L’adjoint au maire de Paris chargé de la culture évoque la nuit parisienne, le 104, Yves Saint Laurent et son combat pour l’homoparentalité.
Alors, Paris ville morte ? Il y a quelques mois, une pétition signée par 15 000 personnes a dénoncé le fait que la capitale était devenue une cité-dortoir. Comment réagissez-vous ?
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Très bien, parce que c’est faux ! Ce qui est vrai, c’est qu’il règne un climat de tension et d’exaspération. Il y a des problèmes d’insonorisation et de bruit et les gens appellent pour un oui pour un non. Paris, c’est tout petit, on est les uns sur les autres. Je comprends qu’on puisse avoir envie de calme. Mais si dans une ville comme Paris, on ne peut pas être dans la ville, la nuit, dans la joie, il y a un problème. Il y a également un côté “c’est la faute des pouvoirs publics” dans cette pétition qui m’exaspère. Il faut que les gens qui tiennent les lieux se prennent en charge. Beaucoup sont dans la nostalgie des années 80, comme ils l’ont dit dans leur communiqué. Moi, j’ai la nostalgie des années 2030. Ma mission, c’est de favoriser la jeune création.
Comment fait-on de la culture en période de crise ?
C’est la crise, mais on n’est pas dans une friche. Paris possède énormément de conservatoires, de bibliothèques. Et nous allons en créer davantage. Ce n’est peut-être pas très sexy, mais cela donne aux jeunes le goût de la musique, de la lecture, des nouvelles technologies, du théâtre et de la danse. Des lieux s’ouvrent, d’autres sont rénovés : le Centre musical Fleury Goutte d’Or-Barbara, Les Trois Baudets et la Gaîté lyrique, fin décembre. Le lieu, magnifique, accueillera de la musique électronique, des arts numériques mais pas seulement.
On vous a souvent reproché de faire une politique-vitrine autour de gros événements tels que Nuit blanche ?
Il faut aussi regarder le travail en faveur de la lecture publique, des conservatoires. De plus, le spectaculaire n’est pas forcément éphémère. Nuit blanche, ce n’est pas des paillettes : entre 500 et 1 000 artistes y montrent leur travail et profitent de cette occasion pour se faire connaître. Vingt-cinq villes dans le monde reprennent cet événement : Paris fait plutôt envie. On travaille aussi sur une nuit du cinéma.
Peut-on parler d’échec pour le 104 ?
Un an et demi après son ouverture, il manque encore de lisibilité artistique… Ce lieu, Bertrand Delanoë l’a sauvé et voulu. Il n’est pas achevé. C’est un endroit phénoménal. Personne au monde n’a jamais fait d’une surface de 40 000 mètres carrés avec une halle de cette importance un lieu artistique semblable. Les architectes n’ont pas vraiment imaginé un lieu de vie. On aurait pu le penser à taille plus humaine. Je préfère que les défauts éclatent aujourd’hui mais que l’on puisse corriger la copie. C’est pour ça que c’était bien de se séparer maintenant des deux anciens directeurs. Leur utopie d’un lieu dominé par le vide et le silence n’est pas acceptable du point de vue de l’argent public. Nous voulons la foule, que le 104 soit vivant, avec du cirque, un marché chinois. Que cela devienne une cité de la création et de la vie, pas un endroit contemplatif. Je rencontre actuellement les candidats à la nouvelle direction.
Vous avez bien connu Yves Saint Laurent. Que pensez-vous de l’exposition au Petit Palais ?
Quand, en 1983, j’ai accompagné Yves Saint Laurent pour organiser son exposition au Metropolitan de New York, c’était révolutionnaire. Saint Laurent était un non-conformiste. Je suis sûr que s’il était vivant, il aimerait être exposé dans un lieu comme le 104. Le Petit Palais, c’est très beau, mais très convenu. Saint Laurent entre dans l’art pompier, ce qui est un non-sens. C’est le problème des veufs ou veuves qui gèrent l’héritage pour protéger. Pierre Bergé gère cet héritage avec délicatesse, mais je pense qu’il aurait fallu un lieu plus moderne et décalé.
Vous avez pris position pour l’homoparentalité avec votre livre Père comme les autres. Aujourd’hui, la situation semble bloquée…
Quand je pense que le président de la République et Nadine Morano ont reculé sur le statut de beau-parent ! Quelle bêtise ! Les juges rendent des jugements en faveur de ce statut. Je vois de plus en plus d’homos parents. Dans la réalité, les gens s’organisent. Il y a un décalage avec une classe politique qui se regarde trop le nombril pour pouvoir aider la population. C’est la France, ça. Moi, je suis pour le statut de beau-parent, et le mariage. A titre personnel, je n’ai pas envie de me marier, mais je veux avoir le choix. J’en ai marre qu’on pense à notre place.
Photo : Renaud Monfourny
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