Alors qu’un appel à la grève a été lancé chez Amazon à quelques jours de Noël, l’activiste numérique Elliot Lepers a créé « Amazon-Killer ». Une extension pour sauver les libraires indépendants en perte de vitesse face à Amazon. Explications.
Pénétrer l’antre feutrée d’un libraire, partir en quête de LA perle sélectionnée par ses soins, qu’il aura estampillée d’un post-it griffonné de quelques commentaires… Les Français en général et les Parisiens en particulier boudent désormais ce plaisir. « Paris est la ville d’Europe où il y a la plus grande densité de libraires, et c’est là qu’on achète le plus sur Internet, rappelle Elliot Lepers, l’ancien présentateur de L’Œil de links et développeur, entre autres, de Macholand.fr. Les libraires n’ont plus que quelques années à vivre. »
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Le 26 juin dernier, le gouvernement a tenté d’intervenir pour les protéger avec une loi interdisant les frais de port gratuits. La réplique d’Amazon ne s’est pas faite attendre : le géant de la vente en ligne a fixé son tarif de livraison à 1 centime d’euro.
« J’étais vraiment hors de moi, j’ai trouvé ça d’une telle mauvaise foi que j’ai voulu chercher un moyen d’ajouter ma pierre, j’ai codé ce truc basique, je l’ai mis sur une plateforme de partage de développeurs. Et puis, il y a une semaine, je l’ai publié sur mon Facebook. Je ne pensais pas que ça prendrait aussi bien. Ça révèle une vraie volonté de se battre contre Amazon », raconte-t-il.
Simple et efficace
Le principe est simple : télécharger l’extension Google Chrome Amazon-Killer, aller sur Amazon, trouver l’objet littéraire convoité, demander à Amazon-Killer de trouver la liste des librairies les plus proches où il est disponible, le mettre dans son panier et aller l’acheter sur place. Le tutoriel démontre la simplicité de la démarche :
Depuis que le bouche à oreille a commencé à fonctionner, l’extension d’Elliot a été téléchargée 400 fois rien que sur le Chrome Store, à sa grande surprise :
« C’est assez drôle, je n’ai pas fait grand-chose. Il y a une base de données, celle de la Place des Libraires, et il y a Amazon. J’ai juste fait un petit pont entre les deux. Il y a aujourd’hui une volonté affichée par les commerçants en ligne d’être les plus rapides, les plus pratiques. Mais si on prend le métro, en moins d’une heure on a son bouquin. Aussi rapide que soit Amazon, il ne vous livre que le lendemain. »
« Nous n’utilisons plus Amazon, on ne veut pas les encourager »
Fidèle à son modus operandi d’activiste numérique, là où une pratique existait déjà, il a simplement développé un outil qui facilite les choses. Tristan s’en félicite. Il fait partie de ceux à qui Amazon-Killer manquait. A 27 ans, il vit à l’étranger. Avec ses trois frères et sœurs et leurs parents, tous installés aux quatre coins de l’Europe, ils ont trouvé une astuce pour être sûrs de faire plaisir à tout le monde pour Noël sans passer des heures au téléphone à parler cadeaux : Martin, le geek de la famille, leur a proposé d’utiliser la fonction « liste d’envies » d’Amazon. Chacun s’est créé la sienne qui répertorie tous les objets qui lui feraient plaisir. Ils se l’envoient ensuite par mail. Mais hors de question d’acheter sur le site : « Nous n’utilisons plus Amazon, on ne veut pas les encourager. Leur politique de ressources humaines est désolante« , affirme Tristan. En France la CGT a d’ailleurs appelé les salariés de quatre sites logistiques d’Amazon à faire grève le 22 décembre pour réclamer « des salaires décents et de bonnes conditions de travail ». Tous les utilisateurs d’Amazon-Killer essayent au maximum d’acheter local, où qu’ils vivent.
Si Tristan et sa sœur regrettent de ne pas pouvoir utiliser Amazon-Killer dans le pays où ils vivent, c’est peut-être pour bientôt. Le syndicat des libraires français a très bien accueilli l’initiative d’Elliot et leurs homologues européens l’ont contacté pour envisager la possibilité d’étendre ce service à toute l’Union. Amazon n’a qu’à bien se tenir.
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