Un documentaire réalisé par le journaliste Guillaume Lecaplain revient sur la violence des débats entourant l’ouverture du mariage aux couples homosexuels.
« On s’est pris une vague dans la tronche » dit l’une. Un autre lâche : « ça m’a rappelé les sentiments dans la cour de récréation quand j’avais huit ans. C’est ça que ça a ravivé ». Plus d’un an après le début du débat autour de l’ouverture du mariage aux couples homosexuels, le journaliste Guillaume Lecaplain, lui-même homosexuel, a décidé de revenir sur la violence de l’opposition au mariage gay sous la forme d’un site intitulé Un Combat pour tous.
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Un documentaire « brut »
On y trouve une chronologie des événements, allant de la prière lue par l’archevêque de Paris André Vingt-Trois le 15 août 2012 à la célébration du premier mariage entre deux hommes le 29 mai 2013. Et, surtout, un documentaire prenant la forme d’une succession de témoignages.
« Je me suis dit qu’on avait vécu un moment historique où l’homosexualité s’invitait partout, explique Guillaume Lecaplain contacté par Les Inrocks, on pensait qu’on allait avoir le Mariage pour tous et on s’est pris dans la gueule la Manif pour tous ».
Partant de ce constat, le journaliste contacte des personnes de son entourage, souvent rencontrées dans les manifestations et rassemblements organisés en faveur du mariage pour tous, emprunte une caméra à une amie, utilise son iPhone pour capter le son et les filme face caméra.
Le résultat, qu’il qualifie de « brut« , d' »artisanal« , est saisissant. Quasiment sans relances ni questions, sans musique de fond, sans voix-off, sans images autres que celles des témoignages, le documentaire donne l’impression d’une conversation en face-à-face. « Je voulais recréer le sentiment de proximité« , confirme Guillaume Lecaplain. Le regard que posent les personnes interrogées sur le débat autour du mariage gay rappelle la violence de cette période. L’un qualifie l’année « d’extrêmement violente », un autre lance : « ‘Reste dans ton placard, qu’est ce que tu viens nous emmerder! On était bien sans toi, on n’a pas envie de composer avec toi’ : voilà ce qu’ils nous ont dit.' »
« Cette espèce d’attitude cool, je la regrette »
Les médias en prennent au passage pour leur grade. Une jeune fille raconte: « Sur des médias qui pouvaient être amis, il y avait le côté hétéro cool : on vous montre les images de la Manif pour tous et on les tourne en dérision (…) mais moi, ça me blesse. Cette espèce d’attitude cool, je la regrette. » Guillaume Lecaplain abonde dans ce sens et explique avoir réalisé ce documentaire afin de « faire entendre la voix des homosexuels qui manquait« :
« On a été examiné sous toutes les coutures mais notre parole n’a pas été portée. C’est une frustration. On a eu le sentiment d’étouffer. On peut regretter qu’on ait légitimé des discours de cathédrale, qu’on ait légitimé le rejet. On a eu l’impression que les médias tendaient leur micro vers les homophobes. Il ne faut pas oublier que la Manif pour tous était retransmise en direct sur BFM.TV. Ils ont acquis une force, imposé leurs codes à tel point que le gouvernement a reculé sur la PMA par exemple. »
Pour lui, la Manif pour tous a depuis perdu en crédibilité, même si elle essaye de revenir sur le devant de la scène au sujet de la « théorie du genre »: « A un moment, ils ont amené pas mal de gens à se poser des questions. Là, personne ne croit vraiment au fait que l’Education nationale apprenne aux enfants à se masturber. C’est moins la folie que ça a été fin 2012 et début 2013″. C’est donc « à froid » que le documentaire revient sur cette « folie ». « Il reste un peu d’amertume, mais le moment de la colère est passé » assure Guillaume Lecaplain. Dans le documentaire, une jeune fille confie : « tout ce que je veux, c’est être heureuse ».
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