A travers ses apparitions à la télévision, le corps lisse du Cavaliere est l’image vide du corps politique.
En déclarant à travers un large sourire qu’il vaut « mieux aimer les jolies filles qu’être gay », Silvio Berlusconi perpétue le rôle qu’il s’est construit depuis des années : celui d’un chef imposant au peuple sa « tyrannie de l’intimité ».
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Acculés à partager ses affects homophobes et ses exploits sexuels, les citoyens italiens ont trouvé en Berlusconi le sinistre héritier de Mussolini dans le soin obsessionnel porté à dessiner son image, à sculpter un « corps de chef ».
C’est sous cet angle sémiologique que l’auteur italien Marco Belpoliti analyse la singularité politique du Cavaliere dont l’éclipse semble annoncée depuis que son allié Gianfranco Fini a décidé de le lâcher.
Le thème du corps a toujours dominé le centre même de sa politique quotidienne à travers ses gestes, ses actes, ses postures, ses tenues… Ce corps du chef est un corps postmoderne, un « corps médiatique » qui « ne répond plus aux rituels traditionnels de la représentation » et qui « n’a de sens que par rapport à son existence matérielle ».
Son pouvoir corporel existe et prospère dans l’ostentation de ses propres signes. Belpoliti revient sur les mécanismes de construction de ce corps-icône qui prend appui sur la représentation photographique et télévisuelle.
Tout chez lui est mis en scène, « simulacres et simulation », pour reprendre le titre d’un essai de Baudrillard.
« La télé a porté jusqu’à ses extrêmes conséquences la production de l’espace simulé à l’intérieur duquel nous vivons aujourd’hui« , insiste l’auteur.
Présentateur et manager : tels sont les motifs iconiques de ce corps « berlusconique » qui invente une « érotique » glauque, une image vide du corps politique. Berlusconi « a introduit le vide au coeur de l’image« . Ce vide continuera-t-il à nourrir sa gloire ?
Jean-Marie Durand
Marco Belpoliti, Berlusconi, le corps du chef (Lignes), 185 p, 16€
{"type":"Banniere-Basse"}