Bilan documentaire de l’action de Barack Obama. Les ombres et lumières d’un président qui avait soulevé les plus grands espoirs et n’a réalisé qu’une seule de ses promesses électorales : l’assurance-maladie pour tous.
“Barack Obama est l’un des hommes qui, en 2008, a suscité le plus grand espoir des trois dernières décennies, dans son pays, mais aussi dans le monde entier. Fin 2009, alors qu’il n’avait tenu aucune de ses grandes promesses de campagne, nous nous sommes demandé comment les attentes immenses qu’il avait suscitées avaient pu aboutir à une telle déception”, explique Norma Percy, réalisatrice en chef de cette série documentaire de près de quatre heures qui fait le bilan des huit années de pouvoir d’Obama, le premier président noir à la Maison Blanche.
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Si aux Etats Unis, la crise économique de 2008 a été jugulée et la loi sur l’assurance-maladie pour tous, alias “Obamacare”, été votée en 2010, on ne peut pas dire que l’administration Obama ait accompli des progrès fulgurants.
Intolérance et droitisation
La série, à l’américaine, est un mélange d’actualités télévisuelles et d’interviews des principaux acteurs de la politique et du gouvernement américains. Y compris Barack Obama lui-même, qui commente sobrement son action. Autrement dit, ce n’est pas un documentaire à charge. Mais il conserve une relative objectivité et, sans forcer, dispense un bilan plutôt mitigé sur ces deux mandats présidentiels successifs.
Ce qui frappe peut-être le plus est la situation impossible du président américain, son impuissance chronique face à un Congrès contrant constamment ses propositions et décisions. On perçoit également en filigrane la montée de l’intolérance aux Etats Unis et la droitisation du pays, dont la candidature Donald Trump est l’aboutissement.
Les deux premiers épisodes, Yes we can et Le Plus Beau jour du Président, sont uniquement consacrés à la politique intérieure. Ils permettent de constater que dans le fond Obama n’a pas un grand poids dans son propre pays. Arrivé à la Maison Blanche en 2008 au moment d’une des pires crises économiques, il renflouera les banques, en cédant aux pressions de Wall Street. Si l’économie redresse la tête, ce n’est pas dû à une politique avisée. On a assisté plutôt à un phénomène mécanique que le gouvernement américain n’a fait qu’accompagner sans rien nationaliser comme ça avait été envisagé un temps. Le bilan des 100 premiers jours d’Obama sera assez médiocre : il n’est même pas arrivé à faire fermer la prison de Guantanamo où des hommes sont incarcérés sans jugement – ce qui faisait partie des promesses de sa campagne électorale.
La victoire à la Pyrrhus de l’Obamacare
Le deuxième épisode est exclusivement consacré à son autre grande promesse électorale : l’assurance-santé pour tous. Branle-bas-de-combat dans tout le pays, dont une partie est hostile à ce que certains taxent de mesure socialiste, et dont on craint qu’elle ruine l’économie nationale. La loi sera finalement votée en 2010 in extremis et a minima (avec divers aménagements).
Une victoire à la Pyrrhus pour Obama, qui pavoise néanmoins. Mais cette Sécurité sociale à l’américaine est loin d’être entrée dans les mœurs actuellement et connaît de nombreux dysfonctionnements.
L’épisode 3, La Guerre à reculons, montre comment parallèlement aux divers Printemps arabes qui désorganisent encore davantage le Moyen Orient et engendrent le chaos, les Etats-Unis vont redoubler leur action guerrière. On ne parle même pas des guerres d’Afghanistan (2001-2014) ni de celle d’Irak (2003-2011) qui s’achèveront sans que les Etats-Unis aient rien réglé.
“No I can’t”
Obama recevra le prix Nobel de la Paix en 2009, avant de se lancer dans de nouveaux conflits, en Libye puis en Syrie, qui ne feront rien pour éteindre le feu aux poudres qu’avait mis le gouvernement de George W. Bush. Le deuxième mandat d’Obama, réélu en 2012, justifie le titre-sanction du dernier épisode : No I can’t. L’Obamacare est toujours contesté par une frange de l’opinion. Le massacre de Sandy Hook en décembre 2012, où 20 enfants sont assassinés par un jeune homme de 20 ans relance le débat sur le contrôle des armes à feu aux Etats Unis. Obama se démène comme un diable pour faire adopter une loi restrictive par le Congrès américain. Mais hélas, celui-ci a viré encore plus à droite lors de son deuxième mandat, et c’est l’échec total. Les Américains peuvent continuer à s’entretuer sans complexes.
Quant à la réforme de l’immigration, consistant à régulariser des immigrés sans-papiers, Obama ne l’obtient qu’en passant outre le veto Congrès. Mais cela sera tempéré par l’expulsion de deux millions d’illégaux.
En conclusion, Barack Obama, homme de bonne volonté, élégant et avenant, n’a pas réussi grand-chose. Sous sa houlette, la violence a redoublé au Moyen-Orient, mais aussi dans son propre pays. Certes, l’économie s’est à peu près stabilisée et une légère forme de prospérité est revenue. Mais, pour reprendre sa comparaison, en tant que “coureur de relais” passant le témoin au suivant, on n’a pas l’impression qu’il ait “gagné du terrain”.
Les Années Obama Série documentaire de Norma Percy, Paul Mitchell, Sarah Wallis, Delphine Jaudeau, Mick Gold, mardi 4 octobre, 20 h 55
Arte
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