En rassemblant des récits de viol, le Tumblr « Je connais un violeur » brise la loi du silence et rappelle que les agresseurs font souvent partie de l’entourage des victimes.
« B., le mari de la meilleure amie de ma mère. Ils habitent deux maisons plus loin et viennent souvent prendre l’apéro chez mes parents. Ils ont trois enfants qui me gardaient quand j’étais petite. Je rentrais du collège à 19h, il m’a proposé de venir les voir pour dire “bonjour”. Pour expliquer mon retard à ma mère je lui ai dit que j’avais loupé mon bus. » Le texte, anonyme, fait partie des plus de 250 témoignages postés sur le Tumblr « Je connais un violeur » depuis sa création le 31 août. Plus loin, des femmes et des hommes racontent avoir été violés par un grand-père, un prof particulier, un meilleur ami, un enseignant, un directeur de colo, un frère… avec plus ou moins de détails, plus ou moins de tristesse, plus ou moins de réticence. L’une écrit : « J’étais à la fac. J’avais 17 ans. J’ai mis des mots dessus il y a peut être un an. Un viol. Oui, quand c’est ton copain ça peut aussi être un viol. » Plus loin, une autre explique : « Ça s’est passé chez un ami commun après une soirée, dans un endroit où je me croyais en sécurité, pendant que tout le monde dormait et ça a commencé dans mon sommeil ». Ailleurs, une jeune femme raconte avec des mots crus comment son père l’a violée durant toute son enfance et les terribles images qui ne cessent, depuis, de la hanter.
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En sus de leurs récits de viol, les victimes racontent souvent, aussi, s’être retrouvées face à un mur : leur famille, la police, la justice ont refusé de croire en leur histoire. C’est pour briser le silence et rappeler que les agresseurs font en majorité partie de l’entourage de leurs victimes que Pauline A., 27 ans, a créé ce Tumblr. Contactée par mail, elle nous écrit :
« Les violeurs ne sont pas tous des psychopathes marginaux qui sautent sur leurs victimes dans des ruelles sombres, la nuit. Il n’y a pas de profil de violeur type, la majorité d’entre eux est intégrée socialement, et surtout, dans 80% des cas, la victime connaissait son agresseur.
Pauline A. relit attentivement les témoignages et ne publie que ceux, anonymes, qui ne permettent pas d’identifier clairement le violeur. « Ce Tumblr n’est pas le lieu d’une vendetta (et n’oublions pas que la diffamation est un délit). En cas de doute, je supprime des éléments qui paraissent trop précis« , explique-t-elle.
Pauline A. prend le temps de répondre à plusieurs victimes, les encourageant à porter plainte, à en parler avec leur entourage ou encore avec une association. Pour elle, ce Tumblr est important non seulement pour réveiller les lecteurs, bousculer les mentalités, mais, aussi, pour servir d’exutoire aux contributeurs, qui l’utilisent comme une soupape de décompression, voire une thérapie. « Certaines personnes se sont rendues compte grâce aux autres témoignages qu’elles n’étaient pas seules dans leur cas, et ont enfin réalisé la gravité de ce qu’elles avaient vécu. »
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