Le mois de novembre est souvent l’occasion pour les chaînes US d’annuler des séries. Quand l’industrie rejette violemment ses surplus. (Trauma, série sacrifiée de l’automne)
On lui promettait la belle vie, mais elle n’a pas duré longtemps : cette année, la première série américaine annulée par une grande chaîne s’appelait The Beautiful Life (CW). Deux petits épisodes et hop, aux oubliettes. Récemment, Trauma (NBC) et Dollhouse (Fox) ont pris le même train funeste, même si cette dernière aura réussi à durer deux saisons de treize épisodes.
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Pas mal d’autres séries s’agitent dans leurs petits souliers durant ce mois de novembre souvent glaçant. L’occasion de rappeler une loi irréductible de l’industrie la plus puissante du petit écran mondial : produire toujours plus que ce qu’on est capable d’ingurgiter. Le cycle qui prend fin en ce moment, avec les séries confirmées, celles à qui on laisse une nouvelle chance, et celles qu’on envoie à la casse, a débuté il y a presque un an.
A Hollywood, décembre et janvier servent en effet chaque année de cadre à la “saison des pilotes”. Soit deux mois d’hystérie, où les scénaristes peaufinent leurs projets et convainquent les chaînes hertziennes d’en tourner le premier épisode. Cela débouche sur une petite centaine de tournages à la fin de l’hiver – un peu moins cette année (72) pour cause de crise. Un écrémage radical a lieu durant les mois suivants : au moins 60% des pilotes tournés pour les chaînes grand public terminent en DVD sur l’étagère de leur créateur.
Les rescapés, eux, doivent ensuite affronter l’ultime épreuve, la course à l’audience. Quand cela se passe mal, un an de travail peut être réduit à néant en une semaine. Le mois de novembre est souvent l’occasion pour les chaînes US d’annuler des séries. Quand l’industrie rejette violemment ses surplus.
En France, il est extrêmement rare qu’une chaîne accepte de tourner un pilote en bonne et due forme. On peut y voir l’une des raisons principales à la cruelle différence de niveau constatée entre ici et là-bas. Au-delà des impératifs économiques bien réels, puisqu’un pilote coûte cher et constitue un investissement incertain par nature, il s’agit d’une question de méthode et d’identité.
L’Hexagone se repose encore aujourd’hui sur une culture du prototype venue du cinéma, tandis que le monde de la série américaine fonctionne depuis soixante ans sur une bascule assez fine entre cette culture du prototype (le pilote) et le passage au mode industriel. Le parcours du combattant vécu par les séries US est sans nul doute la clef de leur succès : si on constate depuis deux ou trois ans une raréfaction des nouvelles séries intéressantes, c’est aussi parce que les diffuseurs hésitent à investir sur autant de pilotes qu’auparavant. Pour certains créateurs harassés par cette course au succès, la seule solution consiste à migrer vers le câble (HBO, Showtime, FX, AMC, etc.), où les exigences diffèrent.
L’histoire la plus exemplaire cette saison est celle de Southland, belle série policière mélancolique rejetée par NBC après quelques épisodes… mais rattrapée par TNT, qui la diffusera désormais. Mais pour une série sauvée, combien de victimes aussitôt nées, aussitôt oubliées ?
Un site recèle les perles éphémères de la télévision : www.televisionwithoutpity.com/brilliantbutcancelled
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