La Cendrillon des temps modernes est prête à tout pour rentrer dans ses Louboutin, même à se faire raboter les orteils. La “procédure Cendrillon”, c’est le nom que porte l’opération qui vise à faire rentrer les pieds récalcitrants dans les plus belles chaussures de marques, en rapprochant un os par-ci et en coupant un bout […]
La Cendrillon des temps modernes est prête à tout pour rentrer dans ses Louboutin, même à se faire raboter les orteils.
La « procédure Cendrillon », c’est le nom que porte l’opération qui vise à faire rentrer les pieds récalcitrants dans les plus belles chaussures de marques, en rapprochant un os par-ci et en coupant un bout d’orteil par-là.
D’après le Wall Street Journal, la mode aurait commencé à éclore aux Etats-Unis en 1998, avec l’apparition de la série Sex & The City et de ses héroïnes férues de chaussures de style. Depuis, plusieurs podologues se sont spécialisés dans la procédure, qui n’a rien d’un conte de fées. Le Docteur Olivier Zong, par exemple, a même imaginé une myriade de termes pour rendre le processus plus attractif : « Hitchhiker’s Toe », ou l’orteil qu’il faut retailler pour rentrer dans des Hitchhiker, le « High Heel Foot », quand il s’agit de modeler le pied pour des talons aiguille, ou encore « Toebesity » l’obésité de l’orteil.
Parmi les médecins américains en pointe sur la pratique, on compte le Dr Ali Sadrieh, qui, dans le Wall Street Journal, présente son métier comme un acte de bienfaisance publique : « C’est irréaliste de demander aux femmes de ne pas porter de hauts talons. Je propose des procédures qui permettent aux femmes d’évoluer, sans douleurs, dans le monde réel. » Dans le New York Times, il ajoute : « J’ai remarqué que [les femmes] ont besoin de ces chaussures pour avoir confiance en elles, elles font partie de leur peau. » Un acte de charité qui lui rapporte tout de même entre 500$ et 1800$ la procédure.
Le problème, c’est que ce sont ces mêmes chaussures à talons hauts qui sont la cause des problèmes dont souffrent ses patientes. Sur le site de la Clinique du pied, située à Paris, on peut lire que 95% des patients qui souffrent du Hallux Valgus, le fameux « oignon », sont des femmes, car « la chaussure féminine à bout pointu et à talon haut surcharge et comprime les orteils ».
Certains podologues ne voient pas ces opérations du pied d’un bon œil. Dans le New York Times, le Dr Jonathan T. Deland en montre les excès : « Si on ne fait que parler de talons de 10 centimètres qui provoquent des douleurs, alors qu’elles peuvent porter des talons de 6 centimètres, alors ce n’est probablement pas une bonne raison de pratiquer une opération. »
Il faut dire que les conséquences d’une telle opération peuvent être très graves. Debra Jaliman, une dermatologue de Manhattan, raconte ses mésaventures au Wall Street Journal : « Je n’aurais jamais dû me faire opérer les pieds. Maintenant, mes pieds me font mal en permanence, je ne peux plus porter de talons hauts, ni jouer au tennis. Ça a vraiment eu un impact sur ma vie. Ça m’a terriblement limitée. »
Dans le conte de fées, ce sont les deux belles-soeurs de Cendrillon qui se font mal pour rentrer dans la pantoufle de vair. Pas vraiment le modèle rêvé pour les opérées américaines.
Caroline Debray