Récemment apparu sur Twitter, le #BalanceTonHosto est devenu le nouveau cri de ralliement des soignants, écœurés par les absurdités administratives et économiques qui entravent leurs missions.
Mauvaise organisation, locaux dégradés, conditions de travail difficiles… Depuis le début du mois de janvier, de nombreux témoignages du personnel hospitalier révèlent sur Twitter les dysfonctionnements des CHU français derrière le #BalanceTonHosto.
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Absurdités en chaîne
« J’ai dû tomber sur un truc absurde au travail, et, au lieu de rager dans mon coin, je me suis dit que j’allais en faire profiter Twitter, sur le ton de l’humour », raconte François, médecin hospitalier à l’origine du mouvement, à France Info. « Le côté provocateur de #balancetonhosto n’est pas complètement anodin, mais je n’étais pas dans l’idée d’une dénonciation. Plus une structure est grosse, plus il y a de dysfonctionnements », explique-t-il.
Bon je tente le # de l'humour ! Balance les absurdités de ton hopital #BalanceTonHosto pic.twitter.com/cR30xi5e8f
— Doc Primum – Dr François Morel (@docprimum) January 12, 2018
Le praticien qui anime également une chaîne de vulgarisation médicale sur Youtube, tient néanmoins à distinguer son initiative d’un « hôpital bashing », insistant auprès de nos confrères sur la dimension humoristique du hashtag qui pointe « les incohérences fonctionnelles (…) qui dénotent un manque de bon sens, sans trop impacter le soin. » Et précise, ne pas être « là pour juger la capacité médicale, car il est toujours plus facile de refaire le match après. »
Germaine récupération bonjour… parceque la délation et le medical bashing c'est toujours tellement fun https://t.co/UliS48pnti
— Doc Primum – Dr François Morel (@docprimum) January 23, 2018
Architectures absurdes, espaces mal pensés et conditions sanitaires douteuses, des centaines de tweets ont suivi, relatant des situations extravagantes voire passablement inquiétantes.
#BalanceTonHosto
bâtiment de 2011, ils ont même pensé à mettre des prises derrières des radiateurs alimentés par la chaudière , et le bloc était alimenté en 9Ampere donc dans une salle: un respi, une colonne cœlioscopie, un ampli et un bairhugger et crack plus de jus!!😩 pic.twitter.com/AyBwE8VPFE— lason (@JeromeL94) January 19, 2018
https://twitter.com/ATerrom/status/954458497088856064
Quand ton collègue c est Mickey Mouse #BalanceTonHosto pic.twitter.com/RLO1F19ZUY
— Melle Amelie (@melle_amelie) January 18, 2018
Dégradation des conditions de travail
Dans la lignée d’une tribune parue dans Libération le 15 janvier et signée par 1 000 médecins, l’humour laisse place à l’indignation. A l’appel des professeurs André Grimaldi, Jean-Paul Vernant et de la docteure Anne Gervais, les signataires alertent sur un manque de budget qui « entraîne une dégradation des conditions de travail, provoquant épuisement et démotivation des soignants et en conséquence, une baisse de la qualité des soins. » A leur suite, certains se sont en effet emparés de ce nouveau cri de ralliement pour dénoncer des fautes graves au sein des services hospitaliers. L’occasion d’aborder des sujets sensibles comme les conditions de fin de vie.
Au CHU à 3h du mat,ils ont refusé de laisser rentrer le chirurgien de garde qui venait pour sauver un patient d’une ischémie aiguë de jambe (urgentissime)…pour non paiement de parking. #BalanceTonHosto
— Chir&Cie (@Chir_and_Cie) January 20, 2018
« Une entreprise qui doit devenir rentable »
La réaction des professionnels de santé que nous avons interrogés à propos du #BalanceTonHosto est, en effet, unanime. Ils y voient l’occasion de dénoncer des conditions de travail éprouvantes où les contraintes financières font loi. « Le problème majeur c’est que les dirigeants pensent économie alors que nous on est là pour prendre soin des gens. Nous n’avons plus le temps de prendre soin d’eux », s’insurge Margaux, infirmière en EHPAD dans le Sud-Ouest. « Notre conscience professionnelle fait qu’on donne toujours plus sans aucune reconnaissance de la part des responsables et bien souvent avec un salaire de misère comparé à nos responsabilités », explique-t-elle.
La santé est pensée comme une « entreprise qui doit devenir rentable », corrobore Manon, infirmière dans un grand hôpital parisien. « On vient, par exemple, d’apprendre que les IDE (Infirmier Diplômé d’Etat) de nuit de l’AP-HP (Assistance Publique – Hôpitaux de Paris) seront moins payés, par un simple courrier. La nouvelle nous est simplement donnée par la poste. »
Le constat est le même pour Bastien qui revient sur les difficultés auxquelles il s’est heurté lors de ses premiers stages à l’hôpital : « En psychiatrie, quasiment la moitié des médecins psychiatres était arrêtée pour cause de burn out sans être remplacée. Le service a donc été dans l’obligation de supprimer des places d’hospitalisation », se souvient-il.
Rappelons, à cet égard, qu’en novembre dernier le suicide d’un neurochirurgien au CHU de Grenoble avait remis à l’ordre du jour de façon brutale la détresse psychologique de nombreux agents de l’hôpital public.
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