Travail non rémunéré, réduction de salaires : sous couvert de crise, les entreprises européennes pressurent les salariés pendant que la droite continue son travail de sape des acquis sociaux.
La compagnie aérienne British Airways (BA), en difficulté financière, a demandé la semaine dernière à ses employés de travailler gratuitement sur la base du volontariat pour éviter les licenciements et aider l’entreprise “à survivre”. Willie Walsh, le directeur général, a montré l’exemple en promettant de travailler gratuitement tout le mois de juillet, soit 72 000 euros de manque à gagner sur un salaire annuel de 831 000 euros. Les syndicats britanniques s’y opposent et estiment qu’il faut commencer par la direction. BA a déjà supprimé 2 500 postes et envisage d’en supprimer encore 2 000 alors que le chômage britannique a atteint un niveau inégalé depuis dix ans. Le travail gratuit sonne comme une nouvelle forme de chantage à l’emploi pour faire pression sur la masse salariale. “C’est la première fois que j’ai connaissance d’une telle situation dans un pays occidental. Travailler gratuitement me semble difficile en France : la Convention européenne des droits de l’homme, à laquelle elle a adhéré, prohibe l’esclavage et le travail forcé”, analyse Pierre- Yves Verkindt, professeur de droit du travail à l’université de Lille-II.
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Un scénario participant de la même philosophie est en train de se développer : la baisse des salaires. L’entreprise Hertz “propose” depuis mars “un effort de solidarité” à ses cadres : accepter une baisse de salaires de 5 % à 7,5 % pour éviter les licenciements. La direction d’Osram, filiale de Siemens, menace de licencier 108 salariés qui refusent une baisse de salaire. Mais en France, il est illégal pour un employeur de réduire le salaire d’un employé sans son consentement, cela nécessite un avenant au contrat de travail. L’hypothèse la plus envisageable en France pour Pierre-Yves Verkindt est de voir s’accentuer davantage “les baisses de rémunération par le biais de réductions d’avantages sociaux”. Dans ce sens, l’inénarrable Frédéric Lefebvre a déposé un amendement, finalement retoqué, pour permettre aux salariés de télétravailler pendant leurs congés-maladie. Aujourd’hui, sous l’impulsion d’un Medef revigoré comme si la crise n’avait rien de systémique, le gouvernement envisage de renforcer le contrôle des arrêts de travail et de porter l’âge légal de la retraite à 67 ans.
Avec sa victoire aux élections européennes, la droite continue sa transformation libérale du marché du travail. Les beaux discours com’ autour de la refondation du capitalisme – tel celui tenu par Sarkozy à l’Organisation internationale du travail, sur “la mondialisation coopérative” – masquent mal que les partis conservateurs n’ont rien changé à leurs lignes agressives contre les acquis sociaux : la crise a bon dos pour baisser les salaires, en les utilisant comme variable d’ajustement, et mettre à mal les protections sociales. Et cela à l’opposé des diagnostics qui voient dans la faiblesse et les inégalités salariales une des causes principales de la crise.
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