Qu’est-ce que veut dire être l’avant-garde de la Révolution ? C’est la question que pose le documentaire de Stanley Nelson (2015) retraçant l’histoire des Black Panthers, projeté ce mercredi 18 Janvier à la Gaité Lyrique à Paris.
Benoît Hické, co-commissaire du festival de cinéma et pop-culture de la Gaité Lyrique FAME, poursuit son cycle de projections Le Tour du jour – nouveaux territoires documentaires avec le film The Black Panthers : Vanguard of a Revolution. Un choix qui semble opportun, alors que Barack Obama quitte la Maison-Blanche et qu’un homme incarnant la suprématie blanche prend sa place.
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http://www.youtube.com/watch?v=F56O3kZ9qr0
Le film, présenté ici en version sous-titrée pour la première fois, dévoile quelques pans de l’histoire de ce parti mythique, de sa création en 1966 en Californie, en passant par ses actions les plus marquantes (le Ten Points Program ; le Free Breakfast for Children ou encore le mouvement Free Huey) jusqu’à son effondrement (principalement dû aux manipulations du FBI et aux dissensions au sein du groupe), alternant images poignantes, parfois violentes, et archives et interviews contemporaines de certains de ses membres.
Le parti des Black Panthers est apparu dans une période d’ébullition, alors que près de cinquante pays se battaient pour leur indépendance et que la guerre du Vietnam s’enlisait. Comment répondre à la violence policière, institutionnelle, politique que subissaient les communautés noires aux Etats-Unis ? Comme une panthère. Comme l’explique un membre du parti interviewé dans le documentaire de Nelson, une panthère, si elle est attaquée, va d’abord reculer, tenter de se protéger, mais si les assauts contre elle continuent, elle va finir par se défendre, par répondre à la violence par la violence. Elle incarne le “Black Power”.
Une attitude, un style, un rythme
Mais le documentaire met surtout l’accent sur ce qu’il y avait de profondément révolutionnaire dans ce mouvement organisé, dans ce qu’il a pu signifier pour la jeunesse américaine, pour une radicalité militante et pour la contre-culture en général . Le Black Panther Party for Self-Defense était révolutionnaire politiquement et culturellement. Les Panthères se qualifiaient elles-mêmes d’ “avant-garde”, elles voulaient incarner un modèle activiste que toute la communauté noire américaine pourrait reconnaître, puis suivre.
Akua Njeri (Deborah Johnson), militante du parti, décrit comment les Black Panthers ont inventé une façon de s’habiller (les afros et les manteaux en cuir), de marcher, de parler, d’occuper l’espace public. Ils n’ont pas inventé l’idée du “Black is beautiful” mais celle du “Urban Black is beautiful”, une attitude particulière, reconnaissable. Ils étaient “étonnants”. Alliant lutte contre la white supremacy et le capitalisme, les Black Panthers ont su jouer avec leur image et utiliser les médias qu’ils effrayaient pourtant.
La lutte des Black Panthers a trouvé de nombreux échos dans l’actualité politique américaine contemporaine, avec notamment le mouvement Black Lives Matter. L’héritage du parti – ou l’hommage au parti ? – réapparait aussi dans ce qu’on appelle le “féminisme pop” de Beyoncé qui a interprété son titre Formation au Super Bowl de 2016, non sans remuer, voire effrayer les foules. Certainement qu’un aussi bel alliage de politique et de culture ne manquera pas d’inspirer les luttes à venir, qui risquent d’être nombreuses.
Mercredi 18 Janvier à 19h30 à la Gaité Lyrique, 3, bis rue Papin, Paris IIIe. La projection sera suivie d’un débat sur l’actualité de ces luttes avec Pap Ndiaye, professeur à l’institut d’études politiques de Paris et spécialiste d’histoire sociale des Etats-Unis.
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