L’esprit du Burning Man, festival qui a lieu depuis 1986 chaque année dans le désert de Black Rock au Nevada, fait des émules dans le monde entier. Mais qu’est-ce qui réunit tous ces « burners » ?
En plein désert du Nevada, à la fin août, des milliers de tentes, caravanes et autres habitacles sont alignés en demi-cercle sur plusieurs centaines de mètres. Des gens déguisés dansent et font la fête autour de sculptures géantes. Il s’agit de Burning Man, un festival créé en 1986, réunissant aujourd’hui près de 70 000 personnes. Par-delà les frontières de la Californie, l’esprit de ce festival s’est propagé à travers une communauté de burners à géométrie variable.
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Aux Etats-Unis, des regional party sont organisées dans près de vingt Etats, mais les burners se rassemblent aussi à travers le monde de la Grande-Bretagne au Japon en passant par l’Australie, le Canada ou la France. Parmi les plus importants festivals organisés en dehors du Burning Man on retrouve l’Afrika Burn en Afrique du Sud, le Midburn dans le désert du Néguev en Israël, mais aussi le Nowhere Festival en Espagne.
Tout construire à partir de rien dans un paysage aride
Petit frère espagnol du Burning Man, depuis 2004 le Nowhere festival a lieu chaque année à la mi-juillet. Entre Saragosse et Lérida, après avoir parcouru quelques kilomètres sur des chemins de terre puis avoir franchit la Gate, enclave située au milieu du désert, environ 1 500 personnes se rejoignent pour un événement hors du commun. À leur arrivée, beaucoup se déguisent et se rebaptisent d’un pseudo. Au programme, comme pour tous les événements des burners, tout construire à partir de rien dans un paysage aride, créer et expérimenter.
Une semaine de survie où chacun doit subvenir à ses besoins, mais encore et surtout, une semaine de fête et d’exubérance. Dus, pseudo d’un bénévole du Nowhere qui aide notamment à la construction des infrastructures du festival, nous raconte : « Mis à part les soirées organisées chaque soir dans les barrios, soit les campements construits par les participant, en fonction de leurs compétences, les festivaliers proposent des workshops tels que des ateliers de méditation, de massage, de yoga ou de tantrisme. Il n’y a pas moins d’une centaine d’activités à faire en journée. »
Les dix principes des burners
Festivals, soirées, decompression party à Londres et à Amsterdam, burning cafés à Paris, les burners prospèrent. Ce qui les réunit ? Un certain état d’esprit mais encore et surtout dix principes constituant l’ADN du Burning Man. Arrivent en tête la radical inclusion, l’autosuffisance et la collaboration : sans distinction d’origine, de religion ou d’orientation sexuelle, chacun est accepté et se doit d’inclure les autres. Comme on peut le lire sur le site du Nowhere, chacun est ainsi invité à installer un panneau d’affichage annonçant les événements programmés au sein de son barrio et à discuter avec les personnes passant à proximité.
Autonomes, les festivaliers doivent subvenir à leurs besoins et construire leurs propres abris, mais l’entraide et la collaboration sont de mise. Comme le relève Raphaël Hebert, Build Lead au Nowhere depuis six ans, « cet esprit de groupe fait une grande différence avec les autres festivals. Tu sais qu’au moindre problème, chacun se sent responsable et vient en aide au lieu se dire que c’est le job d’un autre. » Pour Isabelle, un contact régional du Burning Man en France, « l’esprit de ces événements est avant tout la co-création : chacun participe à la fête en proposant une activité, en se déguisant et en participant à l’ambiance générale. »
Immédiateté et expression de soi
Deux autres principes priment chez les burners : l’immédiateté et l’expression de soi. Festival libertaire, chacun a le droit d’être la personne qu’il est ou veut être sans risquer de se faire juger par les autres. Ainsi, il n’est pas rare de croiser des gens nus, déguisés ou travestis. Chacun peut profiter de cette expérience pour expérimenter de nouvelles choses et apprendre à se connaître. Comme le relève Raphaël, alias Cid dans le festival, cette volonté de faire tomber les barrières et les masques sociaux engendre une autre communication :
« Chez les burners, c’est mal vu de demander à quelqu’un ce qu’il fait dans la vie car on s’intéresse à la personne derrière la fonction sociale. Par exemple, un comptable déguisé en fille juchée sur des talons hauts n’aura pas forcément envie de parler de son travail. Du coup, chacun doit réinventer sa façon de communiquer, et les conversations sont souvent plus intéressantes qu’à l’ordinaire. »
Vivre sans argent et sans laisser de trace
Seules interdictions : faire du commerce et polluer. Ainsi, mis à part les blocs de glace qui rendent service dans le désert, chacun doit apporter ce dont il aura besoin pour le séjour et personne et oublier son porte-monnaie. Pour les burners, vivre sans argent est l’occasion de se rappeler de ce qui est vraiment important, mais encore l’occasion de développer la coopération et le don. Qui plus est, tout burner se doit de rendre l’endroit dans l’état dans lequel il l’a trouvé : c’est le principe du leave no trace, consistant à ne pas laisser de trace de son passage et à ne rien laisser derrière soi. Ouverture d’esprit, expression artistique, donner et partager, respecter les autres et son environnement, pour Cid, « le festival donne à vivre des expériences opposées à celles de la vie normale mais il n’y a pas d’ambition politique derrière tout ça, ce sont des alternatives temporaires qui n’ont pas vocation à devenir la règle. »
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