L’association Resist veut faire interdire la commercialisation des implants conçus par le laboratoire allemand Bayer, qu’elle accuse de causer de graves effets secondaires. Marielle Klein, à l’origine de la mobilisation, nous raconte son parcours du combattant.
Serait-on à l’orée d’un nouveau scandale sanitaire ? C’est en tout cas ce que suggère l’association Resiste (Réseau d’entraide, de soutien et d’informations sur la stérilisation tubaire) qui tente de faire interdire en France, « au nom du principe de précaution » les implants Essure fabriqués par le laboratoire Bayer et soupçonnés de causer de graves effets secondaires. Une demande pour l’instant rejetée par le ministère de la Santé.
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Commercialisée dans l’Hexagone depuis 2002, la méthode Essure est un moyen de contraception définitif. Alternative à la ligature des trompes, 52 % des femmes stérilisées la choisissent pour sa simplicité : elle ne nécessite pas d’anesthésie générale, et l’intervention dure une dizaine de minutes. Plus de 120 000 Françaises ont aujourd’hui eu recours à cette méthode comme moyen de contraception. Un acte qui est remboursé par la Sécurité sociale depuis 2005. Seulement voilà, depuis plus de deux ans, ce dispositif médical est placé sous surveillance renforcée par l’ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament). Pour l’instant, l’agence fait état de 71 femmes portant les implants Essure et rapportant de graves troubles.
Marielle Klein, présidente de Resist, ainsi que deux autres femmes, ont décidé de se tourner vers la justice le 9 décembre dernier. Leur plainte sera examinée le 10 mars. « Nous demandons la nomination d’un expert dont l’objectif est de confirmer le lien de causalité entre les troubles de patientes et le dispositif », explique Me Charles Joseph-Oudin, avocat des victimes du Mediator et de la Dépakine, qui assurera leur défense. « Les autorités sanitaires ont compris qu’il y avait un problème de pose, du geste médical, mais aussi un souci lié au dispositif lui-même », assure-t-il.
Plusieurs membres de l’association ont été reçus au ministère de la santé vendredi 20 janvier, qui a alors commandé deux études. « L’une sera réalisée par le laboratoire Bayer lui-même, sur 3 000 Françaises. L’autre, sera menée par l’ANSM à partir de données de l’assurance-maladie », nous explique l’avocat de Marielle Klein qui confie que “deux cent cinquante dossiers sont en cours de constitution”.
Un véritable parcours du combattant
Fin 2011, cette mère au foyer de 34 ans vient d’accoucher de son cinquième enfant et ne souhaite pas en avoir d’autres. Ne désirant plus prendre la pilule et n’ayant pas supporté le stérilet, elle décide alors de recourir à la stérilisation définitive. Un moyen de contraception “synonyme de liberté”, selon ses mots. Sous recommandation de sa gynécologue, elle opte pour le confort de la méthode Essure. « C’était comme on me l’avait dit, immédiat et sans souci particulier. Le lendemain tout allait bien », raconte-elle. Mais c’est moins de deux ans après, en janvier 2013, que le cauchemar démarre. Sinusites, vertiges, grosse fatigue – « monter les escaliers était devenu une épreuve – perte d’audition, palpitations cardiaques, paralysie faciale… “Je me suis vue mourir », confie la Lorraine.
En deux ans, elle rencontrera tout un ensemble de médecins de spécialités différentes. ORL, neurologues, gynécologues, ils finiront tous par aborder le thème de la dépression et lui suggérer d’aller dans un institut psychiatrique. Un sentiment d’abandon la gagne. « Je ne suis pas là parce que je n’ai plus envie de vivre, je suis là parce que je n’arrive plus à vivre », ne cessera-t-elle de leur répéter, en vain.
Marielle Klein ne baisse pas les bras pour autant, et fait des recherches. C’est finalement en 2015 qu’elle découvre que les implants, semblables à de petits ressorts, qu’on lui a posés quatre ans auparavant sont composés de nickel. « Un matériau auquel je suis allergique depuis toujours », lâche-t-elle. Elle retourne alors voir le chirurgien qui lui a posé les Essure pour lui faire part de ses inquiétudes. « Il n’y a aucune raison pour que les implants que je vous ai mis vous causent ce que vous me décrivez là », lui aurait-il rétorqué.
En rentrant chez elle, Marielle tombe sur un groupe Facebook intitulé « Essure Problems ». Sur la page, les témoignages accablants de femmes ayant eu recours à la méthode Essure s’enchaînent. Elle se souvient : « Ces femmes décrivaient les mêmes symptômes que moi et certaines racontaient comment tous leurs problèmes de santé s’étaient envolés suite au retrait des implants ». C’est le déclic. Le 4 janvier 2016, Marielle Klein se fait retirer l’utérus et les trompes de Fallope. « Je ne voulais pas prendre le risque qu’il reste des morceaux d’implants, comme certaines femmes pouvaient en témoigner sur internet », explique-t-elle.
« Dès le réveil, plusieurs douleurs avaient déjà disparu »
« Dès le réveil, plusieurs douleurs avaient déjà disparu. Petit à petit, j’ai commencé à retrouver toute mon énergie, raconte-elle avant d’ajouter : Tout est rentré dans l’ordre tellement rapidement que je me suis rendu compte de l’impact qu’avaient eu les implants sur mon corps. J’étais persuadée de ne pas être la seule, en France, à avoir souffert de ça. »
Elle trouve alors un groupe Facebook de femmes françaises – de 22 membres à l’époque – ayant vécu une histoire similaire à la sienne. Ensemble, elles lancent une pétition en ligne adressée à la ministre de la Santé, et qui comptabilise aujourd’hui plus de 70 000 signatures. Face au nombre de témoignages grandissant, Marielle Klein créée l’association Resist en juin 2016, qui compte désormais plus de 600 adhérentes décrivant toutes les mêmes maux. Le but du collectif ? « Que les implants ne soient plus commercialisés », répond la présidente du tac au tac. « On baigne dans le déni médical. Pourquoi le dispositif est-il sous surveillance renforcée depuis deux ans ? Et pourquoi est-ce que les porteuses ne n’ont pas été informées ? Nous souhaitons obtenir ces réponses », conclut Marielle Klein.
Suite aux plaintes déposées à son encontre, le laboratoire Bayer a publié un communiqué dans lequel il explique être « attentif aux allégations des plaignantes et de leur conseil juridique », soutenant la « sécurité et l’efficacité » de la méthode Essure.
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