Arivaca, Arizona : ses marginaux, ses contrebandiers, ses racistes fanatiques. Trois paumés ont tiré sur la famille Flores. A leur tête, Shawna Forde, une militante anti-immigration qui dévalise les trafiquants de drogue à la frontière du Mexique. On est parti sur ses traces.
Si j’avais su, je serais venue équipée d’un calibre. J’ai toujours été opposée au port d’armes. Mais Arivaca, en Arizona, au beau milieu du wild Wild West, c’est le genre de patelin qui me ferait regretter ce genre de convictions.
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Après tout, si Gina Flores n’avait pas mis la main sur l’arme de son mari la nuit du massacre, elle n’aurait pas repoussé le deuxième assaut et serait morte comme Raul et leur fille de 9 ans, Brisenia.
Les shérifs ? Ils sont à cinquante kilomètres. Le temps qu’ils arrivent, on patauge déjà dans le sang. Les gardes frontière ? Ils pullulent mais crapahutent dans le désert, pourchassant les illégaux hispaniques et les “mules” qui transportent la coke et la marijuana dans des sacs à patates.
L’Arizona est devenu le Ground Zero de la border war. C’est le seul Etat frontalier où la barrière qui sépare le Mexique des Etats-Unis, pour sa plus grande portion, traverse les propriétés des ranchers.
Une cohorte explosive d’illégaux écorchés, de contrebandiers flippés et de racistes fanatiques passe dans le couloir d’Arivaca, à vingt kilomètres de la frontière.
Des caméras hypersensibles coiffent les trois tours installées depuis 2007 à la périphérie du village pour surveiller les mouvements de ses 1 000 habitants. Elles n’ont servi à rien. Le 30 mai dernier, entre 0 h 40 et 1 h 10, la tuerie a bien eu lieu, coûtant la vie à Raul et Brisenia Flores.
La nuit du meurtre
Cette nuit-là, Raul, Gina et Brisenia sont couchés lorsqu’on tambourine à leur porte. “Ouvrez. Perquisition !, crie une voix. Nous cherchons un fugitif.”
L’histoire est plausible. Raul ouvre. Il se trouve nez à nez avec un trio en uniforme et masqué. Il comprend immédiatement qu’il a affaire à des imposteurs et le dit. Les types le descendent. Brisenia hurle et pleure. Ils l’abattent.
C’est le tour de Gina. Blessée, elle fait la morte. Les tueurs se dirigent alors dans le jardin pour chercher la fille aînée du couple. Mais ce soir-là, elle est chez ses grands-parents. Ils reviennent dans la maison. Gina a saisi l’arme de son mari et tire. Entre-temps, elle a composé le 911 pour appeler les secours. La police enregistre la fusillade. Les assaillants s’enfuient. Les voisins disent n’avoir rien entendu.
Interrogée quelques jours plus tard, Gina affirme que c’est une femme qui donnait les ordres la nuit du crime. Les soupçons se portent rapidement sur Shawna Forde, une radicale militante anti-immigration de 42 ans. Sont aussi soupçonnés Albert Gaxiola, natif d’Arivaca, 42 ans, et Jason Bush, 35 ans, deux repris de justice.
Mais le trio continue d’errer dans le village pendant près de deux semaines. Albert semble tourmenté, Shawna flegmatique. “Dix-huit heures après le meurtre, elle est venue ici, raconte Fern, la tenancière de La Gitana, l’unique bar local. J’étais complètement ravagée. Les Flores étaient des copains. On aimait Brisenia. Ces sauvages l’ont visée en plein visage. Shawna m’a demandé pourquoi je faisais une tête pareille, si on savait qui étaient les coupables. Puis elle est sortie aussi sec sans rien consommer.”
“Cette femme était sinistre, ajoute Sean, le barman. La première fois que je l’ai vue, j’ai immédiatement su qu’elle ne nous apporterait que des ennuis.”
“Je me suis toujours demandé ce que Shawna foutait ici, raconte Robin, serveuse dans le restaurant Universal Ranch. Ses cheveux étaient décolorés et bien coiffés. Elle portait un tailleur et des bijoux. Pas du tout le style du coin. Tout de suite, elle a fait savoir qu’elle détestait les Mexicains.”
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