Avec son premier livre dans lequel il raconte son enfance dans l’ombre d’un père coco et volage, Marc Lavoine détrône Eric Zemmour en tête des ventes d’essais. Les raisons d’un succès.
Le sujet
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Sous-titré “le roman d’un enjoliveur”, L’homme qui ment ne raconte pas l’histoire d’un chapeau de roue contrairement à ce que des passionnés de tuning pourraient croire. Rien à voir non plus avec Rubber, le film de Quentin Dupieux sur un pneu psychopathe. Non, dans ce livre, le chanteur aux yeux revolver revient sur son enfance en banlieue parisienne dans les années 60- 70 et fait le portrait de son père, Lucien dit Lulu, employé des PTT, militant communiste, beau parleur porté sur la bouteille et surtout coureur de jupons invétéré, trompant Micheline dite Michou, sa femme et la mère de ses deux fils – Francis dit Titi et Marc dit Trouduc –, avec tout ce qui bouge. Un peu comme Bertrand, le héros du film L’homme qui aimait les femmes de Truffaut auquel Marc Lavoine rend d’ailleurs hommage dans un post-scriptum.
Le souci
Soyons honnête, ce livre est loin d’être le pire produit de l’industrie éditoriale. On peut même lui savoir gré d’avoir évincé l’odieux Suicide français d’Eric Zemmour de la première place des ventes d’essais. Cet exploit aurait tendance à nous le rendre sympathique. D’autant que Lavoine parvient à rendre plutôt touchant cet album de souvenirs, notamment sa relation avec son frère, sans misérabilisme ni auto-apitoiement. Reste que tout cela sent un peu la littérature gigot-flageolets. Et pas seulement à cause de l’évocation répétée des flatulences du grand-père, Henry dit Riton, mais du fait d’une écriture qui verse volontiers dans le lexique vintage avec des expressions du type “se berliner”, “ça y allait du radada” (traduction : ça baisait beaucoup), “lâcher une bulle”. Truffaut à la sauce Audiard : pas forcément très digeste.
Le symptôme
Le récit de Marc Lavoine se situe au croisement de deux grandes tendances qui ont le vent en poupe : les confessions de people ou apparentés (voir les quelque 700 000 exemplaires vendus de Merci pour ce moment de Valérie Trierweiler) et la vague nostalgique en vogue depuis Les Choristes qui se repaît des images d’Epinal d’une France dans le formol. Dans ce livre aux allures de film super-8 s’esquisse la peinture d’une banlieue idéale où on roule en R8 Gordini ou sur une “meule”, où on boit de la Suze et fume des Gitanes en écoutant Jean Ferrat, mais aussi d’un monde rural de carte postale, ce Lot chantant où la famille passe ses vacances et où on part à la ferme chercher du lait et des œufs. Mais inutile de dire qu’on préfère la France de Lavoine, celle qui vendait L’Huma et prônait l’indépendance de l’Algérie, à la France de Zemmour qui achète Rivarol et vote FN.
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