Alors que la guerre civile fait rage depuis deux ans, le président syrien Bachar al-Assad vient de créer un compte Instagram pour dire tout le bien qu’il pense de lui-même.
1. Outil neuf pour propagande old school
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Au chapitre “Tyrannies : culte de la personnalité et nouveaux médias”, cette image figurera en bonne place dans les livres d’histoire. Alors que la guerre civile ensanglante son pays depuis plus de deux ans, Bachar al-Assad a ouvert fin juillet un compte Instagram. Au programme, pas de churros à la plage, mais de la propagande old school, à grand renfort de séances de travail, poignées de main avec des militaires, accolades émues avec le peuple, embrassades impliquant des êtres humains faibles (vieilles dames ou enfants) et acclamations de la foule. Bachar al-Assad est coutumier du fait : entre baroque oriental et gigantisme soviétique, ses étranges portraits ont longtemps orné les rues syriennes, comme le montre L’Avenir en rose, le projet du photographe suisse Nicolas Righetti (Work Is Progress, 2012).
2. Erreur 404, Syrie not found
Le compte syrianpresidency, non nominatif, identifie donc clairement et durablement la présidence syrienne à Bachar al-Assad – et à sa femme, qui occupe une large place dans les photos – et ne s’adresse qu’aux étrangers. En effet, le réseau de partage d’images est principalement utilisé par des Américains, des Japonais, des Brésiliens, des Espagnols, des Allemands et des Anglais. Il convient aussi de rappeler qu’en Syrie, internet est directement contrôlé par les autorités. Ainsi, l’accès au réseau a-t-il déjà été coupé à plusieurs reprises dans le pays (comme en novembre 2012 et mai 2013). Et Reporters sans frontières classe la Syrie en haut de la liste des ennemis d’internet (aux côtés de la Chine et de l’Iran), l’accusant de multiplier les moyens de surveillance – du contrôle des connexions aux logiciels espions, en passant par l’interception de mails.
3. Bandes de gaze et gaz sarin
Cette photo hallucinante postée fin juillet montre Bachar al-Assad au chevet d’un de ses combattants gravement blessé. Le message est clair : le Président ne laisse pas tomber ses troupes et n’hésite pas à se rendre physiquement auprès d’eux, jusqu’à toucher de ses blanches et pures mains le sang de ceux qui résistent à “l’agresseur”. Le contexte hospitalier et la figure largement retouchée de Chachar al-Assad contrastent avec le visage et la main ensanglantés du blessé. Jusqu’à laisser un grand sentiment d’étrangeté. Draps propres, positions surjouées et environnement aseptisé : comment ne pas penser que cette photo a été mise en scène de toutes pièces ? L’occasion de rappeler encore et toujours que ce président prétendument au chevet de son peuple n’hésite pas à utiliser le gaz sarin à son encontre.
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