Puissante productrice de télévision et tête chercheuse du PAF, Catherine Barma a décidé de sortir de son silence. L’occasion de revenir sur les dernières polémiques autour de son émission, « On n’est pas couché » mais aussi sur Maïtena Biraben qu’elle n’épargne pas. Interview.
Comment choisissez-vous vos invités ?
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Catherine Barma – Tous les invités qui participent à On n’est pas couché (ONPC) sont au cœur de l’actualité. Michel Onfray a été reçu car il faisait la une de Libération. Ce sont ces journalistes qui ont parlé de lui comme d’un réactionnaire, de cet homme qui était à gauche et qui aurait désormais des idées proches de celles de l’extrême droite. Quatre pages plus la une, il était évident qu’on devait le recevoir. Michel Onfray a accepté de venir car il savait qu’il aurait un temps de parole important, il a refusé tous les autres médias. Alain Finkielkraut est venu à l’occasion de la sortie de son livre (La Seule Exactitude, Stock), après avoir été reçu par France Inter. Finalement, nous faisons exactement la même programmation que tous les autres.
Est-ce parfois difficile de les convaincre de venir ?
Certaines personnalités n’aiment pas se plier à ce type d’exercice et préfèrent répondre à une interview en face d’un journaliste, de manière plus académique. Ils se sentent plus à l’aise, ce que je peux comprendre. ONPC, c’est une agora, c’est un peu comme faire une conférence pendant une heure tout en répondant aux questions de Laurent Ruquier, Léa Salamé et Yann Moix. Ils sont là pour obtenir des réponses sur les différents propos qu’ont tenus ces personnalités ou les idées qu’elles viennent défendre.
Que recherchez-vous chez vos chroniqueurs ?
Afin que ce ne soit pas répétitif, il faut deux pensées différentes. Jusque-là, on avait toujours un penseur de droite et un penseur de gauche. Cette année on a décidé de faire un duo avec une journaliste qui n’affiche pas de couleur politique, et quelqu’un qui a une position culturelle affirmée.
En mars dernier, Laurent Ruquier a confié regretter d’avoir gardé Eric Zemmour comme chroniqueur d’ONPC pendant près de cinq ans, vous êtes aussi de cet avis ?
Je n’irais pas jusque-là, mais disons qu’il y a eu le premier Zemmour, qui a été reçu partout et qui a été chroniqueur d’ONPC. Et au bout de cinq ans, voyant la société évoluer vers cette dérive très droitière, on s’est dit que garder quelqu’un comme Eric Zemmour dans cette émission, ça faisait trop. Il fallait passer à autre chose.
Cela fait maintenant plus de 20 ans que vous travaillez avec Laurent Ruquier, pourquoi lui faites-vous toujours confiance ?
Ruquier, c’est un talent indéniable. Il a la spontanéité, la culture et la curiosité. Il a une manière très différente de poser les questions par rapport aux journalistes, il n’est pas conventionnel. C’est quelqu’un de sincère qui dit ce qu’il pense.
On vous surnomme la « tête chercheuses du PAF » (vous avez découvert Jean-Luc Lemoine ou encore Florence Foresti), pourquoi vous intéressez-vous autant aux humoristes ?
J’aime les humoristes qui nous font rire avec les travers de la société tout en dénonçant des choses. C’est pourquoi j’adore Patrick Timsit. En ce moment, j’aime beaucoup Alex Vizorek et Charline Vanhoenacker sur France Inter. Ils décryptent l’actualité avec humour et posent les problèmes en apportant du fond. Ils tiennent des propos dans lesquels je me reconnais finalement.
Que pensez-vous des accusations qui vous ont été faites récemment selon lesquelles vous contribueriez à la spectacularisation de la vie politique ?
Je m’oppose totalement à ça, ce sont de fausses intentions qui n’ont pas de raison d’être. Certaines personnes ne veulent retenir que les clashs. Depuis que l’émission existe, il y a dû en avoir à peine une dizaine. Mais par contre, personne ne parle du passage de Jean-Christophe Cambadélis ou de Cécile Duflot. Et le jour du drame de la Côte d’Azur, Libération est le seul à titrer sur ONPC, car ils pensent que cela fait vendre. Ce n’est pas la réalité de l’émission. Sur le plateau, chaque invité a plus d’une heure de temps de parole, ils ne peuvent pas faire de langue de bois. Quand Nadine Morano parle de la France comme un pays de “race blanche”, elle s’est exprimée pendant trente-cinq minutes avant d’en arriver là. En réalité, les journalistes s’emparent de la séquence de cinq minutes. Je ne vais pas cracher là-dessus certes, mais ceux qui nous font des reproches sont ceux qui créent l’emballement médiatique. Notre émission cherche simplement à décrypter l’actualité.
Quand Maïtena Biraben dérape au Grand Journal, c’est différent. Cela révèle peut-être simplement un manque de culture de sa part, mais cela ne devrait pas arriver de la part d’une présentatrice.
Pourquoi ONPC marche-t-elle aussi bien ?
C’est une émission qui reflète la société, dans laquelle l’animateur et les deux chroniqueurs disent ce qu’ils pensent et les gens en face réagissent comme ils peuvent. Ce n’est absolument pas académique, tout est authentique.
Que pensez-vous de l’arrivée de Delphine Ernotte à la tête de France Télévisions et de son cap sur le numérique ?
Je pense aussi que le deuxième écran est très important, bientôt, les gens ne regarderont plus la télé sur l’écran plat. Aujourd’hui, il y a toute une population jeune et très active qui ne regarde les médias que sur leur smartphone ou leur tablette. Il faut imaginer des programmes qui collaborent avec les réseaux sociaux, étant donné qu’ils sont au cœur de la société. Tout cela demande, bien sûr, une nouvelle approche et une nouvelle écriture. Mais je suis convaincue que l’avenir doit s’envisager sur le numérique.
Qu’est-ce que la télévision doit apporter aujourd’hui ?
La télévision doit créer du lien social. La culture est souvent présentée de manière négative et ennuyeuse. Aujourd’hui, on voit bien que la jeunesse dénonce beaucoup de choses à travers le rap et les films tournent de plus en plus autour du thème de l’identité. Le défi est d’arriver à toucher une population plus jeune tout en créant du lien social grâce à la culture. Les jeunes ont besoin de se reconnaître dans une émission qui parle d’eux d’une autre manière.
Pour cela il est nécessaire de créer des programmes beaucoup plus ludiques avec des artistes de tous bords, des reportages, des mises en situation et des débats en laissant la jeunesse s’exprimer. En ce qui concerne l’actualité, ce que fait le Petit Journal est formidable par exemple.
Propos recueillis par Fanny Marlier
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