Le photographe Nick Waplington est appelé pour documenter la réalisation d’un défilé Alexander McQueen, de la conception des vêtements au studio londonien jusqu’au jour du show durant la semaine de la couture à Paris. Le défilé McQueen automne-hiver 2009, “Horn of Plenty”, sera un des derniers en présence du créateur, décédé l’année suivante. Retour sur des […]
Le photographe Nick Waplington est appelé pour documenter la réalisation d’un défilé Alexander McQueen, de la conception des vêtements au studio londonien jusqu’au jour du show durant la semaine de la couture à Paris. Le défilé McQueen automne-hiver 2009, « Horn of Plenty », sera un des derniers en présence du créateur, décédé l’année suivante. Retour sur des clichés devenus historiques.
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« En 2007, on m’a demandé de venir voir Lee [Alexander McQueen]. Il m’a dit qu’il voulait faire un livre de photos sur son processus de travail, suivant une de ses collections de sa naissance au grand final du défilé à Paris six mois plus tard. Lee connaissait mon travail et m’aimait bien, il aimait ce qu’il appelait mon « style sale et désordonné ». « Fais ce que tu veux, » m’a t-il dit. « Ceci va être ton livre et j’en serai le sujet. »
Ainsi s’exprime le photographe britannique Nick Waplington dans Working Process, son exposition de photos retraçant la conception de la collection automne-hiver 2009 du créateur britannique Alexander McQueen. Nommée « Horn of Plenty » – alias « corne d’abondance » – la collection, qui s’avérera être une des dernières à être intégralement conçue par le créateur, retrouvé pendu en février 2010, est pensée comme une forme de rétrospective sur tous les grands moments de la carrière de McQueen, reprenant des motifs et tissus de collections précédentes. Mais aussi, en filigrane, comme une dénonciation de la société de consommation : « Il y a une ironie dans l’acte de recyclage de cette collection, » explique Nick Waplington. « Les vêtements qui ont l’air d’être fabriqués à partir de sacs poubelle sont en réalité faits de soie la plus fine et la plus chère. Il n’y a rien de politiquement correct dans ces vêtements. Bien au contraire, il n’y a rien de plus haut de gamme, c’est de la haute couture. »
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Haute couture et déchetteries
C’est en accord avec ce thème du recyclage que McQueen fait appel à Waplington – qui, bien loin du monde de la mode, connait le succès avec son ouvrage Settlement, sur des camps de réfugiés à Jérusalem, et ses photos de déchetteries au Moyen-Orient – suivant la découverte d’un cliché du photographe d’une décharge près du lieu de naissance de McQueen, au Sud de Londres. Working Process joue sur cette mise en parallèle de la création couture, au sommet du luxe, et des clichés de déchetteries Véolia à travers le Royaume-Uni. Le nom de la collection, « corne d’abondance », y fait écho, traduisant la volonté de McQueen de pointer l’absurdité d’une société de consommation qui prend trop et jette trop. « Le choix de titre était une déclaration à propos de la planète, » précise le photographe, « un commentaire à propos des ressources limitées, l’impossibilité d’une croissance économique infinie et le besoin d’une forme de réajustement et de réalignement. »
Exposées à la Tate Britain, les clichés de Nick Waplington sont touchants d’intimité, suivant l’équipe du studio entière dans la conception d’une collection. On y voit Alexander McQueen sur tous les fronts, attentif à la moindre étape de création. Les photos du show final sont présentées dans une salle noire, soulignant la pâleur exagérée des mannequins maquillés à outrance pour une collection à la flamboyance rare. En présentation de l’exposition, une citation de McQueen plonge un temps le visiteur dans l’esprit d’un des créateurs les plus marquants de sa génération. En voici un extrait :
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« Je suis toujours intéressé par la représentation de notre époque et cette collection en représente l’absurdité. Je pense que quand les gens la regarderont plus tard, ils saurons que c’était la crise à l’époque où je l’ai dessinée, qu’on est arrivés à ce point à cause d’une consommation rampante et inconsidérée. Ils saurons qu’on fait référence au recyclage mais de façon tordue. C’est pour cela que le décor est une montagne de déchets et que j’ai dû fabriquer des vêtements à partir de sacs poubelle et de vinyles cassés. Bien sûr, je ne fais pas vraiment de vêtements à partir de sacs poubelle et de vinyles cassés. C’est de la soie. Il y a une vraie ironie, tout est ironique, et j’espère que les gens le verront. […] Je veux que les gens regardent tout ça et se disent, ‘C’est quoi ça? Et ça? Et ça? Bordel, qu’est-ce que c’est que tout ça?’ «
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Nick Waplington / Alexander McQueen – Working Process, jusqu’à la fin de la semaine à la Tate Britain à Londres. Citations du photographe tirées du livre Alexander McQueen Nick Waplington, A Conversation with Susannah Frankel (Damiani, septembre 2013). On vous conseille aussi la très belle expo du Victoria & Albert Museum, Savage Beauty (jusqu’au 2 août).
Crédit pour toutes les images : Untitled from the series ‘Alexander McQueen Working Process’ 2008-09 © Nick Waplington
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