Dans son livre Oh, Simone ! sorti en librairie le 29 mai dernier, la journaliste allemande Julia Korbik nous fait découvrir cette figure du féminisme grâce à un ouvrage au ton drôle et pop.
“Et si l’œuvre la plus importante de Simone de Beauvoir était… sa vie ?” Voilà le principe sur lequel s’appuie l’autrice pour nous plonger dans la vie de la philosophe. Entre moments marquants et anecdotes insoupçonnées Oh, Simone ! permet de redécouvrir cette romancière et essayiste féministe. Nous avons sélectionné cinq choses que vous ne saviez (peut-être) pas à son propos. Les voici :
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Une relation compliquée avec sa mère
Le livre s’ouvre sur la présentation de l’univers dans lequel Simone de Beauvoir a grandi. Son père, sa mère, sa sœur… Julia Korbik dresse un portrait de chaque membre de la famille de Beauvoir et nous permet ainsi d’en apprendre davantage les dynamiques familiales. Et c’est incontestablement avec sa mère que la relation est la plus conflictuelle. Françoise de Beauvoir est décrite comme “la très catholique maîtresse de maison” par l’autrice. Elle veut que ses deux filles, Simone et Hélène, soient élevées dans la religion. Mais depuis ses 14 ans, Simone s’est détachée de la religion, ce qu’elle cachera longtemps à sa mère. “Simone supporte mal les critiques de Françoise et le contrôle que sa mère exerce sur elle, sans parler de sa bigoterie”, commente Julia Korbik.
Elle a refusé plusieurs fois de se marier avec Sartre
La journaliste nous plonge dans la relation amoureuse de Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir grâce à une très précise description de la complexité de leurs personnalités. L’on apprend donc qu’à plusieurs reprises, ce dernier a demandé Simone de Beauvoir en mariage. En vain. Après avoir évoqué le sujet au détour de conversations diverses, il se lance une première fois. Celle-ci croit à une blague et refuse. “Simone est surprise, elle ne comprend pas comment Sartre, qui passe son temps à parler de liberté, peut envisager de se marier. Pour elle, le mariage bourgeois est à l’opposé de la notion de liberté, ses parents en sont le parfait exemple”, note Julia Korbik. Pas de quoi arrêter Sartre, dont ce « non » l’aura tout de même blessé. “Ce ‘non’ est un acte radical, le refus clair et définitif d’une vie conforme aux conventions sociales”, note Julia Korbik. Elle souligne qu’une fois rentré de son service militaire, “Sartre propose une dernière fois à Simone de l’épouser”. Et se heurte, une nouvelle fois, à un refus.
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La philosophie était son premier amour
Amoureuse de la philosophie depuis son adolescence, elle décide de devenir professeure et d’enseigner cette matière. Une ambition qui lui a valu d’âpres négociations avec ses parents, pour qui, ce choix-là, était la preuve d’un “échec social”. Mais rien à faire, elle sait ce qu’elle veut, et elle fera comme bon lui semble. “Ce qui m’attira surtout dans la philosophie, c’est que je pensais qu’elle allait droit à l’essentiel. (…) c’est la totalité du réel qu’elle visait ; elle s’installait tout de suite en son cœur et me découvrait, au lieu d’un décevant tourbillon de faits ou de lois empiriques, un ordre, une raison, une nécessité” écrira-t-elle dans Pyrrhus et Cinéas, un essai publié en 1944. Et en effet, elle ne lâcha jamais son premier amour. Plus tard, elle et Sartre s’inscriront dans le courant philosophique existentialiste.
Elle rêvait de découvrir le monde (et l’a fait)
En plus de son amour de la philosophie, Simone de Beauvoir en a un autre : les voyages. Julia Korbik nous immerge dans les envies de parcourir le monde qui animent l’esprit de la philosophe. Il y a un endroit où Simone de Beauvoir a toujours voulu aller : les Etats-Unis. Elle s’y rendra donc en 1947. Un voyage qui s’avérera déterminant dans son engagement contre le racisme en France, notamment à partir de 1954, lorsque la guerre d’Algérie éclate. “C’est la première fois que nous voyons de nos propres yeux cette ségrégation dont nous avons tant entendu parler : quelque chose tombe sur nos épaules qui ne nous quittera plus à travers tout le Sud ; c’est notre couleur de peau qui est devenue lourde et étouffante et dont la couleur nous brûle” écrira-t-elle à propos de ce séjour. Au-delà de cette expédition, lorsque la Seconde Guerre mondiale se termine, elle se rend en Tunisie et en Algérie pour y donner des conférences. Avec Sartre, elle effectue aussi des voyages, avec un but politique. Elle ira notamment à Cuba, en 1960, pour y vivre la révolution cubaine ou encore en Israël, sept ans plus tard, afin de comprendre en profondeur le conflit israélo-palestinien.
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Elle ne s’est pas toujours sentie militante
Simone de Beauvoir devient une véritable icône féministe, notamment avec la parution de son ouvrage Le Deuxième Sexe en 1949, dans lequel elle propose une réflexion philosophique sur la condition des femmes. Pourtant, à ce moment-là, elle ne s’inscrit dans aucun mouvement militant et ne “se considère pas comme féministe”, souligne Julia Korbik. Deux raisons principales expliquent cela : d’abord, “il n’existe pas encore de mouvement féministe (…) avec lequel Simone pourrait travailler”, note la journaliste. Aussi, son adhésion au socialisme de l’époque n’est pas compatible avec un engagement qui placerait l’égalité hommes femmes au cœur de son combat politique. Mais, à partir des années 1960, son implication dans la cause féministe sera de plus en plus importante. Elle présidera Choisir la cause des femmes, en 1971, mouvement de lutte pour le droit à l’avortement et deviendra également présidente de La ligue pour le droit des femmes en 1974, un an avant la loi Veil, qui marque la dépénalisation de l’avortement. “Un certain sentiment de culpabilité vis-à-vis de son indifférence d’autrefois joue sans doute un rôle dans cet engagement désormais inlassable pour la liberté, l’égalité et la justice” analyse l’autrice.
Oh Simone ! (ed. la ville brûle) – Julia Korbik – Julie Tirard (Traduction) – 20.00 € – 288 pages
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