Après moultes scandales ayant ébranlé les plus grandes maisons, de Valentino et ses « inspirations tribales » à Chanel et son « esthétique amérindienne », les créateurs ne semblent toujours pas retenir la leçon en matière d’appropriation culturelle. Pourquoi ce débat fait-il toujours rage au coeur de la sphère mode ?
Pour le bien d’une collection et sous couvert de « célébration culturelle », les créateurs n’hésitent plus à s’emparer de symboles et de tenues liés à un héritage précis : du look « chola victorien » chez Givenchy qui caricaturait la « latina », à Forever 21 présentant le dashiki -vêtement traditionnel africain- comme « tendance du moment », en passant par l’inspiration indigène « Dsquaw » par DSquared2, la liste est longue.
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Tous ces scandales ont poussé le professeur George Nicholas à publier un guide à l’égard des créateurs et des designers : « Pensez avant de vous approprier ». L’auteur explique que ces différentes cultures et en particulier la culture indigène, sont devenues malgré-elles des « domaines publics totalement libre de droit (…) or les créateurs se doivent de demander la permission avant tout emprunt, de contextualiser et d’expliquer la source de ce dernier. Ils deviennent ainsi un soutien pour ces communautés. ». Mais ces dernières sont rarement au fait de ces emprunts et rares sont les charges et les procès contre les créateurs.
« Ma culture n’est pas couture »
Si ces derniers sont si souvent passés entre les mailles du filet, les internautes sont déterminés à les dénoncer, à travers notamment le lancement du mouvement sur twitter « #my culture is not couture ». Un hashtag permettant de dénoncer les abus des créateurs en matière d’appropriation culturelle et qui fut soutenu dès sa création par des artistes comme Azalea Banks ou encore la jeune actrice Amandla Stenberg. Cette dernière va même plus loin en dénonçant dans une vidéo la glorification d’appropriations culturelles faites par des personnalités comme Kylie Jenner : « un style qui mène à des généralités et des stéréotypes vient forcément de sa communauté d’origine, mais lorsqu’il est repris par la haute-couture, les créateurs, les privilégiés il devient tout de suite cool et branché ». La jeune activiste a ainsi fédéré toute une communauté 2.0 inquiète de ce « pillage culturel ».
Abus des créateurs vs crédulité des consommateurs
KEFF et Sasa, deux artistes New Yorkais ont quant à eux décidé d’inclure la responsabilité des consommateurs en matière d’emprunt culturel. En créant en juin 2016 une collection capsule de t-shirts avec écrit « Random Japanese Shit » en caractères japonais. Ils parodient cette tendance streetwear qui reprend les kanjis et autres alphabets pour les imprimer sur des sweats et t-shirts avec une traduction souvent hasardeuse. KEFF explique : «Des marques comme la marque britannique Superdry qui a fait 700 millions d’euros de bénéfices l’année dernière en se faisant passer pour une marque japonaise c’est inadmissible. Notre t-shirt est une réponse direct à ces marques là et surtout au public qui achète ces vêtements sans même en comprendre la signification. ».
Première initiative du genre, l’artiste New Yorkais espère en voir d’autres apparaître afin que public et créateurs prennent conscience ensemble du problème. Une prise de conscience qui se vérifiera rapidement, d’ici quelques jours lors de la Fashion Week Haute-Couture. Avec ou sans scandale culturel.
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