Les Bruxellois ont observé une minute de silence, ce mercredi, en hommage aux victimes des deux attentats. Rencontre avec des personnes à qui la chance a souri, parce qu’elles devaient être sur place au moment des explosions. Et avec d’autres, qui réclament des mesures beaucoup plus sévères pour éviter de nouveaux drames.
Marceau a le sentiment qu’il aurait pu mourir hier. Ce juriste de 58 ans participe, aux côtés de plusieurs centaines de personnes, à la minute de silence organisée au pied du bâtiment de la Commission européenne. Il a les larmes aux yeux lorsqu’il évoque ce qu’il s’est passé la veille. « Je prends le métro tous les jours à Maelbeek, à 9h15 précisément. Hors hier, j’ai eu cinq minutes de retard, ça aurait pu être mon tour ». A l’entrée de la station de métro, il a vu de l’agitation. « Une dame m’a dit : ‘Ne descendez pas, il y a eu une bombe dans le métro !’. Pour autant, Marceau ne veut pas changer ses habitudes. « Il ne faut pas être paralysé par la peur, ne pas donner le pouvoir aux terroristes ».
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Pendant l’hommage, Dominique brandit un petit panneau « Je suis Bruxelles, une fois ! » à bout de bras. Son message est un clin d’œil à « je suis Charlie » et aux Français « qui ont été parfois injustement critiques à l’égard de la Belgique et de ses enquêteurs ». Il est arrivé à l’aéroport de Zaventem, tout juste après les explosions. « Je buvais un café avec un ami avant de venir à l’aéroport et on a un peu traîné, heureusement ». Sur les lieux de l’attentat, il est venu en aide à un blessé. « J’ai vu un homme en sang. Je l’ai pris avec moi et emmené à l’hôpital ».
Dominique, qui est chauffeur auprès d’une institution européenne, se dit « épuisé psychologiquement ». « Il y a eu Charlie Hebdo, les attaques à Paris et maintenant Bruxelles. Il va falloir vivre différemment, mais ne pas changer nos habitudes ».
Des conducteurs de métro « effondrés »
A quelques pas de là, Pilar tient une pancarte aux couleurs du drapeau colombien, avec l’inscription « Colombia amor Bruselas », la Colombie aime Bruxelles. Ainsi qu’un petit drapeau belge affublé d’un smiley en pleurs. « Hier, heureusement, j’étais en congés. Car d’habitude je prends le métro à 9 heures, à Maelbeek ». Il y a plusieurs années, Pilar a fuit la Colombie, « à cause du terrorisme. Maintenant, j’ai l’impression de revivre la même chose ici, en Europe ». Pour elle, l’Europe était synonyme de droits et de liberté.
Minute de silence également sur la Place de la Bourse, au cœur de Bruxelles. Brahim, la cinquantaine, a accroché sur sa veste un drapeau belge et un autre marocain. Sa voix tremble lorsqu’il évoque les attentats de la veille. « Je suis conducteur de métro, et je passe plusieurs dizaines de fois par jours à la station Maelbeek ». Il a pris le temps de discuter longuement avec ses collègues, « tous effondrés » . Malheureusement, « on est unis dans le sang car certains terroristes sont maghrébins. Moi aussi, je suis musulman, maghrébin. Mais j’ai honte ».
Moins de liberté et plus de policiers
Majid, Pakistanais naturalisé belge, réclame lui aussi l’intransigeance: « Je suis venu vivre ici car j’aime la culture européenne. J’ai quitté le Pakistan parce que je veux être libre. L’Etat a laissé trop faire. On diffuse des livres religieux dangereux sans rien dire. Il faut être beaucoup plus dur, au nom des droits de l’homme ». Sa famille et lui vivent à Molenbeek, depuis plus de quinze ans. « Ma femme voudrait qu’on déménage, pour fuir cette atmosphère ». Il estime que la situation actuelle est à appréhender de manière plus globale. « Vous savez ce qu’on vit ? Le début du choc des civilisations ».
Jamila, elle, réclame plus de sévérité de la part des autorités. « Il y a trop de libertés. Je voudrais qu’on reste pour toujours en alerte 4. Il faut moins de libertés et plus de policiers ». Cette « Belgo-Marocaine » habite près de Maelbeek. Voilée, elle a noué autour de son coup le drapeau belge. Très émue, Jamila s’indigne des actes terroristes : « Un jour, ils tueront leurs pères, leurs mères, leurs frères, leurs sœurs. Les gens morts hier, c’est nous.”
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