Des penseurs – géophysiciens, sociologues, philosophes…– mettent au cœur de nos vies futures l’urgence d’une politique écologique.
Catastrophes écologiques, accidents nucléaires, destruction de la biodiversité, bombe démographique, épuisement des ressources naturelles, des gisements carbonés… : l’humanité est confrontée à une menace disséminée qui, selon le géophysicien André Lebeau, « n’a aucun précédent dans l’histoire de la civilisation, ni même dans celle de l’espèce biologique ».
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Dans Les Horizons terrestres, réflexions sur la survie de l’humanité, l’auteur souligne que l’avenir du monde dépend de « l’adéquation » des besoins humains « aux ressources que peut procurer la Terre ». Un nouvel horizon de la finitude nous oblige à définir les contraintes que les sociétés contemporaines vont devoir accepter à l’échelle de la planète pour survivre. Si le pari semble simple et lisible dans son énonciation, il bute sur la complexité de sa mise en pratique : il ne faut pas moins que « transformer les comportements collectifs de l’espèce, les structures à travers lesquelles ils agissent – gouvernances, systèmes économico-financiers, systèmes de production, systèmes techniques »…
La croissance ne peut plus être au cœur des « pétrocraties »
Pour se transformer, les sociétés doivent s’appuyer sur l’élargissement du savoir et sur l’intelligence humaine, « seul outil dont dispose l’humanité pour échapper au cul-de-sac où elle s’est engagée ». Il manque malheureusement des lieux de confrontation d’idées où se mêleraient, dans un élan commun, les visions de biologistes, géographes, géophysiciens, sociologues, philosophes… Ils y aborderaient les problèmes de la finitude planétaire tant sous leurs aspects physiques et biologiques que sous leurs aspects sociaux.
Il faut penser la fin nécessaire de la croissance illimitée, qui fut l’obsession des sociétés modernes, comme l’analyse l’anthropologue Timothy Mitchell dans Petrocratia, la démocratie à l’âge du carbone. Cette croissance ne peut plus former le cœur des « démocraties carbones » ni des « pétrocraties », « encastrées dans un environnement matériel grandement défini par ses ressources énergétiques minérales ».
« La possibilité d’un avenir plus démocratique dépend des outils politiques que nous développerons pour affronter la fin de l’ère des combustibles fossiles », estime l’auteur.
Comme l’explique Eloi Laurent dans Social-écologie, les crises écologiques sont elles-mêmes « des épreuves de vérité pour nos démocraties. »
Mieux comprendre les enjeux écologiques, inventer un modèle de développement plus juste et « soutenable », cela exige de dépasser l’opposition stérile entre ce que le philosophe Dominique Lecourt appelle dans Humain, post-humain, les « biocatastrophistes », critiques radicaux de la science et de la technique, et les « technoprophètes », annonciateurs de l’entrée triomphale de notre espèce dans l’ère de la posthumanité grâce à l’intelligence artificielle.
A rebours de ces deux postures excessives, cet épistémologue propose une nouvelle alliance humaniste, hantée par le spectre de Diderot, entre les sciences humaines et les sciences dures : la seule manière de sauver l’humanité en péril et de préserver nos horizons terrestres.
Jean-Marie Durand
Les Horizons terrestres, réflexions sur la survie de l’humanité d’André Lebeau (Gallimard), 264 pages, 17,90 euros Humain, post-humain de Dominique Lecourt (PUF), 156 pages, 15 euros Social-écologie d’Eloi Laurent (Flammarion), 228 pages, 17 euros Petrocratia, la démocratie à l’âge du carbone de Timothy Mitchell (Ere), 128 pages, 14 euros.
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