Plusieurs secteurs de l’art sont confrontés à une baisse drastique des fonds venus du privé. Effet de la crise, mais aussi stratégie d’entreprises qui privilégient les investissements favorables à leur image.
L’annonce a fait l’effet d’une bombe : le mécénat culturel enregistrerait une baisse de 61 %. Selon une étude de l’Association pour le développement du mécénat industriel et commercial (Admical), il serait passé de 975 millions en 2008 à 380 millions en 2010.
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Pour Olivier Tcherniak, président de l’Admical, « si la crise est en partie responsable, entraînant avec elle un désengagement du pouvoir politique et, par effet de ricochet, des entreprises, il faut prendre en compte d’autres facteurs ». Comme la recherche d’une plus grande visibilité, avec retour sur investissement sans délai, et « l’événementialisation » de la culture :
« Le mécénat va de plus en plus vers de grands rendez-vous et de grandes institutions, au détriment des petites structures », précise-t-il.
Autre facteur, la progression du « mécénat croisé », qui allie dimensions culturelle et sociale en mettant par exemple l’accent sur l’accessibilité à la culture des personnes handicapées ou des enfants défavorisés. « Cette tendance a pour conséquence un déplacement de fond entre diffusion et création, note encore Tcherniak. Pour le dire autrement : on travaille davantage sur la vitrine que sur le fonds de commerce. »
« Dans la foulée, commente la responsable du mécénat pour une grande institution culturelle qui préfère garder l’anonymat, il faut noter l’émergence de nombreuses ONG et d’associations à vocation sociale ou écologique vers lesquelles les entreprises se tournent de plus en plus, ainsi que les conséquences de la loi sur l’autonomie des universités et des grandes écoles, qui les contraint à chercher des fonds privés. Or la plupart des grands patrons sortent de ces formations, et sont donc enclins à soutenir ces écoles qu’ils connaissent. »
Dans le champ des arts plastiques, moins touché que le spectacle vivant, il faut aussi noter le repli des très grands patrons sur leur propre fondation. François Pinault d’abord, mais aussi Bernard Arnault (dont la Fondation Louis Vuitton devrait voir le jour fin 2012) ou le groupe Galeries Lafayette, qui inaugurera bientôt un nouvel espace dans le Marais, à Paris.
Quelles solutions envisager ?
Comme le suggère cette responsable déjà citée, il faudrait « mettre l’accent sur la formation des ‘primomécènes’, qui ne savent même pas ce que signifie faire du mécénat ». La loi de 2003 sur le mécénat, qui prévoit pour les entreprises un abattement de 60% sur l’impôt, pourrait être revue.
« Le problème majeur de cette loi réside dans le plafond qui a été déterminé en 2003, et qui prévoit que cette réduction s’applique dans la limite de 0,5% du chiffre d’affaires, commente Olivier Tcherniak. Aujourd’hui, on assiste à une multiplication des PME : pour ces entreprises de taille modeste, 0,5% peut équivaloir à 2000 euros, ce qui est ridicule. Nous prônons une réévaluation de ce plafond. »
En attendant, il travaille à une charte sur le mécénat, « dont aucune définition, hormis celle, fiscale, fournie par la loi, n’a encore été formulée ». Elle sera présentée les 9 et 10 mai aux assises de l’Admical, à Marseille.
Claire Moulène
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