche. Le jour où il y aura 50 % de femmes à l’Assemblée et au Sénat, on en reparlera.
Propos recueillis par Géraldine Sarratia et Pierre Siankowski
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