Journaliste. Elle présente L’Effet papillon chaque samedi et la mensuelle Histoires de cinéma. Elle parle du formatage de l’information, de Groland, des Guignols et de Frédéric Beigbeder.
L’Effet papillon, que vous présentez, a réalisé sa meilleure audience la semaine dernière. Cela dénote-t-il d’un appétit grandissant des téléspectateurs pour les reportages, les formats longs ?
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Il y a incontestablement une volonté croissante de comprendre, dans une société noyée, matraquée d’informations ne serait-ce que par le net. L’Effet papillon, qui est un magazine de reportages réalisés par les journalistes de l’agence Capa, a ce côté “dessous des cartes”. Il donne à voir et à entendre ce que l’on voit et entend rarement ailleurs.
Depuis début septembre, on a la sensation qu’une polémique en chasse une autre : Mitterrand, Polanski, Jean Sarkozy…
Le débat, la critique n’ont plus le temps de se formuler, de se sédimenter. Cela fait dixsept ans que je fais ce métier, et il me semble qu’il existait un rapport réflexif à l’actualité, qui se perd aujourd’hui. Les journaux et les télés jouent la montre contre internet. C’est un combat perdu d’avance, inutile. D’autant que ce sont les politiques qui, consciemment, imposent ce timing ! La meilleure façon d’étouffer une polémique, c’est encore d’en lancer une autre. Hier, c’était l’identité nationale, aujourd’hui c’est le couvre- feu… Il s’agit de garder la main dans les médias. Difficile, dans ces conditions, de débattre de quoi que ce soit. Les médias n’ont pas encore trouvé la parade… L’opposition non plus !
Vous présentez également, depuis le 27 octobre, Histoires du cinéma, une émission qui s’intéresse au 7e art sans être connectée aux sorties ciné. Vous étiez lassée des interviews d’artistes en promo ?
Quand les acteurs font la promotion d’un film, ils tiennent par la force des choses un discours de VRP. Il faut donc lutter pour sortir des sentiers battus. D’où l’envie de cette émission déconnectée de l’actualité immédiate, à la fois hétérogène, éclatée, grand public et pointue qui nous permet de parler sur un même plan de Charlotte Gainsbourg et de Tadanobu Asano. Un kaléidoscope, à l’image du cinéma. Moi, j’aime Alain Cavalier mais aussi OSS 117. J’ai la liberté de ce genre d’éclectisme.
Selon Le Canard enchaîné, Nicolas Sarkozy serait agacé par Les Guignols, Groland ou Le Petit Journal. Une belle preuve d’impertinence pour Canal+, qui fête ses 25 ans ?
Je trouve sain et nécessaire qu’il y ait des lieux de contradiction et de satire. C’est de salubrité publique, surtout quand le principal parti d’opposition ne tient pas son rôle d’opposant. Les Guignols, Groland, au même titre que Le Canard sont complètement dans leur rôle qui n’est pas de complaire au pouvoir mais de le moquer. Je crois que Nicolas Sarkozy est agacé par toutes les voix contradictoires. Il disait préférer l’excès de caricature à l’absence de caricature, qu’il s’y tienne !
Marie NDiaye a reçu le Goncourt, Beigbeder le Renaudot. Ce sont des auteurs que vous aimez ?
Je n’ai pas lu Trois femmes puissantes, donc difficile de m’extasier pour l’instant. J’aime beaucoup les ouvrages antérieurs de Marie NDiaye. Je suis très contente pour Beigbeder, il le mérite d’autant plus que malgré quelques pages bâclées, c’est son meilleur livre, et bizarrement le moins autocentré. J’aime bien ce mec. Malgré son dandysme caricatural, c’est un petit garçon blessé.
Vous écoutez quoi en ce moment ?
Le premier album de Bon Iver, un jeune musicien qui s’est enfermé, après une rupture amoureuse, dans une cabane au Canada pour écrire, composer, jouer et enregistrer For Emma, Forever Ago. Une belle façon de cuver son désespoir ! J’aime Antony aussi, au fond, tout ce qui est lacrymal.
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