Ce matin, Berlin s’est réveillée sous le choc de l’attaque perpétrée la veille au soir. Ce qui devait être un rendez-vous festif pour une foule de visiteurs de la capitale allemande ainsi que de Berlinois s’est transformé en un cauchemar. Instantanés d’une ville meurtrie.
Comme à Nice le 14 juillet, un camion fou a fauché volontairement des dizaines de personnes qui se pressaient au marché de Noël de la Gedächtniskirche, l’église du Souvenir, l’un des monuments les plus emblématiques de la capitale allemande, qui porte encore les traces des bombardements subies par la ville durant la dernière guerre et symbolise la volonté de mémoire des Berlinois.
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En l’espace de quelques instants, la musique de Noël a laissé place à des scènes de désolation et de chaos. Repris par le Berliner Morgenpost, plusieurs témoignages font état de la violence de la scène qui vient de se dérouler. Un homme raconte : “Le camion est directement arrivé de la rue Kant sur la Breitscheidplatz. C’était un geste forcément volontaire, il n’avait aucune lumière allumée. Et ensuite je n’ai plus entendu que les bruits de casse et des cris hystériques.”
Une femme, visiblement en état de choc, et attendant d’être entendue par la police, peine à trouver ses mots en décrivant la scène : “Il y a eu tous ces bruits très forts, puis quelqu’un m’a tirée par le bras et je n’ai plus entendu que des cris. Quelqu’un a été couché au sol juste à côté de moi, et j’ai couru.”
“En plein cœur”
Sur la chaîne de télévision Deutsche Welle, c’est un réfugié syrien qui décrit, lui aussi, les scènes de désolation auxquelles il a assisté :
“On voulait juste boire un verre. Puis, on a entendu un bruit de verre brisé, des gens pleurer, crier, certains avec du sang sur le visage, d’autres étaient évanouis. […] On essayait de demander aux gens autour de nous ce qui se passait, mais personne ne voulait répondre, tout le monde était sous le choc. On savait qu’il y avait ce camion qui a écrasé les gens. […] Pour moi c’est terrible, j’ai fui tout ça et je ne peux pas croire que quelqu’un ait délibérément pu faire une chose pareille.”
Cette incompréhension face à l’horreur qui vient de frapper l’Allemagne est relayée dans les médias. Le Berliner Zeitung a titré ce matin “En plein cœur”, tandis que les images des débris du camion ont été placardées sur toutes les unes.
Angela Merkel, qui n’avait jusqu’à aujourd’hui que présenté des condoléances par le biais d’un communiqué, a ce matin condamné ce qu’elle qualifie désormais d’attaque terroriste. Devant la presse, elle a affirmé que le coupable serait “puni avec les armes les plus sévères dont nous disposons”, et que le peuple allemand “ne vivrait pas paralysé par la peur du mal”.
Cette attaque est la plus grave perpétrée sur le sol allemand et fait suite à une succession d’autres actes isolés, comme la vague d’attaques de juillet dernier et les arrestations in extremis de deux candidats au suicide, le premier un jeune homme d’une vingtaine d’années en octobre dernier en Saxe, le second âgé d’à peine de 12 ans ayant tenté de faire exploser une bombe à clous au marché de Noël de Ludwigshafen.
Merkel face aux critiques
Pourtant, si chaque attaque soulève davantage de questions quant aux moyens mis en œuvre pour assurer la sécurité de tous en Allemagne, les Berlinois semblent aujourd’hui faire face avec pragmatisme. Ce matin, dans les transports en commun de la capitale allemande, et autour de l’église du Souvenir, la vie semble déjà reprendre son cours.
Autre ton cependant sur les réseaux sociaux, où dès hier soir une déferlante xénophobe a rapidement évoqué une attaque islamiste causée par la politique d’accueil des réfugiés d’Angela Merkel. Quoique toujours populaire dans les sondages, la chancelière est ainsi tenue pour responsable directe de cette attaque, tout comme des précédentes, par ses détracteurs de plus en plus nombreux.
Ainsi, au-delà des éclaircissements qu’il faudra apporter sur les événements d’hier, les autorités auront également à gérer cet antagonisme de plus en plus prononcé en Allemagne, entre une partie de la population qui soutient son gouvernement et la politique d’immigration portée par la chancelière envers et souvent contre tous, et une frange grandissante de citoyens qui plaident pour un protectionnisme à l’égard des réfugiés, censé protéger de nouvelles attaques islamistes, protectionnisme d’autant plus illusoire que la perméabilité des frontières, permettant la libre circulation des personnes bien avant la crise des réfugiés, l’a rendu caduc.
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