“D’où tu parles ?” Lorsque l’injonction, classique dans l’art d’engager une conversation, s’efface, la confusion des sentiments affleure. Cette confusion a gagné ces dernières semaines des milliers d’auditeurs de France Inter, désarçonnés par les paroles absurdes et pathétiques de deux animateurs, deux docteurs “mabouls” censés conseiller des gens à bout sur la meilleure manière de […]
“D’où tu parles ?” Lorsque l’injonction, classique dans l’art d’engager une conversation, s’efface, la confusion des sentiments affleure. Cette confusion a gagné ces dernières semaines des milliers d’auditeurs de France Inter, désarçonnés par les paroles absurdes et pathétiques de deux animateurs, deux docteurs “mabouls” censés conseiller des gens à bout sur la meilleure manière de s’en sortir.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Mais lorsqu’un auditeur demande par exemple comment soigner un herpès labial, le docteur Philippe de Beaulieu l’invite à se couvrir la lèvre d’une épaisse couche de crème à la cortisone. Une plainte fut déposée par un vrai médecin ulcéré, après des milliers de lettres d’exaspération d’auditeurs, qui ont fait de l’émission A votre écoute, coûte que coûte un cas modèle à la fois de buzz médiatique et d’ambiguïté comique.
Mais comment des auditeurs ont pu croire aussi longtemps (peut-être encore aujourd’hui pour certains) à une telle imposture ? Peut-être parce que précisément les gens croient à ce qu’ils entendent, plus encore qu’à ce qu’ils voient.
L’histoire des impostures et canulars radiophoniques, d’Orson Welles à Jean-Yves Lafesse en témoigne. Les voix des deux comédiens, Zabou Breitman et Laurent Laffite, qui avaient déjà joué sur scène un spectacle fondé sur ce dispositif, ont réactivé une vieille loi radiophonique : sans écran, sans corps, les identités se masquent et se travestissent dans un jeu de rôles dont on peut faire n’importe quoi, y compris suggérer le pire de la bêtise humaine. Glauque pour les uns, hilarant pour d’autres, selon la manière dont chacun affronte l’ambiguïté et le louche, Coûte que coûte vaut cher pour qui s’intéresse aux mystères des sons et des cons.
Jean-Marie Durand
{"type":"Banniere-Basse"}