Près de 300 personnalités signent un « manifeste contre le nouvel antisémitisme » en France, dénonçant un « silence médiatique » et une « épuration ethnique à bas bruit » dans certains quartiers
Rédigé par l’ancien directeur de Charlie Hebdo, Philippe Val, trois cents personnalités ont signé un manifeste publié dans Le Parisien de dimanche ce 21 avril, « contre le nouvel antisémitisme » en France marqué par la « radicalisation islamiste » et dénoncent un « silence médiatique » ainsi qu’une « épuration ethnique à bas bruit » présente, selon eux dans certains quartiers.
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« Nous demandons que la lutte contre cette faillite démocratique qu’est l’antisémitisme devienne cause nationale avant qu’il ne soit trop tard. Avant que la France ne soit plus la France », interpellent plusieurs personnalités politiques de tout bord (Nicolas Sarkozy, Laurent Wauquiez, Manuel Valls, Bertrand Delanoë, Aurore Bergé…), ainsi que plusieurs artistes (Joan Sfar, Charles Aznavour, Gérard Depardieu, Françoise Hardy…), et des intellectuels (Alain Finkielkraut, Yann Moix…).
« Les Français juifs ont 25 fois plus de risques d’être agressés »
« L’antisémitisme n’est pas l’affaire des Juifs, c’est l’affaire de tous », insiste le texte en rappelant que « dans notre histoire récente, onze Juifs viennent d’être assassinés – et certains torturés – parce que Juifs par des islamistes radicaux ». Parmi eux, Ilan Halimi tué en 2006, ainsi que les victimes de Mohamed Merah dans une école juive de Toulouse, en 2012, et celles de l’attaque de l’Hyper Cacher en 2015. Mais aussi deux affaires pas encore jugées et dont le caractère antisémite n’est, de fait, pas avéré : les assassinats de Sarah Halimi, défenestrée à Paris l’année dernière, et de Mireille Knoll, dans son appartement le 23 mars dernier.
« Les Français juifs ont 25 fois plus de risques d’être agressés que leurs concitoyens musulmans », écrivent les signataires. « Dix pour cent des citoyens juifs d’Ile de France – c’est-à-dire environ 50 000 personnes – ont récemment été contraints de déménager parce qu’ils n’étaient plus en sécurité dans certaines cités et parce que leurs enfants ne pouvaient plus fréquenter l’école de la République. Il s’agit d’une épuration ethnique à bas bruit au pays d’Emile Zola et de Clemenceau », insistent-il.
Le texte souligne que « la radicalisation islamiste – et l’antisémitisme qu’elles véhiculent – est considérée exclusivement par une partie des élites françaises comme l’expression d’une révolte sociale ». Et dénonce un « vieil antisémitisme de l’extrême droite » auquel « s’ajoute l’antisémitisme d’une partie de la gauche radicale qui a trouvé dans l’antisionisme l’alibi pour transformer les bourreaux des juifs en victimes de la société ».
Dénonçant un « nouvel antisémitisme » qui prendrait corps dans les quartiers populaires face à la montée d’un islam identitaire, le manifeste demande « que les versets du Coran appelant au meurtre et au châtiment des juifs, des chrétiens et des incroyants soient frappés de caducité par les autorités théologiques, comme le furent les incohérence de la Bible et l’antisémitisme catholique aboli par (le concile) Vatican II, afin qu’aucun croyant ne puisse s’appuyer sur un texte sacré pour commettre un crime ».
Une « mise en accusation des musulmans »
Le texte a alors déclenché de vives réactions. Sur Slate, le journaliste Claude Askolovitch parle d’un texte « glaçant pour la vérité dont il émane comme pour les mensonges qu’il induit » :
« Il est terrifiant pour ce qu’il rappelle de la vie et de la mort des juifs, ici, depuis le début du siècle ; et horrible pour ce qu’il nourrit : une mise en accusation des musulmans de ce pays réputés étrangers à une véritable identité française, sauf à renoncer à leur dignité. »
Pour Tareq Oubrou, le recteur de la grande mosquée de Bordeaux, interrogé par Francetvinfo, »attribuer l’antisémitisme à l’islam est presque un blasphème« . « Dans la tribune, il est stipulé clairement que le Coran « appelle au meurtre des juifs et des chrétiens » : c’est une erreur monumentale, et d’une violence inouïe. Le Coran n’appelle pas au meurtre ; il appelle au combat des gens qui sont hostiles« , explique-t-il. « Attribuer l’antisémitisme à une « génétique coranique » quelconque est une erreur intellectuelle monumentale », insiste Tareq Oubrou.
Invité de BFM TV, Philippe Poutou, porte-parole du NPA s’est dit « en désaccord avec cette tribune ». « Il y a un racisme à tous les niveaux qu’il faut combattre », a-t-il martelé.
Selon les données du ministère de l’Intérieur, les actes antisémites ont enregistré un léger repli en 2017 (-7%), pour la troisième année consécutive. Mais les faits les plus graves (violences, incendies, tentatives d’homicides…) ont eux augmenté de 26%. Un ouvrage collectif intitulé « Le nouvel antisémitisme en France », paraitra ce mercredi 25 avril, rassemblant les écrits de plusieurs personnalités dont Philippe Vall, ou encore Luc Ferry.
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