[Mise à jour du 5 mai 2015] Le réseau social est en train de discuter avec des sites d’information américains à grande audience (« The New York Times », « Buzzfeed ») dans le but d’intégrer leurs articles directement sur Facebook, à partir de ce mois de mai. Cela signifierait une grande perte de trafic pour les médias, mais le réseau social leur proposerait de garder une partie des revenus publicitaires engrangés. Explications.
Il y a deux mois, le site américain Slate.com publiait un article alarmiste (traduit en version française sur Slate.fr) dans lequel le journaliste Will Oremus affirmait que Facebook pourrait « faire mettre la clé sous la porte à bon nombre de sites d’information« . Il avait peut-être vu juste.
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Ces derniers mois, comme le rapporte le New York Times, Facebook aurait été en discussion avec de nombreux sites d’information américains dans le but d’intégrer leurs articles directement sur le réseau social. Pour l’instant, la majorité des sites d’info (dont les Inrocks) fonctionnent de la même manière : ils postent des liens de leurs articles sur leur page Facebook, liens qui s’afficheront chez les internautes abonnés à la page.
Le problème du « reach »
Le réseau social appelle le nombre de personnes qui voient un lien le « reach », soit « l’amplitude » ou « la portée » d’un post. Un « reach » parfois très faible par rapport au nombre d’abonnés d’une page Facebook. Le fondateur du site Madmoizelle (qui compte plus de 180 000 fans sur Facebook), Fabrice Florent, se plaint régulièrement du faible nombre d’internautes touchés par ses posts sur le réseau social. Le « reach » peut descendre jusqu’à 4,5% (soit seulement 4,5% des 180 000 fans qui verront l’article posté) :
La blague du reach Facebook est de retour. Semaine passée VS semaine d’avant. Ça vous fait la même ou c’est que nous? pic.twitter.com/5chotudYoo
— Fabrice Florent (@fabflorent) 15 Septembre 2014
L’utilisation « conseillée » du player vidéo de Facebook
Le 7 janvier 2015, Facebook avait expliqué dans un post de blog que les sites d’informations ont tout intérêt, quand ils veulent partager des vidéos, à utiliser le « player » de Facebook (comme dans cet exemple) et pas un lien qui renvoie vers un site externe, comme le font souvent les sites d’info (dont les Inrocks). Le souci pour les médias est évident: s’ils hébergent leurs vidéos directement sur Facebook, il y aura moins de trafic sur leur site. Pour convaincre les plus réticents, Facebook augmente la portée des vidéos hébergées directement sur son site, bien plus grande que pour un post classique. Une récente étude a montré que cette différence allait même en grandissant.
La baisse du reach Facebook confirmée par une nouvelle étude Adobe : -32% en 2014 http://t.co/W2qtZzNxte via @BlogModerateur
— Marie Slavicek (@marieslavicek) February 24, 2015
Intégrer les articles directement sur Facebook
D’après le New York Times, Facebook a un nouvel objectif: héberger directement des articles de sites d’information. Selon le magazine américain, BuzzFeed, National Geographic et le New York Times lui-même seraient en discussion avec le réseau pour développer ce nouveau type d’intégration de contenus. Cette nouvelle fonctionnalité s’appellerait « Instant Articles », d’après un article du Wall Street Journal paru le 1er mai dernier, et elle pourrait bien voir le jour ce mois-ci.
Facebook souhaiterait héberger directement ces contenus afin d’éviter à ses utilisateurs de devoir cliquer sur un lien, et d’attendre que la page du site d’information se charge dans une nouvelle fenêtre. En février dernier, le cadre exécutif de Facebook Chris Cox avait déclaré lors d’une conférence qu’il trouvait la lecture des articles, notamment sur mobile, trop compliquée à cause de la lenteur et des interfaces chargées :
“Lire un article sur un smartphone est une expérience qui est encore très mauvaise. Nous voulons améliorer cette expérience, pour les éditeurs de contenus. »
Autre avantage de taille, dont Facebook ne parle pas : l’internaute n’aurait plus à quitter Facebook pour lire un article, et passerait encore plus de temps sur le réseau social. En échange de ce partenariat, Facebook offrirait une compensation en terme de revenus publicitaires aux médias, dont les contours restent assez flous.
D’après le dernier article à ce sujet du Wall Street Journal, dans une des configurations proposées par Facebook, les articles hébergés sur « Instant Articles » qui contiendraient de la pub que le média lui-même a vendue, tous les revenus reviendraient au média. En revanche, si la pub a été vendue par Facebook, la firme américaine gardera 30% des revenus engrangés.
Un front commun des médias face à Facebook ?
En 2013, les éditeurs de presse français étaient parti au combat contre Google, l’accusant de se faire de l’argent sur le dos de leurs contenus, notamment grâce à l’agrégateur d’articles Google Actu. Pour répondre à cette fronde, Google avait finalement accepté de passer un accord avec les sites d’info français et s’était engagé à créer le « Fonds pour l’Innovation Numérique de la Presse (FINP) » et de verser, par son biais, 60 millions d’euros de subvention sur 3 ans (les Inrocks en ont bénéficié en 2014).
Toujours d’après le New York Times, plusieurs employés du Guardian seraient en train de tâter le terrain auprès d’autres médias afin de mener un front commun contre Facebook et pouvoir négocier des partenariats plus intéressants pour les sites d’information. Car pour l’instant, l’intérêt qu’auraient les sites d’information à héberger leurs articles sur Facebook est moindre, sachant qu’ils perdraient une grande partie du trafic des internautes qui venaient auparavant consulter ces mêmes contenus sur leur site.
D’autant plus que si les sites d’information ne s’associent pas pour demander les « mêmes » droits, ceux qui n’auront pas passé de partenariats avec Facebook risqueraient de voir leurs posts éclipsés. Exactement comme les médias qui n’hébergent pas leurs vidéos sur le player de Facebook, et sont aujourd’hui moins mis en avant.
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