Sur le grill cette semaine, une retrospective autour du débat sans fin provoqué par la fourrure. Parce que les pelages soyeux ont inévitablement (re)pointé le bout de leur museau en ces semaines de fashion week masculine hivernale, chez Marni, Dsquared2 ou Fendi. Flashback. Paris, 2003. Défilé Jean-Paul Gaultier. Une militante de la Peta jaillit du […]
Sur le grill cette semaine, une retrospective autour du débat sans fin provoqué par la fourrure. Parce que les pelages soyeux ont inévitablement (re)pointé le bout de leur museau en ces semaines de fashion week masculine hivernale, chez Marni, Dsquared2 ou Fendi.
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Flashback. Paris, 2003. Défilé Jean-Paul Gaultier. Une militante de la Peta jaillit du premier rang et saute sur le podium en brandissant une pancarte « la fourrure tue » à la main. Les vigiles lui sautent dessus en l’enroulant dans d’énormes peaux de bêtes. Sourire en coin des malabars, Jean-Paul Gaultier ravi de son effet se gausse en fin de défilé au micro de Canal. La mode entretient avec les militants anti-fourrure une relation tumultueuse depuis les années 80. Avant de revenir sur ce beau bordel, un petit point fourrure.
La fourrure s’est le plus naturellement du monde retrouvée sur le dos et le cul des premiers hommes il y a près de 60 000 ans. Si pour les Inuits, la fourrure est restée le seul moyen de survivre sans se transformer en glaçon, elle est rapidement devenue un attribut d’apparat rare et cher dans les sociétés aristocratiques européennes. Un signe extérieur de richesse, qui jusqu’à aujourd’hui, marque la différence avec le petit peuple.
Brigitte Bardot en France et la Peta (People for the Ethical Treatment of Animal) partent en guerre contre la fourrure au début des années 1980. La cible principale est l’industrie du luxe et de la mode, dans lesquels la fourrure est un grand classique des collections hivernales. Le message, limpide : porter de la fourrure, c’est cautionner les mauvais traitements que les éleveurs ou les trappeurs infligent aux animaux, notamment le dépeçage vivant qu’impose la conservation des peaux. La méthode est simple, s’emparer des méthodes de l’activisme politique et des codes de la publicité pour foutre la honte à la mode. Grandes campagnes, images choc et actions coup de poing émaillent ainsi les années 1980 et 1990. Ils s’assurent le soutien de stars comme Paul McCartney, Kim Basinger, Alec Baldwin, et des supermodels de l’époque Cindy Crawford, Christy Turlington, Naomi Campbell, qui posent à poil avec le slogan « je préfère être nue que porter de la fourrure ».
Sous l’impulsion de la teigne Dan Mathews, les loustics de la Peta forcent dans les 90’s les portes des bureaux d’institutions comme Calvin Klein ou Vogue pour confronter les décideurs aux images, et parviennent à obtenir quelques succès. Calvin Klein fait une croix sur la fourrure. Les happenings pendant les fashion weeks sont alors la cerise sur le gateau pour interpeller les designers, le microcosme de la mode et les médias venus couvrir l’évènement. Rares sont les semaine de la mode qui passent depuis au travers des actions des anti-fourrures de Peta, Animavie, la fondation Brigitte Bardot ou encore Greenpeace.
Mais paradoxalement, le débat a peu a peu perdu de sa vigueur et la pression qu’ont pu ressentir à une époque les marques de luxe autour de cette question s’est affaiblie. Rares sont les designers à emboiter le pas de Stella McCartney et de ses sapes 100% animaux doux-friendly. Entre les ventes et l’élevage à l’échelle mondiale, la Fédé Internationale de la Fourrure estime que le biz de la fourrure pèse plus de 40 milliards de dollars, soit grosso modo l’équivalent des recettes de la vente illégale de marijuana aux Etats-Unis en 2014. La mode est une vieille dame parfois difficile à faire évoluer.
Par Gino Delmas & Al Polletino
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