La réunion de la food et de la culture : la dernière édition de l’émission Dans le Genre de invite Bertrand Grébaut, chef étoilé à 26 ans à la tête de trois établissements parisiens, dont le restaurant Septime. Virilité, féminité, machisme et parité pêle-mêle, mijotés une heure sur Radio Nova.
“Bertrand Grébaut, est-ce que vous vous trouvez viril ?” Réponse : « Je ne m’y attendais pas ! Je ne sais pas… Oui.” Ainsi commence l’interview Dans le Genre de Bertrand Grébaut, chef étoilé des restaurants Septime, Septime La Cave et Clamato. Un voyage à travers ses conceptions du genre et des libertés, dans sa vie ou sa cuisine. De ses parents, une mère historienne de l’art et un père cadre commercial au “métier d’agent secret”, on ne saura que peu. Mis à part peut-être le côté “nourricier” de sa mère, et l’ambiance de son foyer : “très culture et bouffe”.
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Une enfance heureuse en somme, avec de grands changements à l’adolescence, et des références dans la pop culture qui le marquent. En dehors même de notion de genre, c’est Kurt Cobain qui devient une des figures du cuisinier : “Kurt, c’était le côté destroy. On a l’impression qu’on commence à comprendre quelque chose à la vie quand on écoute Nirvana, qu’on a 15 ans, des chtars sur la gueule et des cheveux longs. (…) Après on était très naïf, on avait pas idée de ce que c’était le quotidien. Je pense qu’il avait une sensibilité exacerbée qui peut rappeler celle d’un gamin qui se cherche.”
Graff, hip-hop et virilité
Mais les références culturelles ne s’arrêtent pas là. Si le hip-hop français connaît ses prémices et son apogée dans les années 90, ce sont les mouvements culturels qui l’entourent qui fascinent Bertrand Grébaud : “J’ai mis un doigt dans l’engrenage du graffiti et ça m’a donné de l’adrénaline. Je me suis jeté corps et âme là dedans et y avait des figures du milieu inconnues du public qui nous fascinaient.” L’underground et le hip-hop, des milieux où la virilité compte.
Pour autant elle est une notion, non pas étrangère, mais étrange au chef du Septime, qui en parle en ces termes : “La virilité c’est répondre à des standards : avoir une grosse voix plutôt qu’une petite voix, avoir des gros muscles plutôt que des petits muscles. Je pense que c’est quand même un truc à moitié inventé par des gens qui ont quelque chose à prouver.” Il poursuit : “Le concept de virilité c’est vraiment un truc un peu arriéré non ? Je sais pas ce que c’est qu’être viril. Je pense qu’il y a une vraie distinction entre les hommes et les femmes d’un point de vue… Je ne sais pas… de la force physique ? Mais après ça… ”
Le sexisme des brigades
La notion de virilité est encore plus intéressante sous le prisme de son expérience dans les métiers de la cuisine : “Le problème c’est peut-être l’emploi du mot masculin et féminin. Parce qu’en soi c’est vrai qu’il y a des cuisines plus ou moins sensibles, délicates, « bourrin ». Je suis en couple avec une cheffe et elle fait une cuisine plus masculine que moi. Si on emploie les standards de l’époque, ma cuisine est plus féminine.”
En effet, le sexisme dans les brigades de cuisine est un souci souvent relevé, qui prend ses sources dans l’origine même du métier selon Bertrand Grébaud : “Je trouve que c’est un métier d’ouvrier et c’est pour ça qu’il est dur et long à féminiser ; c’est pour ça qu’il n’y a pas que des intellectuels : on fait pas que de la cuisine par passion (…). C’est aussi pour ça que cela prend du temps et que les mentalités sont plus difficiles à changer que dans les milieux intellos, et ce n’est pas péjoratif, c’est la vie.”
Sur son lieu de travail toutefois, le genre a peu de place face à l’efficacité et les compétences de ses brigades : “Je ne suis pas pour la parité, j’embauche les gens compétents, un point c’est tout. Aujourd’hui j’ai autant de filles que de garçons qui postulent – et j’ai même 60% de filles en salle et en cuisine, mais ce sont des filles compétentes, pas des quotas.”
Enfin, sur la trame de son expérience en cuisine, ponctuée d’anecdotes sur son quotidien, la conversation évolue sur les libertés individuelles en termes de genre dans la société. Actualité oblige, les comportements de violences faites aux femmes sont évoquées. Pour conclure sur ce sujet, Bertrand Grébaud résume :
“Il me semble que ces gens qui se comportent comme des porcs et bénéficient de ce modèle macho qu’ils ont construit toutes ces années sont les mêmes que ceux qui bloquent l’évolution de plein de choses. Si on veut aller dans le sens de la nature et de l’humain, on est évidemment pas sexiste. Sans faire de complotisme ou de de la rébellion à deux balles, les mêmes qui nous empêchent de convertir notre agriculture, de respecter la nature sont les mêmes qui ont besoin de cette société patriarcale de profits… et c’est tout ça qui doit exploser.”
Découvrez l’intégralité de Dans le Genre avec Bertrand Grébaut ici.
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