Une instance dédiée à la transparence sur les activités nucléaire… interdite à la population et aux journalistes ? Ça se passe ce mercredi 18 avril à Saint-Martin-en-Campagne en Seine-Maritime (76). La réunion de la CLIN de Paluel et Penly se tient cet après-midi. Au menu, du lourd : les études complémentaires de sûreté commandées après la catastrophe de Fukushima et surtout le dernier accident survenu à l’intérieur du réacteur n°2 à Penly.
En Seine-Maritime, département nucléarisé à très haute dose, la transparence autour de l’atome reste une chimère. Aujourd’hui, sous l’égide du conseil général, la CLIN fonctionne en sous régime. « Ce n’est qu’une chambre d’enregistrement des communications de l’ASN et de l’exploitant EDF », estime Yves Blondel, de l’Association pour le Contrôle de la Radioactivité dans le Nord Ouest (ACRO).
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« Il est très difficile de se faire communiquer des informations, tout est verrouillé », poursuit Alain Corréa, militant historique de la cause anti-atome.
Après de multiples relances, le collectif Stop EPR, ni à Penly ni ailleurs dont il fait partie a obtenu son droit de cité à l’intérieur de la CLIN. Et son fonctionnement laisse songeur. Pas de site internet, aucun document mis à disposition, réunion tenue à huis clos… En théorie, l’instance devrait incarner la transparence de l’information en matière nucléaire. « Nous préférons organiser des réunions sans public », explique Agnès Thiou, chargée de mission pour la CLIN (Commission Locale d’Information sur le Nucléaire) au conseil général. « Ce n’est pas comme une assemblée d’élus », justifie à son tour Didier Marie, le président PS du conseil général. « J’ai élargi la représentation à l’intérieur de la CLIN en l’ouvrant à des associations hostiles à l’atome », rappelle l’élu pour attester de ses velléités démocratiques.
Pas question pour autant de faire de vague. La semaine dernière, les militants locaux de Sortir du nucléaire se sont vus rappeler à l’ordre : ils avaient osé publier sur leur site le lieu et le numéro de téléphone du secrétariat de la CLIN. Les militants se sont également offerts des encarts publicitaires dans les journaux locaux pour annoncer la tenue de la réunion.
En Seine-Maritime, le nucléaire reste un sujet sensible. En temps normal, six réacteurs fonctionnent sur les côtes normandes. Au total, la Seine-Maritime produit près de 10% de l’électricité nucléaire française. Plusieurs dizaines de millions d’euros tombent chaque année dans les poches de certaines collectivités publiques.
« Les élus normands ne voient que les emplois et l’activité économique autour de la filière nucléaire », regrette Yves Blondel de l’ACRO.
Suffisant pour expliquer un fonctionnement a minima de la CLIN ? Pas sûr. En Nord Cotentin, territoire encore plus nucléarisé, les CLIN sont ouvertes au public et elles tournent à plein régime. « Cela fonctionne bien mieux, rapporte Yves Blondel de l’ACRO. Là bas, elles jouent pleinement leur mission de contre expertise. Elles commandent des études indépendantes pour comparer les données aux résultats annoncés par l’exploitant. » Pour le moment, rien de tout cela à Penly et Paluel.
Lors du dernier incident à Penly, Yves Blondel a proposé à la CLIN de s’associer à la campagne de prélèvements réalisés par son association.
« J’attends encore la réponse de Serge Boulanger », regrette-t-il. Malgré nos sollicitations, le président de la CLIN n’a pas non plus donné suite à nos demandes d’entretien. « Toutes les CLIN n’en sont pas au même stade de développement… », justifie Agnès Thiou. Le site internet devrait être mis en ligne à l’été. « Ils en parlent depuis deux ans », rappellent les militants du collectif Stop EPR, ni à Penly ni ailleurs.
La communication externe reste pour le moment minimaliste. Seule une lettre est adressée deux à trois fois par an aux habitants à proximité des sites nucléaires. « Les associatifs n’ont pas le droit de s’y exprimer », rapporte Yves Blondel de l’ACRO. Didier Marie, le président du conseil général, annonce des évolutions prochaines, rappelant que le récent incident de Penly amène « à renforcer encore la transparence de l’information ». Ce matin même – coïncidence ? – la CLIN publie un communiqué de presse demandant une meilleure information à EDF et l’ASN. « Aujourd’hui, c’est une coquille vide qui sert de paravent aux élus », assène de son côté Guillaume Blavette porte-parole du collectif Stop EPR. La réunion d’aujourd’hui promet d’être animée. Enfin un véritable débat ?
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