Après le portrait élogieux de Martin Weill, le jeune reporter du Petit Journal de Canal +, publié par Télé Obs le 16 janvier, le site Acrimed (Action critique médias) fait entendre un autre son de cloche sur le même sujet, en se concentrant sur le fond : l’actualité internationale est-elle bien traitée par cette émission […]
Après le portrait élogieux de Martin Weill, le jeune reporter du Petit Journal de Canal +, publié par Télé Obs le 16 janvier, le site Acrimed (Action critique médias) fait entendre un autre son de cloche sur le même sujet, en se concentrant sur le fond : l’actualité internationale est-elle bien traitée par cette émission quotidienne grand public ?
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« ‘Pris en sandwich’ entre des séquences à vocation humoristique »
Selon le politologue Julien Salingue, auteur de cet article, la place de ces reportages « sérieux » aux quatre coins du monde dans une émission d’infotainment est problématique, car ils « sont immanquablement ‘pris en sandwich’ entre des séquences à vocation humoristique ». Et de lister certains enchaînements malvenus : de la « troisième Intifada » à la dernière petite phrase de Nadine Morano, de la campagne régionale de Jean-Yves Le Drian en Bretagne aux bombardements en Syrie, etc. Julien Salingue pointe ainsi le « risque de semer la confusion et de noyer les sujets ‘sérieux’ dans un océan de divertissement ».
Dans ce contexte, la dévaluation du reportage au profit du rire est un écueil dans lequel les équipes du Petit journal sont accusées de tomber occasionnellement.
« La disparition des correspondants permanents »
Autre problème dans le traitement de l’information internationale : le rythme effréné de l’émission et le fait que Martin Weill ait hérité du statut d' »envoyé spécial aux quatre coins du monde ». Julien Salingue dresse ainsi la liste éloquente des destinations du reporter durant la saison 2014-2015 :
25-28 août 2014 : États-Unis (Missouri)
2-3 septembre : Écosse
8-11 septembre : Iraq
15 septembre : Tunisie
23-26 septembre : Danemark
1-3 octobre : Hong-Kong
10 octobre : Paris (avec les migrants)
14 octobre : Syrie
15 octobre : Turquie
16 octobre : Syrie
23 octobre : Belgique
29-30 octobre : Mexique
2-5 décembre : États-Unis (Silicon Valley)
8 décembre : États-Unis (New York)
16-18 décembre : Allemagne
5-14 janvier 2015 : États-Unis (Las Vegas)
15 janvier : Grèce
19 janvier : Nigéria
20-23 janvier : Grèce
28 janvier-2 février : Syrie
10-13 février : Japon
16 février : Danemark
27 février-6 mars : Tchad
16-20 mars : Inde
24-27 mars : Tunisie
6 avril : Irlande du nord
7 avril : Allemagne
13-17 avril : Kenya
22 avril : Italie
30 avril-8 mai : États-Unis (Baltimore)
11 mai : Antilles
25 mai : Espagne
1er juin : Hongrie
17 juin : Iran
18 juin : Tchad
22-25 juin : États-Unis (Colorado)
Cette liste permet à Acrimed de faire un constat plus général : « la disparition des correspondants permanents et leur remplacement par des envoyés spéciaux contribue à dégrader la qualité de l’information internationale ».
« Martin Weill apparaît à l’image, en moyenne, environ 75% du temps »
L’argument final fait également mouche : bien que l’intention de parler de l’actu internationale soit louable, les reportages du Petit Journal, en dépit de leur originalité, sont souvent « simplistes » selon Acrimed. « Donner la parole à la jeunesse cubaine », « à la jeunesse iranienne », « aux Kurdes de Syrie », « aux migrants » ou même « aux électeurs de Donald Trump », comme prétend le faire LPJ, c’est bien beau. Mais les nuances nécessaires ne sont pas au rendez-vous, car il faut le rappeler : ce sont des « groupes pluriels, complexes, traversés de nuances ou de contradictions ».
Enfin, Acrimed a également remarqué la focalisation de l’image sur Martin Weill, personnage principal de ses reportages (la référence à Tintin est incontournable) : « Sur un échantillon de 10 reportages (entre 4 et 7 minutes environ), Martin Weill apparaît à l’image, en moyenne, environ 75% du temps ».
C’est sûr, on est loin des fleurs lancées à Martin Weill par Télé Obs (« À 28 ans, le globetrotteur du “Petit Journal” de Canal+ a donné un sacré coup de jeune au grand reportage télé. […] Avec un ton moderne et un style bien à lui, désormais copié, il réussit le tour de force d’intéresser les jeunes à l’actualité internationale« ), mais ces questions et ces critiques méritent d’être soulevées. Même si Le Petit Journal a sans doute le mérite d’éveiller chez un jeune public la conscience des grands enjeux internationaux.
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